Chapitre 11

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Je me séchais après avoir repris mes esprits, m'habillais et allai dans le salon où je trouvai les époux Clark assis tous deux face à la tv dans le grand sofa de couleur crème. Du haut de ce building nous surplombions tout l'East River et ses alentours nous avions une vue 360, rien ne nous échappait de l'aéroport aux quartiers des Queens. Mais mon regard s'arrêta sur un tout autre genre de paysage.

J'étais comme fasciné devant cette ile au milieu de l'East River d'une forme assez particulière qui, vu du haut semblait déjà imposante. Ces bâtiments gris me semblèrent bien austères. De loin on pourrait penser à des baraquements militaires. Cette ile dégageait quelque chose de dérangeant, presque d'irréel, elle semblait être une forteresse tout droit sortie des dessins de Vauban, une cite imprenable comme avait pu l'être Troie. Mais plus intriguant cette ile avait comme un pouvoir sur moi elle me semblait tellement familière, comme si un lien inextricable nous reliait.

- Rikers Island, on la surnomme la maison de l'horreur ou encore l'ile de la torture m'annonça Mr Clark qui s'était glissé dans mon dos sans que je ne m'en rende compte trop fasciné par le spectacle immobile mais tellement prenant qui se passait sous mes yeux.

Les gens qui en sortent sont les plus malchanceux, on ne sort pas de Rikers sans séquelles. Les anciens détenus nous racontent que lorsqu'on est à Rikers on ne vit plus, on survit. Chaque jour on veille à ne pas se prendre un coup de couteau à cause d'un mauvais regard ou simplement à cause d'une envie meurtrière, chez certains détenus se serait même un besoin. Tu te rends compte Nathanaël 3 mètres sur 3 mètres sous une chaleur accablante, non décidément ce n'est pas humain.

- Ça fait froid dans le dos.

J'ai cru comprendre que vous étiez avocat avez-vous déjà assisté à des procès qui se sont finis là ? demandais-je en désignant du menton l'ile sans toutefois détacher mes yeux de celle-ci.

- Malheureusement oui, il m'est même arrivé d'en envoyer quelques-uns, uniquement les plus dangereux et à chaque fois bien qu'ils aient commis des atrocités je réussis à ressentir de la pitié pour ces hommes qui y entrent mais qui n'en sortiront probablement pas. Et pourtant ce sont des monstres alors imagines toi la violence qui y règnent pour que ces mêmes monstres soient tellement dépassés par cette violence qu'ils se suicident. Il n'y a qu'une chose dont les démons ont peur : l'enfer. Rikers Island est l'enfer sur terre.

Je comprends pourquoi sa carrière d'avocat lui permet d'acheter un aussi bel appartement. Il est doué c'est indéniable. Il pourrait presque faire passer les pires monstres pour des enfants de cœurs et en plus de ça implorer notre pitié. C'est fort.

- Cessez-moi cette discussion si déprimante et venez donc vous assoir manger nous héla Elizabeth.

- Elle ne supporte pas la violence me murmura à l'oreille Mr Clark mais cependant assez fort pour que son épouse ne l'entende.

- Will !! Je suis peut-être vieille mais pas encore sénile alors maintenant tu vas t'assoir et tu vas manger ce qu'il y a dans ton assiette s'exclama sa femme.

Ah alors comme ça notre cher avocat avait un prénom !

- Oui, maman fit le concerné narquoisement.

- Nathanaël c'est le même programme pour toi.

- Oui, maman fis je aussi narquois que mon prédécesseur.

Etonnement les yeux de Mme Clark brillèrent et se mirent à scintiller, elle pleurait. Son époux se précipita vers elle pour la prendre dans ses bras. Je restai là à contempler la scène dans l'incompréhension la plus totale. La crise ne cessant pas je pris la décision de sortir afin de les laisser tranquille. Je suis quelqu'un de foncièrement altruiste, il faut le savoir. Je ne le sus pas sur le moment mais cette décision pourtant étrangère à ma façon d'être allait marquer à tout jamais le début de la fin, de ma fin. L'air était frais, une légère brise venait me fouetter le visage, je pris la direction de ce qu'était ma destination phare du moment (on notera l'ironie) le St Michael's Cemetery. Les soirs d'automne le soleil se couchait relativement tôt ce qui faisait qu'à 18h30, je marchais dans les rues noires et désertes des Queens. Seuls les lumières des lampadaires, pour ceux qui était en état de fonctionner, et le bruit des voitures passant sur la principale avenue venait crever l'angoisse et la léthargie de cette soirée. Les Queens, endroit formidable pour avoir à la fois la chance de faire la rencontre de chats comme de trafiquants en puissance ou encore de vieilles mamies. C'est ce qui faisait le charme de cet arrondissement. Mon petit chez moi. Je rigolais à la simple pensée d'imaginer mes chers camarades de classe dans la rue ou je me trouvais. Nous menions deux vies totalement différentes la leur, où la menace, bien présente derrière ce monde fait d'or et d'argent, venait de nos plus proches alliés et la mienne où la menace était omniprésente mais ne venait pas de ceux que l'on considérait comme ami.

CondamnéDonde viven las historias. Descúbrelo ahora