Chapitre 22

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C'est à ce moment que je compris que peu importe ce que son annulaire semblait vouloir m'indiquer. Cet homme avait déjà trop subi le lourd poids que la vie nous avait donnée, appelé peine.

- Vous avez fini on peut y aller ? fis-je pour l'inciter à se calmer sans pour autant prendre de pincettes, ici, pas d'empathie.

Il me fixa sans doute stupéfait de ma réponse qui me faisait vraiment passer pour quelqu'un d'insensible et d'irrespectueux. Etonnement il ne dit rien, probablement résolu à l'idée que je n'étais qu'un simple détenu comme un autre assez égoïste pour ne pas écouter et encore moins comprendre ses problèmes. Sans un mot nous repartîmes pour ainsi dire de plus belle. Je remarquais que plus nous marchions plus un bourdonnement incessant se faisait entendre, bourdonnement que je n'avais pas entendu depuis bien trop longtemps. Ce bruit reflétait en moi une certaine odeur de liberté. Le son émis par le monde extérieur me transperçait et me laissait désireux de recouvrer cette liberté. Nous franchisâmes un dernier sas de sécurité. Ça y est, à travers ces vitres faites de verre je pouvais de nouveau voir le monde auquel je n'appartenais plus, le monde libre. Ces voitures, ces gens, building, ces coffee shop. En baladant mes yeux le long de ses parois vitrées, je pus distinguer ce pour quoi tout être humain se devait de vivre. Un immense vide se creusa en moi. Seulement un jour enfermé entre quatre murs et déjà un sentiment de manque s'était creusé en moi. Une question me vint : comment pourrais-je supporter des mois et des mois enfermés ? D'ailleurs comment un être humain pouvait en être réduit à si peu, quatre murs, une toilette et des barreaux de fer en guise de rideaux avec pour nous tenir en laisse des menottes et comme réprimandes le trou, cette fois sans toilette ni rideau. Méritais-je ma place parmi tous ces autres animaux ? Un profond sentiment d'injustice s'empara de moi que je refoulai aussitôt. Il valait mieux ne pas y penser car y penser c'était déjà prouver une certaine faiblesse. Je ne devais pas douter de ma capacité à affronter le pire, d'autres y parvenait bien, non sans y laisser des plumes mas y parvenait. Je faisais partis de ceux-là réussissais-je à me convaincre, j'ai déjà affronté beaucoup, cela serait sans doute l'épreuve la plus dure mais comme toutes les autres je finirai par la surmonté peu importe à quel prix et par quels moyens, je le ferai. Le prix de la liberté est si cher à payer mais trop précieux pour ne pas se battre.

Ne me regardez pas comme cela, je suis comme vous... Le gardien me fit assoir face à la rue, à la vie et m'enchaîna à la chaise sur laquelle je me trouvais. Il m'annonça que cette situation durerait quelque temps puisque le convoi en direction du tribunal n'était prévu « que dans quelques heures ». J'aurai droit à un convoi, impressionnant non pour un jeune des bas quartiers comme moi ? Désormais habitué à contempler les murs de ma cellule, revoir du mouvement ne serait-ce que banal provoquait chez moi le plus grand intérêt. Peu à peu je m'intéressai à ce qu'il se passait à l'intérieur du bâtiment. Nous étions une petite dizaine dans ce hall d'accueil, enfin il serait plus juste de dire que j'étais seul détenu et que le reste était soit des gardiens soit des hôtesses d'accueil ou encore des policiers. Cependant, assis à l'opposé de moi sur ces chaises miteuses qui produisait un bruit horrible à chaque mouvement de son propriétaire, se trouvait une femme avec deux enfants, un garçon assez turbulent et une fille plus téméraire. Un chanceux allait connaitre un peu de répit en cette maison. C'était beau de voir une famille soudée qui ne s'arrêtait pas à ce genre d'obstacles. Moi je n'y aurai certainement pas droit, j'espère qu'il en profite.

Je me mis à penser à mon procès. Dans peu de temps mon sort serait scellé. On allait sans doute me mettre un avocat commis d'office dont la première affaire serait la mienne. Espérons que cela se passe comme dans les films et qu'il se batte bec et ongles pour ma liberté. Selon moi certains éléments pouvaient faire pencher la balance en ma faveur. D'accord j'avais tué un homme... cette pensée raisonna en moi d'une manière particulière, oui j'avais tué un homme. Plus précisément l'homme qui m'avait conçu. Cependant à cela s'ajoutait tellement de raisons. Sans doute considèreront-ils mon acte d'une extrême barbarie, me considèreront comme hautement dangereux. Mais comment ne pas juger cet acte comme tel sans connaitre l'absolue vérité. Aux yeux du tribunal et du monde je ne suis qu'un jeune paumé ayant perdu son frère trop tôt et qui a eu un coup de sang. La vérité est tellement plus compliquée mais la simplicité l'emportait toujours. Dans le monde actuel il était bien plus simple d'avaler un discours tout fait plutôt que d'aller chercher plus loin et même de pourquoi pas réfuter celle-ci. Mais non l'effort intellectuel semblait être trop important pour se résoudre à réfléchir convenablement sans suivre le chemin de la facilité.

CondamnéTempat cerita menjadi hidup. Temukan sekarang