Chapitre 4

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Vendredi 24 Juin, 8h30, Appartement de Lili

C'était le grand jour, le grand moment. Le jour des auditions. Dire que je n'était pas stressée aurait été un mensonge. Je savais que je n'étais pas la seule à passer, que je n'étais pas la seule à défendre un sujet de thèse, et que le jury serait seul juge de ceux qui seraient finalement financés. Une thèse non financée était une thèse morte, peu importe à quel point je m'entendais bien avec le professeur Auquebert. Tout reposait sur mes épaules, sur la qualité de ma présentations, sur ma capacité à répondre aux questions. 

Mais j'étais prête. Fatiguée, un peu chaude, légèrement tremblante, mais au diable ces foutus microbes. Si je devais vraiment m'écrouler, je tiendrai au moins jusqu'à la fin de ma présentation. C'était tout ce qui importait. 

Je m'étais levée tôt pour pouvoir me préparer. Mon passage n'avait lieu qu'à 10h, mais je ne comptais pas jouer avec le feu, et j'étais déjà prête à partir à 8h30. Evidemment, ce coup-ci, pas de maquillage... ni même de col en V. J'avais ressorti l'une de ces horribles chemises de costar bleu clair qui trainaient dans mes tiroirs. Ça faisait sérieux, et c'est tout ce qu'il me fallait. Je refusais tout de même à céder au pantalon de costar, choisissant à la place mon jean noir slim, qui faisait aussi sérieux tout en étant plus décontracté que la première option. 

Je n'avais pas très faim, ce matin là. Pas que j'avais beaucoup mangé les jours précédents non plus, mais à la maladie venait se rajouter l'anxiété qui me nouait l'estomac. Je savais cependant que je n'irai pas très loin l'estomac vide, et engloutissait un solide petit déjeuner sans en être particulièrement ragoutée. Puis, je saisi mon ordinateur portable, et le glissais dans mon sac à dos, ainsi que la clef USB contenant ma présentation. Je leur avait déjà envoyé le PDF, donc ces détails n'étaient normalement pas nécessaires, mais je voulais n'absolument prendre aucun risque. L'enjeu était trop important. L'audition, c'était aujourd'hui, pas le lendemain, pas une semaine plus tard. Tous les candidats passaient en l'espace de quelques heures, et je ne comptais pas être celle sur laquelle tombe l'unique problème technique. 

Me sentant prête à partir, je dû tout de même reprendre un peu ma respiration et calmer les battements de mon coeur du mieux que je le pouvais. Je me saisis également d'une épaisse veste au moment de sortir, que j'enfilais sans attendre malgré la chaleur, car j'avais tout de même froid. Je m'étais également affublée d'un masque, qui maintenant le bas de mon visage au chaud et camouflait mes légers claquements de dents. C'était l'heure. Enfin, non, c'était une heure et demi en avance, mais je devais aller à l'autre bout de la ville, et je voulais être sûre d'être en avance. Mon cœur pesait lourd dans ma poitrine alors que je descendait les escaliers, mais je tint bon. Je connaissais mon sujet sur le bout des doigts. Tout allait bien se passer. Et j'allais remporter ce financement. 

J'ouvris la porte sur la rue, dont l'effervescence était peu notable. A cette heure là, durant une fin juin, beaucoup de collégiens, lycéens et étudiants étaient déjà en vacances depuis longtemps. Le reste de la population était déjà au travail, et les quelques uns n'y étant pas encore se hâtaient comme ils le pouvaient. Il faisait déjà une température écrasante qui sembla me happer. L'air lourd n'était pas des plus faciles à respirer. Je soupirai. J'aurai sans doute préféré une météo plus clémente pour un jour comme celui-ci... mais ce n'était pas comme si j'y pouvais quoi que ce soit, et je me mis donc à longer la vieille maison me servant de logement en direction de l'arrêt de tram quelques rues plus loin. 

-Où croyez vous aller comme ça? 

Je me figeais instantanément en entendant cette voix, et en voyant la portière d'une voiture garée à quelques mètres devant moi s'ouvrir pour laisser apparaître la docteure Roman. Elle était cette fois vêtue d'une jean noir, comme si cette couleur était attribuée à ses jambes, et d'une tunique bleu océan où pendait une pair de lunette de soleil. La tenue semblait plus décontractée que la veille, et elle ne portait pas son éternel sac à dos. Son visage, lui, était tout aussi dur qu'à l'accoutumé, et laissé apparaître une sorte de moue de déception. Je n'arrivais pas à croire qu'elle soit encore là, devant chez moi... 

Allo docteure?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant