Chapitre 45

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Les adieux ont été déchirants, mais heureusement, juste après le branle-bas de combat pour notre départ a relégué la tristesse au second plan. Le fait que nous allions partir, n'était un secret pour personne, alors nous avons préparé des sacs. Des tonnes. Même certains avec du superflu, car aucun de nous n'est arrivé à accepter d'abandonner cet endroit qui a été notre chez nous. Un sentiment que nous n'avions plus depuis des années. Nos humeurs sont changeantes, nous étions prêts à changer de ville il y a peu, mais maintenant nous restons. Cyril sait que tout le monde pensait aller ailleurs et que donc si jamais Laura et Julien se faisaient attraper ce serait l'information que le Centre obtiendrait. Donc moins de risque qu'ils nous cherchent dans cette ville.

Cyril et Martin sont allés faire du repérage. Il leur a fallu toute une nuit pour trouver un nouvel endroit et nous avons déménagé la nuit suivante. Et parce que nous sommes poisseux, il a plu à torrent. Laurent y a vu plutôt une chance, puisqu'au moins nous n'avons pas croisé âme qui vive. Mais même s'il avait raison, j'étais trop grognon pour le reconnaître.

Notre nouveau lieu de squat est à nouveau une immense maison... avec une piscine intérieure ! Je n'arrive pas à croire que des gens aient laissé derrière eux de telles baraques. Mais il est vrai que la ville est plutôt déserte et tous les gens que nous avons pu voir ont l'air pauvres. L'air ne semble pas très sain ici avec les énormes cheminées des usines qui encerclent la ville. Les gens friqués doivent être partis ailleurs.

Le grenier est scindé en deux et n'a qu'un seul petit velux, situé dans le couloir. Les deux pièces sont des chambres, mais impossible de leur donner la même configuration que dans notre ancien chez nous. De plus, une seule sortie pour onze en cas de fuite, c'est trop peu.

Nous passons des jours à en faire notre nouveau foyer, à coup d'achat de peinture, de produits pour nettoyer la piscine et beaucoup, beaucoup de ménage. C'est en rangeant le bureau au rez-de-chaussée que nous avons découvert que cette habitation était une ancienne maison d'hôte. Mais nous nous en étions doutés, car les six chambres – deux par étage – ont leur propre salle d'eau. Celles au grenier sont plus petites, mais elles restent tout de même de superbes espaces décorés chacun de couleurs différentes avec des thèmes soit champêtres, soit maritimes, voire même volcaniques. Les premiers temps, il n'y a pas eu de tension, car nous n'avions pas fini de rendre la maison étanche à la lumière, donc nous nous sommes entassés comme à chaque fois dans une seule pièce. Mais quand il a fallu choisir comment nous nous répartirions, les choses n'ont pas été simples.

Pour ma part, j'étais partisane de trouver un moyen de cohabiter à onze dans la même chambre et de se séparer les salles de bain. Pour une fois que nous étions certains de ne pas faire la queue... Mais beaucoup voulaient retrouver de l'intimité. Nous avons voté et nous sommes chamaillés longtemps sans arriver à tomber d'accord. Martin et Benoit voulaient leur propre cocon. Ils n'ont aucun risque de nous faire le même genre de surprise que Julien et Laura, mais sous-entendre qu'il nous fallait faire des binômes a soulevé le problème de chambre mixte ou non...

Bref au final, il a été décidé que chacun ferait comme il voudrait avec pour seule règle de toujours amener son sac pour la fuite avec lui dans la chambre où il déciderait de dormir.

Cette situation m'a encore amené à me poser des questions sur mon intimité avec Laurent. Je n'ai aucun mal à être nue sous la douche quand il est là. Nous nous cantonnons à un jeu sensuel qui ne va pas plus loin. Mais l'idée de dormir seule avec lui m'effraie un peu, c'est idiot. Surtout que j'ai conscience qu'il ne me forcera jamais à rien. Il se trouve que partager un lit avec quelqu'un me donne la sensation de passer un cap, comme un vrai couple. Et j'ai trop de choses à gérer pour me voir dans une telle situation. Surtout avec tout ce qu'elle implique !

Au pied du murWhere stories live. Discover now