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C'est les vacances d'hiver, de Noël quoi. Il s'est passé déjà une semaine depuis ma compétition. 12e. C'est bel et bien mon record. Si je continue comme ça je pourrais participer aux compétitions européennes d'après John. Il fait froid, trop froid. La température semble chuter de plus en plus tous les jours. Le vent mord sans pitié et le ciel est encore plus gris qu'avant. Même si j'aime le froid, voir la neige tomber m'ennuie. Peut-être parce qu'il n'y a plus personne ici ; Noémie est partie avec son fiancé, Léo est chez des amis, Tom s'est enfui chez les grands parents dans le sud et mon père doit être encore en train de se bourrer avec de vieux fêtards. Et puis ma mère, ça ne sert à rien d'en parler. Il ne reste plus que...Adil. Une semaine après sa crise d'angoisse dans la forêts, plus de nouvelles. J'ai du lui envoyer une dizaine de message, sans qu'il n'est rien lu. Soudain, je me souviens que j'ai le numéro de sa mère. Je me lève, faisant craquer mes genoux et me dirige lentement vers mon téléphone avec mon plaid autour de moi, mes chaussons roses aux pieds. Quelle dégaine. Je vais dans les contacts, fait défiler inlassablement tous les numéros inutiles avant de tomber sur le sien. Je soupire. Espérons qu'elle me réponde. Je me rassois et cale le téléphone sur mon oreille et attends.

- Allô ? Fait une voix enjouée à la deuxième sonnerie.

- Oui bonjour heu Madame...je bégaie, me souvenant plus de son nom.

- Alicia, fait-elle. Appelle moi Alicia. Comment vas-tu Anna ?

Une courbature aux épaules m'oblige à me redresser. Je reprends mon téléphone en main d'un geste vif. 

- Toujours fatiguée. Les vacances vont m'aider à me reposer, je pense. Et vous ?

- J'imagine qu'avec de tels efforts physiques...Oh, moi je vais bien merci, répond-elle rapidement. Je suppose que tu cherches Adil non ?

- En fait...oui, j'avoue nerveusement.

J'entends quelques bruits de vaisselle. Je me demande si elle se repose elle aussi.

- Hé bien figure-toi qu'il est parti s'entraîner au gymnase dans le 15e je crois... Il a décidé de reprendre la gymnastique acrobatique depuis quelques jours. Je suis désolée qu'il ne t'ai pas appelé, il n'était pas très bien.

Est-ce à cause de sa crise d'angoisse ?

- Oh, d'accord. Vous pensez que je peux aller le voir ?

- Je pense qu'il en a besoin, en effet.

Je reste un moment silencieuse. J'hésite à lui demander pourquoi. Elle me donne l'adresse exacte du gymnase et je ne sais toujours pas quoi dire. Je préfère lui lancer de vagues adieux avant de raccrocher précipitamment. Puis j'hésite. Mais je n'arrive pas à choisir alors je prends l'option la plus risquée : aller le voir. Je me regarde vite fait dans le miroir. Je pouffe. Quelle sale tronche ! Mes cheveux sont ébouriffés, mon nez est tout rouge et mes vêtements semblent tout droit sorti d'une vieille brocante.

- Okay, on va se remettre en route ma vieille, je murmure à mon reflet.

Pour mes cheveux, c'est simple. Je passe environs dix minutes à les démêler avant de me coiffer de deux tresses africaines. Je me mets une petite crème sur mon visage avec une touche d'anti-cernes. Puis j'enfile un gros pull bleu marine avec un sous-pull à col roulé blanc. Je garde mon jean délavé et mes vieilles Doc Martens noires montantes. J'attrape mon Pancho d'hiver, mon vieux sac en cuir qui a l'air de s'être refilé de génération en génération et mon téléphone, puis je sors.

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Le GPS m'amène tout droit vers le gymnase, qui en fait n'était pas très loin. Ce n'est pas un bâtiment super moderne mais il n'a pas l'air d'être très vieux non plus. Par contre, je ne trouve pas de portes vélo et je dois le garer à plusieurs mètres de là. J'entre dans le bâtiment et me retrouve un peu paumée. J'arrive à trouver la salle principale mais je n'y trouve pas Adil. D'ailleurs il n'y a absolument personne. Je me mets a ouvrir deux petites salles jusqu'à trouver la bonne. Il est là. Perché sur une barre de traction, il est là. Plusieurs personne sont devant lui, à l'observer d'une façon admirative. Je me fige. Il porte un débardeur serré et un short, l'un de ses bras musclés est recouvert d'une manchette de sport et il a des sortes de maniques au mains. Il lève lentement son corps au dessus de la barre et reste fixe pendant quelques secondes, où je reste à l'observer fascinée. Calmement, il tourne autour de la barre plusieurs fois avant de se retourner complètement de façon parfaite et rapide. Puis il recommence à retourner autour de la barre et change de main en se tournant et retournant. Il balance son corps au dessus de la barre et reste parfaitement immobile. Je le vois lentement lever sa main gauche pour la coller à son corps, se tenant sur la barre qu'avec une main. Puis il reprend la barre avec ses deux mains et se laisse tomber sur le tapis, essoufflé. Le petit groupe de spectateurs applaudit et certains sifflent. Je passe la main sur mon visage. Wow, juste wow. Il se relève et retire ses gants puis s'avancer vers moi sans m'apercevoir encore. Je recule, indécise. Il a maintenant ramassé sa veste de sport et la porte sur ses épaules. Tout à coup, il lève les yeux et me voit tandis que les autres ne prêtent plus attention à lui. Je me fige encore plus. Il ne semble pas surpris de me voir.

- Anna, dit-il simplement, lorsqu'il s'approche.

Je ne dis rien. Il se mord la lèvre d'une façon presque craquante et s'avance vers la porte. Je cligne des yeux plusieurs fois d'affilée. Suis-je en train de me trahir toute seule là ?

- Tu m'attends ? Me demande-t-il avant de sortir.

Je hoche la tête, à court de mots. Il fait lui aussi un mouvement de tête avant de sortir de la salle. Je sors après lui, mais je préfère l'attendre dehors. Une fois devant le bâtiment, je m'autorise à sourire. Adil est magnifique...

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-Bipolaire Insensible-Onde histórias criam vida. Descubra agora