Chapitre VI - Bec de toucan

33 4 3
                                    

Le premier repas que Lisa, Lolli, Kobbey et Inès partagèrent ne fut pas exceptionnel. L'elfe avait du mal à supporter la maladresse de la Serpentard, si bien qu'il finit par partir plus tôt lorsqu'elle renversa son verre d'eau sur son livre de métamorphoses. Lolli essayait de faire la conversation, mais Lisa était encore trop préoccupée au sujet de Léo, donc elle se montrait très distraite. À la fin du dîner, Inès repartit vers sa salle commune, l'air très mal à l'aise, tandis que les deux sœurs partaient de leur côté.

— Pourquoi tu étais aussi froide pendant le repas ? demanda Lolli sur un ton de reproche. Inès a dû penser qu'on ne l'aimait pas ! Et Kobbey n'a rien arrangé non plus, d'ailleurs. Il va m'entendre, celui-là...

— Désolée, j'étais un peu préoccupée, balbutia Lisa.

— Tu crois qu'elle ne l'est pas, Inès ? Tu sais Lisa, tu n'es pas la seule qui est stressée par la rentrée ! C'est dur pour tout le monde, alors tu pourrais faire un effort pour être plus agréable avec les autres !

Lisa s'arrêta au milieu du couloir qu'elles traversaient, vexée que sa sœur lui parle comme ça.

— J'étais préoccupée au sujet de Léo, répliqua-t-elle sèchement. Ses dessins me perturbent. Tu n'as qu'à les regarder, toi aussi, et on verra bien si tu arrives à te sortir ça de la tête après !

Elle fouilla dans son sac pour prendre les dessins de son frère et présenta ensuite celui de la salle bleue à sa sœur, la fusillant du regard au passage.

— Ça ne te fait pas penser à quelque chose, ça ? Tu ne trouves pas ça angoissant ?

Elle vit sa sœur blêmir légèrement en prenant le dessin. Elle le regarda quelques secondes, puis elle releva la tête vers sa sœur.

— Comment tu le sais ?

— Celui-là me fait le même effet, dit Lisa en lui donnant celui de la personne cernée par la foule.

Lolli regarda alternativement les deux dessins, commençant à comprendre ce qui perturbait sa sœur. Il était évident que Lisa était terrifiée par la foule et par l'idée d'être regardée par les autres. Quant à elle, la salle de classe lui faisait le même effet : elle se sentait enfermée, obligée à faire quelque chose qui ne lui plaisait pas. En plus, les nuages dans le ciel qu'on pouvait voir par les fenêtres avaient un aspect déprimant. Ils rappelaient à Lolli les journées d'hiver où il pleuvait des cordes quand elles étaient petites, ce qui les empêchait de sortir jouer dehors. C'était toujours un cauchemar pour elle, parce qu'elle s'ennuyait à mourir. Elle n'avait rien pour s'occuper, contrairement à sa sœur ou son frère...

— Écoute, Léo nous connaît très bien toutes les deux, dit-elle en secouant la tête comme pour chasser ses préoccupations. Il a sûrement dessiné ça pour nous faire comprendre qu'il savait ce qu'on ressentait. Surtout en ce moment, avec cette étrange... situation.

— Mais comment est-ce qu'il sait ? insista Lisa. Comment fait-il pour savoir exactement ce qu'on ressent ?

Lolli regarda sa sœur en fronçant les sourcils. Elle n'avait pas réalisé que Lisa avait peut-être déjà pensé aux mêmes choses qu'elle sur Léo.

— Toi aussi, tu as remarqué ? lui demanda-t-elle. Ses dessins... ils représentent souvent des choses auxquelles on pense, pas vrai ?

— Je trouve que ça arrive de plus en plus fréquemment, admit Lisa en hochant la tête. Et honnêtement, je ne suis plus sûre que ce soit une coïncidence. Si Léo n'était pas aussi différent de base, je ne me poserais pas autant de questions. Mais là...

Elle soupira en haussant les épaules, comme si elle ne savait pas comment exprimer sa pensée. Lolli regarda à nouveau les dessins avec un pincement au cœur. Lisa avait raison. Leur petit frère était spécial, même si elles ne savaient pas comment et pourquoi.

Tant que tu es avec moiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant