Chapitre 11

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Je ne trouve pas le sommeil. Les évènements de la journée retournent en boucle ne me laissant aucune pose. Je n'ai pas dormi depuis plusieurs jours, et le Jeu m'a épuisé. J'ai passé plusieurs heures à courir sous un soleil de plomb, sans boire ni manger. J'ai des cernes qui me mangent totalement le visage. Alors comment expliquer que je n'arrive pas à fermer l'œil ?!

Nolan, lui, n'a eu aucun problème sur ce point-là. Il est installé quelques mètres plus loin sur le matelas de secours. Je n'avais pas le cœur à le renvoyer chez lui hier soir. Nous avons passé plusieurs heures à rechercher n'importe quelle trace de Eve : sur internet, les réseaux sociaux, les archives de Paiworld... Partout. Nolan avait raison : rien. Nous avons décidé de nous coucher vers 23heures, puisqu'aucun de nous deux de tiendrait debout encore deux minutes.

Je tends ma main à l'extérieur du lit et me mets à chercher mon réveil. Je ne mets pas beaucoup de temps à le trouver, puisque, je le rappelle, je n'ai pas beaucoup de difficultés dans le noir. Je l'allume d'une main fébrile : 2 heure 34 du matin. Youpi...

Je me relaisse tomber sur le vieux matelas qui se plie sous mon poids, et mon regard se pose sur le plafond du studio. Comment ça se fait que ma vie ait basculé en quelques heures ? Je viens d'accomplir une partie de mon rêve, être qualifiée au Jeu. Mais il a fallu qu'on me fasse devenir un symbole de révolution. Une révolution... la bonne blague ! A quoi bon manifester ? Pourquoi ? Nous vivons dans une harmonie plus que parfaite. Chacun est libre d'entreprendre, et les inégalités ne sont pas énormes. L'extrême pauvreté n'existe pas. Certes, nous ne savons pas qui est PAI... et alors ? C'est celui qui se donne corps et âme dans le fonctionnement de la société. C'est surement un choix personnel, le fait qu'il ne veuille pas se montrer au public. Lorsque l'on est chef d'état, il y a toujours quelqu'un nous voulant du mal.

Et Eve, qui reste introuvable. Je ne comprends plus rien. On ne peut pas mourir ici, c'est même la devise : I d'immortalisé. Le I de PAI. Cet I inscrit presque partout dans Paiworld. Vu comment Nolan me l'a décrit, sa disparition ressemble on ne peut plus à une dématérialisation. Elle n'est plus dans le registre. Aux yeux du monde, il n'y a jamais eu de Eve Iralène. Mais moi, je me souviens d'elle. Je me souviens de son talent pour l'électronique. Je me souviens de sa gentillesse surhumaine. Je me souviens de son don pour la cuisine, de son sourire éclatant, de sa manie de se mordre sa lèvre inférieure lorsqu'elle gênée... Et toutes les photos autour de moi, qui sont pour le moment plongées dans l'obscurité, sont là pour témoigner.

Quelques minutes plus tard, je suis toujours éveillée. Je me lève en faisant le moins de bruit possible. C'est pourtant compliqué puisque le lit émet un grincement lorsque je pars. Ça n'a pas l'air de réveiller Nolan pour autant.

Sur la pointe des pieds je me dirige vers le frigo. Je n'avais pas la force de manger quoi que ce soit hier, et maintenant j'ai une faim énorme. Je me sers une compote aux pommes en petit pot. J'allume une petite lampe de chevet qui allume très faiblement la pièce.

Je ne sais pas pourquoi, je commence à penser à Sam. Que fait-il en ce moment, pendant que moi, je mange de la compote au beau milieu de la nuit ? Il a dû célébrer sa victoire avec ses amis et sa famille. C'est quelque chose qui d'après moi, mérite célébration. C'est ce que j'aurais fait aussi, si tous ces problèmes n'étaient arrivés comme des bombes. Peut-être qu'il fête ça avec sa petite amie... s'il en a une. Il n'en a pas. Enfin, je n'en sais rien pour de vrai... JHANE ! Ressaisie toi bon sang ! Ta meilleure amie a disparu, ton image est utilisée et c'est à ça que tu penses ?!

Je jette l'emballage vide dans la poubelle et me dirige vers ma tablette holographique. Je ne l'utilise pas trop en temps normal à vrai dire. Elle ne me sert pas plus que ça. Mais puisque je n'ai rien à faire de cette nuit... Je l'avais rangé dans un tiroir poussiéreux que je n'ai pas dû ouvrir depuis... très longtemps ! Et ça se voit. En effet, lorsque j'ouvre le tiroir délaissé, un nuage de poussière s'échappe. J'enlève rapidement la saleté sur la barre métallique, puis la déplie. Je retourne sous mes draps pour inspecter tout ça.

PaiworldWhere stories live. Discover now