Chapitre 32

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La ville sur laquelle nous tombons fait peine à voir, comment les choses ont-elles pu autant changer en seulement quelques années ?

Elle borde la mer, mais nous ne distinguons presque pas l'eau, car de la fumée noirâtre vole paresseusement au-dessus des toits. Elle est crachée par de grosses cheminées sur les abords des habitations et encercle une ville au mur gris où peu de végétation est visible.

— Merde, je crois que c'est ma ville natale, déclare Martin. Montpellier.

— Elle était déjà comme ça avant ? s'étonne Benoit son acolyte.

— Non, du tout. Il y a des maisons en moins et toutes ces usines en plus.

— Tu penses qu'on pourrait essayer de trouver ta famille pour leur demander de l'aide ? le questionne Charlotte.

Martin hésite. Je ne sais pas si je suis la seule à remarquer le coup d'œil qu'il lance à Cyril, mais il finit par répondre qu'il ne connait plus personne ici.

Je suis intimement persuadée que c'est un mensonge.

Tu as raison, mais s'ils sont morts et que Martin s'écroule nous serons faibles.

Tu lui as dit quoi alors ?

Que si ses parents étaient toujours là, les approcher les mettrait en danger... Ce qui est vrai de toute façon.

— Tes manipulations peuvent te coûter la confiance des autres.

— Je sais, mais je vois clair dans leur esprit, certains sont au bord de la brèche.

Je n'ai aucun contre-argument à lui opposer, si nous nous désolidarisons, nous sommes finis. Et je préfère mourir que retourner là-bas, malgré mes bravades de la veille.

Il fait encore jour, mais Cyril et Martin sont partis en éclaireurs. Alors nous patientons tout en entraînant nos dons. Mon idée de pouvoir faire passer mon pouvoir par quelqu'un me trotte toujours dans la tête, mais je la trouve trop risquée. Je peux peut-être concevoir une façon de le détourner en précisant l'épaisseur d'air que je manipule autour des gens, plutôt que de vouloir faire passer mon pouvoir en eux. Comme une sorte de bouclier.

Laurent accepte d'être mon cobaye. Sous les chênes qui nous abritent, nous nous sommes mis à l'écart. Je vais pratiquer sur sa main, au cas où les choses dégénèreraient.

Je visualise le froid et l'imagine approcher sans toucher sa peau, sauf que je ne peux pas couper le courant entre moi et ce que je fais. C'est le premier obstacle que je rencontre. Mon don coule de mes pores en quelque sorte. Je finis par abandonner, sans même avoir vraiment essayé.

— N'aie pas peur de me faire mal, m'encourage Laurent.

— C'est pas ça, c'est que je ne sais même pas comment m'y prendre ! Je n'ai pas été capable de protéger mes habits à chaque fois que j'ai essayé de faire fondre des métaux. Il faudrait déjà que j'arrive à superpositionner les couches sur moi.

— Tu vas y parvenir. Ça t'éviterait de finir nue.

— À force, je crois que je m'y fais, dis-je avec une moue amusée.

Laurent me vole un baiser et plus encore, il se colle à moi et me dévore. Ça me rappelle la première fois que nous nous sommes embrassés dans ma chambre. Il me donne très chaud. Vraiment très chaud.

J'ai la sensation de me liquéfier que mes sens se décuplent. Ma respiration devient erratique alors que je me perds davantage dans notre échange de salive.

Mon épiderme brûle, tout autant que le bas de mon ventre. Je n'ai jamais été aussi excitée. Et cette excitation se transforme en frustration de ne pas avoir plus.

Au pied du murWhere stories live. Discover now