75

780 49 4
                                    

Kyra se tient devant la porte, une petite valise à la main ainsi qu'une bouteille de vin dont la présence m'étonne grandement, surtout après tous ces événements. 

A - Entre, lui sourié-je en prenant ses affaires de ses mains.

La bouteille mise au frais, je vais fermer la porte pendant que Kyra laisse sa valise près de mon lit.

C - Je vais faire à manger. Tout le monde mange des champignons ?

A / K - Oui.

Charlie hoche la tête avant de disparaître en cuisine.

K - Comment tu te sens ? demande doucement notre professeur.

A - Je crois que ça va. Évidemment je suis inquiète pour nous, pour toi, mais je crois que je commence à m'habituer. Même si je ne suis pas sûre que ce soit une bonne chose... ajouté-je en passant la main dans mes cheveux.

K - Ouais. Allons mettre la table et arrêtons d'y penser pour l'instant.

Hmm... autrement dit, "passons une soirée sans avoir à s'inquiéter, j'ai besoin de souffler". Je hoche la tête et nous nous exécutons. La table mise, nous laissons Charlie aux fourneaux, nous callant dans le canapé en allumant la télé sur notre série, mon corps allongé de tout son long sur celui de Kyra qui passe tranquillement la main dans mes cheveux.

K - La bombe ne va pas exploser, déclare Kyra en voyant la main de Meredith dans le corps du patient en salle de chirurgie.

A - Je pense que si, mais pas pendant qu'elle a la main dedans.

K - Hmm... Peut-être.

La sonnerie retentie dans l'appartement. Je me redresse, surprise. 

A - On n'attend personne, si ?

K - C'est peut-être Gilles, je l'ai appelé tout à l'heure et je pense qu'il doit vouloir s'assurer que tu vas bien. 

A - Ok.

K - Je vais ouvrir, reste allongée, dit Kyra en embrassant mon front avant de se lever. 

J'entends la porte s'ouvrir, mais aucun son. Perturbée, je me lève immédiatement pour voir Kyra, le corps figé. Le bruit d'une goutte qui s'écrase au sol me pousse à regarder parterre. Relevant les yeux, mon cœur rate plusieurs battements. Homme, capuche, brun. Devant Kyra. Des gouttes tombent les unes après les autres au sol. Rouges. Brunâtre. Bordeaux. Elles forment une flaque qui de seconde en seconde, s'agrandit. 

Le bruit de la lame déchirant la chair me donne la nausée. Sans un mot, l'homme s'en va en courant, couteau à la main.

Le corps de Kyra me tombe dessus. Vaguement, je vois Charlie courir après l'agresseur.

K - Hhh...

L'expiration douloureuse de Kyra me pousse à agir. Rapidement, tremblante, je l'emmène à l'intérieur et la pose sur le canapé avant d'attraper mon portable et d'appeler les secours. Mon corps se coupe de tout sentiment, trop choqué. La raison prend le dessus, c'est avec un calme étonnant que j'explique la situation au secouriste.

L'appel terminé, je lâche le portable comme s'il n'avait jamais été dans ma main. Je regarde Kyra, ses yeux bleus sont vitreux, sa respiration saccadée et difficile, son front transpirant. Retirant rapidement mon haut, je le presse sur la plaie pour essayer d'arrêter le saignement. 

A - Reste avec moi, parle moi. Kyra parle !

K - Ça fait mal... Ich.

A - Je m'en doute. Eumh... Raconte moi ta journée, murmuré-je.

K - Je suis fatiguée, Arwen, souffle-t-elle en fermant les yeux.

A - Nan, tu ne dors pas ! Je te jure je te mets la claque de ta vie si tu t'endors ! paniqué-je en la secouant légèrement.

K - Très drôle. 

Les minutes suivantes, Kyra me parle de sa journée qui est assez similaire aux autres, finalement. Et, enfin, les secours entrent dans l'appartement en compagnie de Charlie qui a le nez en sang, et de Gilles. Très rapidement, Kyra est prise en charge et emmenée à l'hôpital dans une civière après le constat de sa blessure.

Sec- Même si la blessure est grande, elle va s'en sortir. L'agresseur n'a pas touché un point vital, et son pronostique n'est pas engagé, nous explique un secouriste tout en soignant Charlie. 

Lorsqu'il ne reste que nous trois, je m'affale sur le canapé, encore sous le choc de e qu'il vient d'arriver. Un inconnu à capuche qui nous suit depuis des jours vient de toquer à la porte pour poignarder Kyra qui est maintenant à l'hôpital. 

Gilles s'agenouille devant moi.

G - Ecoute, chérie. Tu va te lever de ce canapé, tu vas aller prendre une douche parce que tu es pleine de sang, et on va aller à l'hôpital voir ce qu'il en est, dit-il calmement. 

En mode pilotage automatique, je fais exactement ce qu'il me dit. En m'habillant, je ne peux m'empêcher de prendre le sweat beige de Kyra, celui qui a encore son odeur. Je ne prends pas le temps de mettre un manteau et enfile une écharpe blanche et des baskets avant de suivre mon père et mon frère dans la voiture. C'est dans un silence de mort que le trajet se déroule. Gilles pose de temps à autre la main sur mon genoux, se voulant rassurant. 

G - Rappelle toi ce qu'il a dit. Elle va s'en sortir. 

Je hoche la tête, le regard perdu dans le vide. Son regard était si fatiguée, lorsqu'elle était dans mes bras... 

Nous arrivons à l'hôpital devant lequel Gilles se gare sans trop de problème. A l'accueil, Papa demande le numéro de chambre de Kyra, mais on nous annonce qu'elle est en salle d'opération. Alors c'est patiemment que nous nous asseyons en salle d'attente. Tous les souvenirs de mon propre séjour ici me revient en tête. Mon désespoir, mon envie de disparaitre, ma rancune. Un soupire s'échappe de mes lèvres. 

??? - Bonsoir, je suis le médecin de Mme. Leroy, Andréa Parker, nous interpelle une voix deux heures plus tard. 

Je lève la tête pour voir une femme, certainement chirurgienne, cheveux brun en chignon serrés, pas très grande, aux mains très fines. 

A - Comment elle va ? demandé-je précipitamment. 

Doc- Elle va bien, elle est hors de danger. Pour l'instant elle est dans sa chambre. 

A - Est-ce qu'on peut la voir ?

Doc - Puis-je savoir qui vous êtes ? Pour l'instant, seuls les membres de la famille on le droit de la voir à cette heure-ci. 

A - Je suis sa petite amie, et voici mon père et mon frère. 

La voyant relever un sourcil douteux, j'ajoute en haussant les épaules :

A - Je suis adoptée. 

Elle hoche la tête puis ouvre la marche vers la chambre de Kyra. J'y découvre ma jolie professeur, allongée et branchée à toute sorte de choses que je connais maintenant trop bien. Elle est paisiblement endormie. 

C - On va te laisser avec elle, Wen, murmure Charlie, tirant mon père par le bras.

Je ferme la porte, me sentant soudainement envahie par toutes les émotions que je m'interdisais jusque là. La peine, la douleur de la voir souffrir, la peur terrifiante de la perdre, la fatigue de cette poursuite avec cet homme à capuche. Je me laisse couler contre le mur, les larmes ravageant mon visage de même que les sanglots me font suffoquer. Lorsqu'enfin j'arrive à me calmer, je me redresse et essuie toute trace de pleur pour m'allonger sous la couette avec Kyra après avoir enlevé ma veste, faisant bien attention à sa blessures et aux fils auxquels elle est reliée. A peine ma tête se pose sur l'oreiller que mes paupières se ferment, mon esprit emporté je ne sais où, éteint et loin d'ici. 

Au-delà Des LimitesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant