Chapitre 3: BILLY

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Je coupe le contact, détache ma ceinture avant de descendre de la voiture, téléphone et sac à main en main. Les éclairages des lampadaires illuminent l'allée qui mène à la maison de ma tante, Ely. Le ciel est sombre, saupoudré de petits points blancs éparpillés. La lune, toujours aussi visible que depuis le bar où j'ai abandonné Cassie. La nuit est silencieuse, et serait sans aucun doute reposante si je ne savais pas que je me ferais passer un savon suite à mon retard plus qu'évident.

Un détail me fait froncer les sourcils – ce qui commence à devenir une habitude. Le parking habituellement composé de deux véhicules l'est aujourd'hui de quatre si l'on compte ma voiture, ce qui veut dire que je ne suis pas la seule invitée. Le quatre-quatre noir est garé de travers, comme si le propriétaire n'était présent que pour quelques minutes avant de repartir, sans un au-revoir. Bizarre. Ils me préviennent d'habitude. Je hausse les épaules. Cela n'a pas d'importance.

Je marche jusqu'à la porte d'entrée moderne, avant de toquer de mon poing trois coups. Je peux entendre de l'agitation de l'autre côté. Qu'est-ce qu'il se passe ? Le bruit de verre qui suit me fait réagir, j'appuie sur la poignée lorsque la porte se referme devant moi dans un claquement sonore. Je commence à paniquer. Le seul reflex qui me vient c'est de tambouriner comme une folle sur la porte. Des cris me parviennent alors que la vitre en demi-cercle sur le haut de la porte explose, les morceaux de verres s'éparpillent sur le perron en pierre dont un rebondis sur mon bras m'écorchant légèrement.

— Tu n'as rien à faire ici ! Retourne vendre tes merdes et disparais !

Les larmes roulent sur mes joues alors que j'imagine le pire.

Les cris de ma mère se font plus fort, au même rythme que les gémissements de douleur.

— Papa ?! Ouvre-moi ! Qu'est-ce qui se passe ?

Sans que je m'y attende, la porte s'ouvre d'un coup me propulsant sur le coté.
Mes genoux me brûlent mais, ce n'est pas le plus important. Un homme que je reconnaîtrais entre mille, est éjecté, dévalant les nombreux escaliers faits de pierre, pendant qu'une voix ne fait que crier. John sort de la maison au même instant.

— Si je te revois ici, j'appelle les flics !

Le quarantenaire se relève difficilement, la lèvre et l'arcade en sang avant de répliquer aussi fort qu'il le peut :

— Tu peux appeler les flics, j'en ai rien à branler. Mes hommes te tomberont dessus sans que j'ai à lever le petit doigt et tu le sais ! Je sortirais de ta taule en moins de trois jours papy, pendant que toi tu pourriras, bouffé par une tumeur !

Il s'en va en courant avant que John n'ait eu le temps de répondre.

Toujours à quatre pattes, j'essaie de me persuader que ce n'est pas celui que je crois. Qu'il n'est pas revenu ici pour nous menacer. Mais les joues me piquent, me contredisant par la même occasion. C'était bien lui.
Des mains me soulèvent, pendant que je suis toujours en état de choc.

Il a tellement changé en huit ans. La dernière fois que je l'ai vu, ils sortaient de cette même maison. Il a gardé contact avec John, ou plutôt il a gardé le contact de John. Chaque fois que le téléphone sonne, il faut s'attendre à ce que ce soit lui qui appelle. Jamais avec le même numéro. Parfois c'est lui, d'autre fois, sa femme. Mais il ne laisse jamais tomber. Ils ne nous lâchent jamais, pas un instant.

Alors qu'il a pourtant eu ce qu'il voulait.

Huit ans auparavant. Trois mois avant les dix-sept ans de Loona. Maison d'Ely Jones.

Les yeux encore collants par le mascara de la vieille, j'essayais d'ouvrir les paupières qui filtraient les rayons de lumière. Des cris de bébé résonnaient dans la chambre d'à coté alors que je balançais mes jambes en dehors du lit. Je me frottais les yeux, essayant de décoller les cils qui n'en faisaient qu'à leur tête et une fois que ma vue fut claire, je me levais, traversant la chambre jusqu'à ma porte avant d'emprunter le couloir qui menait à la chambre de Taylor. Une fois la porte ouverte, mes rétines furent assaillies de rose. Lit rose, mur rose avec des roses rouges, table à langer rose pal, et j'en passe.

CARNET SECRET: Le mystère de LoonaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant