Chapitre 17

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— Vous avez déjeuné ? nous demande le docteur Elias.

— Oui, répondons-nous.

— Ce n'est pas possible ! J'ai beau leur dire la veille qu'ils doivent vous avertir pour la prise de sang, il n'y a rien à faire. Vous viendrez la faire demain matin avant votre passage au self.

— Oui.

Thomas et moi sommes séparés dans une pièce chacun. Par habitude, je me déshabille avant que le docteur ne me le demande.

Il ne fait pas très chaud dans cette salle d'auscultation, malgré mon don, je suis forcée de constater que je ne suis pas insensible au froid. Du moins, quand je ne m'en sers pas, ce qui ne saurait tarder.

Le médecin arrive. Il semble épuisé, des cernes énormes encadrent le marron de ses yeux et il est maigre à faire peur.

— Tu as quelque chose de particulier à me signaler ?

— Non, rien. Tout va bien.

Il pose son stéthoscope froid contre ma peau et écoute, puis il passe dans mon dos pour faire pareil.

— Qu'est-ce qui t'es arrivé ?! Bon Dieu !

Je ne comprends pas de quoi il parle et il n'apprécie pas mon silence.

— Là ! déclare-t-il en appuyant sur le bas de ma colonne vertébrale.

La douleur m'électrise un peu et la chute me revient en mémoire, alors je lui explique.

— C'est ce qui se passe à force de vous épuiser ! Tu as été dans une alvéole, hier, non ?

— Oui.

Elias râle un moment dans sa barbe tout en continuant à me détailler sous toutes les coutures, il me pèse, me mesure, palpe chaque centimètre de ma peau, avant d'enfin finir par déclarer :

— Tout semble en ordre. L'infirmière va venir pour te poser les électrodes. En attendant, allonge-toi.

J'obéis. Je ferme les yeux et essaie de gratter un peu de repos.

Un infirmier entre, je ne l'ai jamais eu, mais ce n'est pas comme si c'était important. C'est comme la femme médecin qui fait le même travail qu'Elias, je ne l'ai jamais eu. Je ne sais pas combien de membres compte le personnel médical. Mais j'imagine que comme pour les militaires, nous ne voyons qu'un échantillon.

L'infirmier est assez vieux, il doit approcher la cinquantaine et il semble tout autant épuisé que le médecin. Mécaniquement, il me pose les électrodes un peu partout. Puis il me retire ma boucle d'oreille. L'acte est douloureux et ma peau chauffe, elle devient toute rouge. Je déteste ce moment. Je ne sais pas au juste ce qu'ils font avec, j'imagine qu'ils doivent recharger l'appareil.

J'ai droit à une prise de sang, en plus de celle qu'il y aura à la fin et celle de demain matin. Je sors toujours de là avec les bras recouverts de bleus.

— Tu as eu des saignements depuis ta dernière visite ?

— Non.

Cette question me met systématiquement en colère, parce qu'ils ont décidé de nous supprimer les règles, sans notre consentement. Et je sais que les hormones sont diffusées par le mouchard. Je ne l'avais même pas compris avant ma première consultation ici. Certaines filles ont eu des problèmes et qu'ils ont dû ajuster le dosage de leur merde. J'imagine qu'un bon soldat ne doit pas avoir un désagrément tel que ses menstruations... Il est déjà loin le moment où le docteur Elias m'expliquait que j'aurais le choix. Ils doivent le proposer au moment où nous ne l'avons plus. Quand leur système nous a conditionnés en bon soldat.

Au pied du murDonde viven las historias. Descúbrelo ahora