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Avertissement : Ce passage pourrait choquer. Ne pas lire si vous êtes sensibles. Scènes choquantes et violentes. Pour rappel : tout cela n'est que fiction.

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Je me débats contre moi même. Mon cauchemar n'en finit pas. Je ne peux pas crier juste supplier. Je subis tout jusqu'à ma propre mort. Une mort si soudaine, si laide. Soudain, je me réveille en un sursaut. Ma mère est à mes côtés. Des larmes ont laissées deux traces sur ses joues roses. Elle me fait un sourire triste. Je regarde mes mains toujours bandées.

- Je te fais encore souffrir, je gémis.

Elle me prend les mains et les serre doucement.

- Je t'aime, Adil, dit-elle avec tendresse. Je suis sûre que tu peux encore te sortir de là. Tu es seul dans tes propres cauchemars ; je ne peux plus t'aider. Est-ce que tu comprends ?

Je passe une main sur mon visage. Ma mère défait lentement le bandage d'une de mes mains et commence à me soigner. Ses mains sont douces mais froides. Toujours silencieuse, elle refait la même chose à mon autre main puis l'entoure d'un bandage propre. Je la laisse enlever mon t-shirt tandis que je ferme les yeux. Ses doigts parcourent mon ventre, mes pectoraux, mon cou. Elle inspecte chaque parcelle, à la rechercher d'une autre scarification. Ses doigts me rappelle ceux d'Anna, lorsque je lui ai offert mon secret. Après, elle place ses mains sur mes joues pour me regarder en face. 

- Je t'aime m'man, je murmure avec un sourire fragile.

- Je sais, sourit-elle. Mais ce que je voudrais savoir c'est si tu aimes aussi Anna. Je vois qu'elle est chère à tes yeux, et c'est une bonne chose. Elle peut que te faire du bien, non ?

Je baisse les yeux. Mon cœur s'affole mais je sais désormais la réponse. Ma mère trouve la réponse dans mes yeux. Elle hoche la tête lentement, comme pour approuver. Alors qu'elle s'apprête à se lever, je la retiens doucement et l'embrasse sur la joue. J'essuie ses dernières larmes et la laisse sortir de la pièce. Je m'empresse d'enfiler des vêtements propres et clairs puis reprend ma cigarette. L'avoir entre les lèvres me rappelle lorsque je fumais vraiment. Lorsque j'étais encore perdu. Aujourd'hui, je me rends compte que je le suis encore, mais que c'est peut-être la dernière fois. Et ça, ça me fait sourire. J'attrape ma cigarette et la range dans son paquet, vieux déjà de quelques années. J'ouvre les rideaux, laissant passer la lumière rosée du matin. Puis je m'attaque à mon visage, ou plutôt ce qu'il en reste. Mes cernes sont encore plus visible à cause de cette nuit. J'ouvre les placards de la salle de bains et y trouve tous les produits de beauté de ma mère. Je fouille, à la recherche de ces petits masques pour les cernes que ma mère utilise de plus en plus. Je place les petits bandeaux anti-cernes sous mes yeux et regarde le résultat dans la glace. Je me mets à sourire. Ça devrait faire l'affaire. Pourtant, cette petite joie ne dure pas longtemps. J'ai à peine le temps d'attraper mon flacon de pilule qu'une envie de vomir me submerge. Je trébuche jusqu'aux toilettes, nauséeux. Je vomis silencieusement pendant une bonne minute. Puis je m'assois sur le carrelage froid, épuisé. Les souvenirs reviennent, piquants et horribles, qui me déchirent le cœur. De douleur, je me laisse noyer par ces souvenirs enivrants...

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Je tremble encore plus des mains. J'ai peur et mon cœur est rempli de haine. Ma mère n'est pas à mes côtés pour me rassurer, me prendre la main et me répéter "je t'aime". Je suis là, devant la barre, devant mon assassin. Puis mon oncle me fait un signe et, devant tous ces hommes en robe noire, je m'apprête à parler. 

- Tout a commencé lorsque j'avais 8 ans, je déclare. J'étais rentré de l'école où des camarades de classes s'étaient moqués de moi. Je suis donc arrivé en pleurant. Mais lorsque je suis rentré à la maison, c'est des cris que j'ai entendu. J'ai pris peur mais je me suis quand même dirigé vers le salon. Là, mon père frappait ma mère, debout en face de lui. Il la frappait dans le ventre, dans les côtes mais ne touchait pas à son visage. J'ai hurlé ce jour là. Je crois qu'il y avait des bouteilles d'alcool sur la table, mais j'étais petit, je ne savais pas reconnaître ce genre de chose. C'est depuis ce jour là qu'il nous battait. Il battait ma mère et la violait mais lorsqu'il en avait marre, il s'en prenait à moi. Il me giflait, me donnait des fessées, me tapait à coups de ceinture et me donnait des coups de pieds. Parfois ce n'était pas des coups, juste des insultes, des injures, sur moi, sur ma mère. Il me privait de repas, m'enfermait dans le placard, me laissait seul dans ma chambre pendant des heures. Ma mère a essayé, au début, de se battre, mais c'était trop dur. Mon père était connu pour sa gentillesse au travail, personne ne pouvait nous croire. Tout c'est empiré lorsque je suis entré dans l'adolescence. Il me battait moins mais m'humiliait plus. J'ai commencé à me scarifier, à avoir des troubles alimentaires mais aussi de sommeil. Mon corps est strié de cicatrices, de bleus et de coupure. Je ne dormais plus, je ne mangeais plus, je ne parlais que pour répondre à des questions. Toute mon enfance s'est envolée. Je ne distinguait plus mon enfance joyeuse de mon adolescence horrible. Même aujourd'hui, j'ai peur. Peur de lui, peur des autres mais surtout de moi même. J'ai même essayé de me tuer, une fois, en avalant des médicaments en rafale ; j'ai même essayé de sauter au dessus de mon balcon, mais je me suis évanoui avant. Si je suis ici c'est pour que je commence une nouvelle vie, sans lui. Sans cauchemar ni douleur. C'est tout ce que je demande. 

Haletant, je m'arrête de parler. Puis je lève lentement la tête. Mon père me regarde en souriant, un sourire machiavélique. Je n'en peux plus, ma tête tourne. J'ai juste le temps de me pencher en avant pour vomir. Je sombre. Je tombe. Puis, c'est le noir. 

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Je me réveille de cette transe d'un coup et je me cogne la tête contre le lavabo. Je n'ai pas mal, pourtant je hurle. Je hurle comme un fou. J'aperçois vaguement ma mère se pencher au dessus de moi. Je ne hurle plus. Je coule. Je coule dans la douleur.

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-Bipolaire Insensible-Wo Geschichten leben. Entdecke jetzt