Acte I, 4e Epître - Triste vérité

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Mardi 25 Août.

Ça faisait quinze jours maintenant que Ben Maners était à l'hôpital. Après sa sortie du coma, il s'était rendormi pendant une trentaine d'heures avant d'émerger à nouveau. A chaque éveil, il demandait des nouvelles de sa femme, mais le personnel soignant restait évasif, prétextant toujours qu'elle était soit occupée avec les agents de la Sécurité Intérieure, soit partie peu de temps auparavant. Ces réponses de normands avaient fini d'agacer Ben, qui avait décidé de confronter une bonne fois pour toute le docteur Edwards. Il avait patiemment attendu que ses forces reviennent, et il se sentait à présent suffisamment remis pour quitter l'hôpital et partir à la recherche de Mary-Ann si les réponses ne lui convenaient pas.

En attendant l'heure des visites, il regardait par la fenêtre la circulation qui quadrillait les alentours de l'hôpital, tandis que la télévision proposait un flot ininterrompu de clips en tout genre. Certainement que le personnel médical devait penser que bloquer tous les téléviseurs sur une chaîne musicale empêcherait les patients de déprimer en regardant les chaînes d'info ou de trop s'enthousiasmer devant le sport, mais franchement, entendre cette soupe commerciale à longueur de journée, c'était de l'incitation au meurtre, ni plus ni moins, même avec le son coupé.

Commençant à s'impatienter, Maners se leva pour aller fouiller dans son placard. Il espérait que sa femme lui avait apporté du rechange pour quand il pourrait enfin sortir. C'est alors que le docteur Edwards pénétra dans la salle, suivi de près par la jeune infirmière responsable de Ben :

« - Vous êtes sûr que vous avez le droit d'être debout, s'étonna le médecin. N'oubliez pas que vous êtes encore convalescent : vous ne devez pas trop forcer.

- Ne vous inquiétez pas, docteur. Je me sens en pleine forme, s'exclama Maners. Je crois même que je serais capable de soulever des montagnes !

- Je ne vous en demande pas tant, s'amusa le praticien. Par contre, j'aimerais faire des analyses un peu plus approfondies de votre boîte crânienne...

- Pourquoi donc ? s'enquit Ben. Il y a un problème ?

- Non, pas spécialement. A première vue, tout semble normal. Mais je préfère prendre des précautions, expliqua-t-il : il ne faut pas oublier que votre accident a été très violent, et je ne voudrais pas passer à côté d'un traumatisme crânien plus profond ou de quelque chose de ce genre. Et puis, comme on dit, mieux vaut prévenir que guérir.

- Cela m'étonne d'entendre de telles paroles de la part d'un chirurgien tel que vous, docteur ! Par contre, quand aurais-je enfin droit à des visites ? demanda Maners en changeant de sujet. Il me tarde de pouvoir enfin revoir mon épouse...

- Eh bien... Normalement, si tout va bien, cela devrait être possible d'ici 3 à 4 jours, répondit Edwards en posant la main sur son front dégarni, pensif.

- Et pourquoi ça, s'enquit Ben, agacé. Je suis sorti du coma depuis presque une semaine. Vous ne cessez de me répéter que mon état s'améliore de jour en jour. Et pourtant vous me gardez enfermé ici, sans contact avec le monde extérieur ! Ça commence à bien faire maintenant !

- Monsieur Maners, je comprends votre impatience, commença le docteur...

- Non, vous ne comprenez pas ! Depuis mon réveil, on me sort tous les prétextes possibles et imaginables pour justifier l'absence de ma femme. Mais je connais Mary-Ann : il aurait fallu l'assommer et la trainer de force hors de ma chambre pour l'empêcher d'être à mes côtés ! Elle n'aurait pas quitté mon chevet un seul instant ! Mais vous osez me soutenir, les yeux dans les yeux, que depuis une semaine, elle attend patiemment dans notre salon que vous lui donniez l'autorisation de venir me voir ? Vous croyiez sérieusement que je vais gober ça ?!

DIES IRAE - Cycle I : L'AngicideDonde viven las historias. Descúbrelo ahora