Chapitre 7

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Ben

Je cavale derrière les balles que m'envoie Romain sans parvenir à marquer. Quand il m'a proposé un tennis après le travail, je me suis dit que ce serait une bonne occasion de me défouler. Mais j'ai bien du mal à me concentrer sur le jeu, subissant lamentablement les attaques de mon pote. D'habitude plutôt dominant dans ce sport, Romain se rend rapidement compte que quelque chose ne tourne pas rond.

- Tu fais exprès de me laisser gagner aujourd'hui ? se renseigne-t-il.

Les mains sur les hanches, essoufflé comme jamais, je fais non de la tête.

- Allez, pause, décide-t-il.

On se rejoint sur le banc pour boire et Romain reste silencieux, ce qui lui ressemble assez peu. Je me sens obligé de répondre à sa question muette :

- C'est fini avec Lisa.

- Ah bon ? Qu'est-ce qui s'est passé ?

Je hausse les épaules, les yeux rivés au sol.

- Elle s'est mise à me prendre la tête un peu plus chaque jour, jusqu'à ce que j'en ai marre.

Je me sens merdeux de taire les raisons pour lesquelles Lisa était devenue soudain insupportable. Elle avait des craintes qui, bien que je les nie, étaient fondées finalement. Mais je me garde bien de creuser la question et de faire part de mes réflexions à mon meilleur ami.

D'une tape amicale sur ma cuisse, il met fin au match en m'assurant qu'on jouera la revanche quand je serai de nouveau d'attaque.

Le chemin du retour est l'occasion de faire le point avec moi-même. La vérité c'est que ce n'est pas tant ma rupture avec Lisa qui me déconcentre. Certes j'ai passé de bons moments avec elle, mais nous n'étions pas ensemble depuis longtemps, je n'y étais pas plus attaché que ça en définitive. C'est surtout le retour de Flavie dans ma vie, qui de manière très inattendue a chamboulé toutes mes certitudes.

Même si je la voyais moins souvent que son frère, nous passions de bons moments ensemble. Je me suis toujours senti à l'aise en sa présence. Mais nos quatre ans d'écart m'en paraissaient beaucoup plus à l'époque avec son air juvénile. Nous avons toujours le même écart d'âge mais nous sommes tous deux adultes aujourd'hui, et ça change tout. Sur notre connivence de l'époque s'est greffée une attirance physique qui a mis un sacré bordel dans ma tête et dans mon cœur.

Arrivé à mon immeuble, je tourne machinalement la tête du côté de la porte de ma voisine, chose que je ne faisais jamais quand Romain vivait dans cet appartement.

Une fois chez moi, je range mes affaires de tennis et me réfugie sous une douche presque brûlante, espérant que tous mes doutes s'évacuent avec l'eau mousseuse. Alors que je frictionne mes cheveux avec une serviette, je marque un temps d'arrêt en remarquant un message sur mon miroir :

« Merci pour la douche. Je t'invite à dîner où tu veux quand tu découvriras ce message. Bises »

Je souris bêtement au smiley dessiné au bas de mon miroir en imaginant le petit air espiègle que devait avoir Flavie en me laissant ce petit souvenir de son passage dans ma salle de bain.

Ni une ni deux, l'élan de mon cœur prend le relais sur mon cerveau désorienté et je cherche mon téléphone pour l'appeler.

Les trois tonalités me paraissent étrangement longues avant qu'elle ne décroche :

- Salut toi ! dit-elle joyeusement.

- Salut ! Dis voir, je viens de prendre une douche, et il paraît que j'ai droit à un dîner gratuit dans l'endroit de mon choix.

Son petit rire à l'autre bout de la ligne me fait sourire.

- Ah ça, c'était juste pour vérifier que tu prenais régulièrement des douches vois-tu. Le dîner n'était qu'un appât, s'amuse-t-elle.

- Bah voyons. Je vois bien que tu cherches à te défiler, mais j'ai faim. Cette invitation tombait à pic vois-tu, rétorqué-je en reprenant volontairement ses mots.

- Bon d'accord, se laisse-t-elle convaincre rapidement. Où veux-tu qu'on dîne alors ?

- Chez toi, annoncé-je naturellement sans l'avoir prémédité.

Le silence qui s'ensuit semble indiquer qu'elle est aussi surprise que moi par cette réponse.

Finalement, elle confirme et me donne rendez-vous une heure plus tard.

J'enfile rapidement un jean bleu brut et un pull fin de couleur noire avant de sortir acheter de quoi ne pas débarquer chez elle les mains vides.

À vingt heures précises, je suis devant sa porte. Je ne frappe pas immédiatement, tendant l'oreille pour tenter de capter je ne sais quoi. Une ambiance musicale parvient jusqu'à moi et je me décide finalement à me manifester. Le bruit léger de ses pas sur le parquet parvient jusqu'à moi, et c'est une Flavie rayonnante en jean slim et débardeur qui m'ouvre la porte. Je beugue sur ses cheveux lissés, laissés libres sur ses épaules, la rendant encore plus belle. Une fois à l'intérieur, je marque un temps d'arrêt pour observer l'appartement qui me paraît totalement différent. Elle a arrangé la décoration, rendant le lieu bien plus cosy et féminin. Certains meubles ont changé de place, donnant l'impression d'avoir agrandi l'espace. L'air surpris que j'affiche la fait sourire mais elle ne fait pas de réflexion. Je lui tends un petit sac contenant mon cadeau improvisé, ce qui semble la toucher.

- Il ne fallait pas t'embêter à rapporter quelque chose.

- Mais si, ça me fait plaisir. Tu m'offres à dîner, je n'allais quand même pas venir sans rien.

Elle me sourit et penche la tête vers l'intérieur du sac avant de froncer légèrement les sourcils. Elle plonge une main à l'intérieur et en retire le petit cadre dans lequel j'ai glissé la photo d'elle en train de repeindre la commode. Elle observe attentivement le cliché, comme si elle se découvrait pour la première fois.

- Merci, souffle-t-elle.

- Attends, il a une face cachée regarde.

Je lui montre la petite encoche permettant d'ouvrir le cadre comme un livre et elle éclate de rire en découvrant la grimace qu'elle avait faite devant mon objectif l'autre soir.

- Tiens et ça c'est pour oublier cette vision d'horreur, ironisé-je en lui tendant une bouteille de vin.

- Ahah, ahah, force-t-elle, me faisant éclater de rire.

Elle fait une place à mon cadre sur sa commode et laisse les deux photos visibles.

- Tu as pu faire réparer ton chauffe-eau ?

- Oui, un plombier est passé tout à l'heure, me confirme-t-elle.

Je lui propose mon aide pour installer l'apéritif qu'elle a préparé, puis nous nous asseyons dans le canapé face à la télévision qui diffuse des clips musicaux.

Je tends mon verre pour trinquer :

- À ton chauffe-eau, grâce auquel j'ai gagné un dîner à l'œil, plaisanté-je.

Elle me donne un coup de coude léger, manquant de me faire renverser son contenu par surprise, et nous rigolons comme deux idiots. 

À deux pas de chez toiOnde histórias criam vida. Descubra agora