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Rose.

Mes mains tremblent si fort. C'est à peine si j'arrive à le tenir correctement. Ma vue est quasi-inexistante à cause de mes larmes, mais je m'efforce de fixer cette petite ouverture. J'attends de savoir. Nous attendons de savoir. Et même si, malgré le fait que je garde certaines pensées pour moi, mon corps montre mes ressentiments, Harry lui, reste de marbre. Et je le connais trop bien pour pouvoir affirmer qu'il est au bord de la falaise lui aussi. Cependant, il n'a pas l'air aussi effrayé que moi. J'ai plutôt l'impression qu'il ne ressent que de l'étonnement, et qu'il n'est que troublé par cette nouvelle qui viendra, ou non, chambouler nos vies.

Le silence dans cette salle de bain est tel qu'il me glace le sang. Je frissonne, renifle, et m'essuie les yeux du revers de ma main.

« Ça vient d'apparaître... »

Il se redresse du mur sur lequel il était adossé, et ses yeux se bloquent dans les miens. Je pince mes lèvres entre elles, et mes joues deviennent un terrain de larmes glissant jusqu'à mon menton.

Il s'approche de moi, et sans dire un mot, il enroule ses bras autour de mes épaules. Étant assise sur le rebord de la baignoire, mon visage se colle contre son ventre, et je m'empresse de renifler son odeur qui m'apporte un soutient chaleureux.

« Je ne vais pas te mentir, » lâche t-il, sa voix enrouée par les larmes, « je suis heureux. »

Mon cœur rate un battement et je relève aussitôt mon visage vers le sien. Il se recule lentement, en gardant ses mains sur mes épaules. Son visage semble illuminé par ses doux sourires si sincères, et ses larmes l'entourant. Ses yeux se ferment dû au fait que ses pommettes se relèvent, et sa main vient se poser sur ma joue, en la caressant si lentement, que mon corps tout entier semble relâcher prise et se détendre en un instant.

« Tu-tu es heureux ? Comment ça ? »

« Je suis heureux » répète t-il une seconde fois, « c'est avec toi que je veux faire ma vie et personne d'autre. Je n'aurais pas pu rêver mieux. »

Ses jambes se plient, et il se baisse lentement pour que son visage soit à la même hauteur que le mien. D'un revers de son pouce, il essuie les larmes glissant de mon œil et sa tête se penche légèrement sur le côté, tandis que son sourire ne s'efface pas une seule fois.

Je ne sais pas vraiment quelle expression je dois avoir. Je ne comprends pas, comment peut-il se sentir heureux ? Veut-il vraiment de cet avenir avec moi ? De toutes ces responsabilités ? En suis-je capable ? Je pense que oui. Mais, ma confiance en moi, et tout ce qui a pu se passer, me fait douter. Je peux rien avoir d'autre calqué sur le visage qu'une expression d'étonnement.

« Tu es tout ce dont j'ai de plus cher dans ce monde, » chuchote t-il, sa voix se brisant légèrement, « tu es la seule source de stabilité dans ma vie, la seule personne qui ait réellement cru en moi sans jamais en montrer une seule faille. Jamais je n'aurais pensé rencontrer quelqu'un qui me comprenne autant, et en qui je pourrais placer autant de confiance et d'Amour. »

Je m'efforce de garder une respiration normale pour ne pas éclater en sanglot, mais ces mots résonnent en moi comme une délivrance et je me sens si bien à ses côtés que je sais que si cela arrive, je serais tout de même en sécurité.

« Je n'ai jamais eu l'Amour que d'autres ont eux, et je ne savais pas que j'étais tout de même capable de le ressentir. Normalement, quand on ne connaît pas quelque chose, si on ne vient pas nous même à l'apprendre, nous ne le connaîtrons jamais. Cet enfant est la clé de cette connaissance. Nous ne connaissions pas l'Amour que nous avons l'un pour l'autre, avant de se voir pour la première fois, au centre. Et pourtant, nous avons apprit à le maîtriser, à le comprendre, et à le chérir. Le fait que tu sois enceinte, nous donne une seconde chance envers cet Amour familial que nous n'avons pas eu la chance de recevoir à son apogée. »

D'une main, il tire la manche de son sweat, et il recouvre sa main entière de celle-ci, avant de la glisser sur ses joues mouillées. Il se racle la gorge et ses lèvres se remettent à bouger, en souriant, tandis que le son et les mots qui en sortent, ne cessent de me faire pleurer tout en compressant mon cœur.

« Nous apprendrons à dompter cet Amour et à le donner comme il le faudra. Je ne dis pas que nous allons savoir le faire dès le début, ni même jusqu'à la fin de nos vies, qui sait ? Comment savoir si nous arriverons réellement à le comprendre, et à le savoir ? Mais, Rose, » il sanglot s'échappe de mes lèvres tandis qu'il scelle sa main avec la mienne, tout en gardant l'autre sur ma joue, « avec toi, je suis capable de tout. Tu me rends si fort, et si sur de moi-même. Je suis heureux parce que je sais qu'à cet instant même, si tu décides de garder cet enfant, je ferais en sorte d'être le meilleur père et le meilleur amant. Je veux que tu puisses comprendre que cet enfant n'est pas un fardeaux, mais qu'il est une source d'espoir, et de connaissance envers un sentiment inconnu. »

J'hoche doucement la tête. Mes yeux se ferment, et j'ouvre la bouche pour parler. Cependant, aucun son n'en sort. J'aimerai parler. Bon sang, j'aimerai tellement. Mais les mots ne veulent pas, les sentiments sont trop fort. Je dois épuiser tellement d'énergie à me concentrer pour ne pas pleurer plus fort, ou même déclencher une crise d'angoisse.

« Je- » ma tête se baisse toute seule, sans que je ne puisse la contrôler, « J'ai si peur Harry, je sais que j'ai vécu des choses qui ne pourront pas être soignées d'ici tellement de temps. Je suis alcoolique bon sang! Oui je me suis faites soignée, et oui je sais que j'ai fais des progrès, mais comment peux-tu être sûr que j'en sois capable ? Une addiction aussi grave et hautement encrée en moi ne partira pas, même si j'arrive à contrôler pulsions et envies. J'ai si peur, comprend-moi, » pleurais-je, « comment pourrais-je porter un enfant si chaque jour je finirais par me réveiller la peur au ventre de le mettre en danger ? Ou pire, de mettre fin à sa vie avant même qu'elle ne puisse commencer ? Qui sommes-nous pour le savoir ? »

Son visage angélique gravé d'un sourire n'a pas bougé. Il s'est seulement inondé de larmes au fur et à mesure que mes pensées venaient hanter les murs de cette pièce si petite et pourtant si grande pour absorber tant d'émotions.

« Tu as raison quand tu parles d'Amour, parce que cette partie de moi ne veut pas de cet enfant pour cette raison là aussi. Mais, après t'avoir entendu, j'ai comme l'envie d'y laisser une chance. De me laisser une chance, et de me montrer que j'en suis capable. Si j'ai été capable de t'aimer, et de te donner don de tout ce que j'ai, je sais que j'en serais capable pour un enfant. Pour notre enfant. »

Sa tête s'élève brusquement et ses yeux jonglent entre les miens durant de longues secondes. Il fronce les sourcils, puis se mord la lèvre avant de fermer les yeux. Il reste silencieux, et sa main sur ma joue exerce sur légère pression, me faisant paniquer.

Je viens de lui annoncer que je me sens capable de garder, d'élever et d'aimer cet enfant, et c'est comme ça qu'il réagit ? J'ai l'impression qu'il n'est pas d'accord ? Mais pourtant, il venait de me dire qu'il se sentait prêt, lui aussi. Je ne comprends pas.

« Rose, écoute moi » il agite sa main devant mon visage, avant que je ne me rende compte que ma cage thoracique bougeait brusquement de haut en bas, ma respiration restant bloquée, « calme toi s'il te plaît, tout va bien. »

J'hoche la tête à plusieurs reprises, comme pour lui faire comprendre que je sais que tout va bien. Et surtout, que je le crois. Je sais qu'avec lui, tout ira bien. Ensemble, nous irons bien. Mais, puisque j'ai tendance à tout interpréter avant de savoir réellement ce qu'il se passe à l'intérieur de ses pensées, je me mets dans des états pareils.

« Je suis désolée » soufflais-je en reprenant mes esprit petit à petit.

Ses bras s'enroulent de nouveau autour de moi, et son visage se niche dans mon cou. Il y respire lourdement, et je l'entends sangloter de temps en temps. Mes mains passent de haut en bas dans son dos, et nos corps se serrent l'un contre l'autre un peu plus, à chaque seconde qui passe. Il finit par renifler silencieusement avant de se retirer de notre étreinte. Et, après avoir lâché un rire étouffé, il a prononcé ces mots qui m'ont procuré une sensation de papillons dans le bas de mon ventre.

« Je vais être papa. »

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⏰ Dernière mise à jour : Sep 06, 2021 ⏰

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