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Tout s'était passé si vite, et pourtant, Jisung ne faisait que de se rejouer la scène, en boucle et en boucle, comme si elle avait duré des heures. Quand il tentait de réfléchir de manière rationnelle à ce qu'il venait de vivre, il se disait que ce n'était pas si dramatique, ce n'était pas comme s'il l'avait pénétré sans son accord, il avait juste touché son corps. Et quand il se disait que ce n'était "que ça" ses larmes redoublaient d'intensité, il avait touché l'une des parties les plus intimes de son anatomie. Il n'arrivait à faire que ça, pleurer misérablement entre deux poubelles, effrayé à l'idée qu'il vienne le trouver, qu'il vienne finir ce qu'il avait commencé.

Ses tremblement ne se calmaient pas, au même titre que ses larmes, alors que ça devait faire peut-être juste un peu moins d'une heure qu'il était là. Il aurait dû se faire confiance, rester sur sa première opinion de lui, il n'aurait jamais dû l'approcher, il remettait en question tous ses choix et il ne pouvait pas s'empêcher de se blâmer, pour être arrivé dans cette situation. Il se sentait si pitoyable, si sale, il voulait se cogner la tête contre le mur jusqu'à oublier. Il continuait à tenter de se convaincre que ce n'était pas cataclysmique, pas le drame qu'il s'imaginait maintenant, mais c'était plus fort que lui, de se sentir abusé, agressé, il avait donné son premier baiser à quelqu'un qui n'avait aucun respect pour lui, qui ignorait ses sentiments, à quelqu'un qui était prêt à le violer, à outrepasser ses limites, son consentement.

Il était quelqu'un de romantique, bercé par des romans à l'eau de rose qui le faisaient rêver, c'était comme s'il avait perdu l'occasion de vivre le meilleur moment de sa vie et il s'en voulait tellement. À tous jamais, c'était ce souvenir qu'il allait garder de son premier baiser, comme une plaie qu'il ne pourrait jamais refermer, un souvenir qui sera constamment dans un coin de sa tête. Il plaqua sa main contre sa bouche en se laissant céder à un nouveau torrent de larmes. Il aurait sûrement dû insister, lui dire qu'il n'avait pas envie avant de lui faire du mal, il se demandait s'il n'aurait pas pu éviter ça. Mais même en remuant le problème dans tous les sens, ses poings se serraient quand il repensait à Jonghwan.

Il avait passé la moitié de sa vie à souffrir des abus d'une mère absente et violente, qu'il n'avait jamais su contredire, contre qui il n'avait jamais osé se lever. Il avait encaissé, pendant des années et des années, jusqu'à l'épuisement. Et maintenant, il ne pouvait juste plus le supporter, il ne voulait plus qu'on lui fasse du mal. Il avait réagi comme par automatisme, effrayé à l'idée de connaître de nouveau la cruauté de son espèce. Tout s'était passé si vite, et au fond, il était soulagé d'avoir réussi à s'extirper de ses griffes, il ne pouvait pas s'empêcher de trembler furieusement à chaque fois qu'il l'imaginait lui retirer sa ceinture. Peut-être que tous les hommes étaient comme ça, peut-être qu'il était juste trop coincé pour les comprendre et peut-être qu'il était bien mieux seul, au final.

Quand il avait cru que c'était enfin fini, son calvaire, que plus personne n'allait chercher à lui faire du mal sciemment, il avait fallu qu'il s'ouvre à la mauvaise personne, qu'il donne sa confiance bêtement. Il se détestait tellement, il voulait rembobiner le temps, revenir des heures plus tôt et rester tranquillement dans sa couette, là où personne ne pourrait l'atteindre, là où il était protégé du monde entier. Après son réveil, il aurait attendu Minho avec la boule au ventre, il serait rentré dans la matinée, avec un nouveau bleu, et il aurait passé son dimanche à lire son roman du moment, en attendant de passer ses repas avec lui. Il souffla longuement après avoir réussi à adoucir ses pleurs, il regrettait tellement son lit à cet instant, il crevait de froid, en plus de ça.

Il ne savait pas quoi faire, il savait que le couvre-feu était levé à 6 heures, le ciel était encore noir, il avait sûrement encore pas mal de temps à tuer. Il voulait prendre une douche chaude et se glisser dans son drap à l'odeur d'assouplissant, puis peut-être pleurer encore un peu jusqu'à s'endormir, ou oublier. Pour rien au monde il ne retournerait là-bas, chercher ses amis, qui devaient sûrement s'imaginer qu'il était toujours avec Jonghwan. Juste penser à lui le rendait extrêmement anxieux, à cet instant. Alors finalement, il se releva, les jambes chancelantes, puis il continua sa route dans la nuit noire, il ne savait pas trop où il allait.

FEEL THE PAIN, SO GOOD; ᵐⁱⁿˢᵘⁿᵍOù les histoires vivent. Découvrez maintenant