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Lire en écoutant la musique en média si possible...

Victoire,

Je viens de traverser trois étages, trois étages, à passer devant chaque cellules de chaque détenus de cette prison. Trois étages, à prendre sur moi même, à garder la tête haute, à me faire siffler, cracher aux pieds, me faire insulter de "salope" , "petite pute", et avoir eu le droit à d'étrange invitation...

Quand le gardien s'arrête enfin devant la cellule n°276, celui-ci sort un énorme trousseau de clés et tape aux barreaux d'un coup sec faisant trembler l'ensemble de l'allée.

-" T'as de la visite Harrys !" grogne le pénitencier en me reluquant des pieds à la tête et ne manquant pas de s'arrêter sur ma poitrine.

D'un geste sec, je croise les bras sur celle-ci, et d'un sourire narquois il rajoute à voix basse :

-" De la sacrée bonne visite..."

Il ouvre la grille, et d'un signe de tête, me fait comprendre que je peux entrer. Je passe devant lui en pressant le pas. Une fois dans la cellule, il referme la grille aussi fort qu'il l'a ouverte, re-provoquant ce tremblement qui fait trembler les murs, puis s'éloigne.

-" Ne t'inquiète pas, on pourrait croire que tout va s'effondrer, mais ce merdier et bien solide, j'ai déjà tenté...."

Je braque mon regard dans l'obscurité de cette pièce et arrive enfin à discerner son corps, allongé sur ce qui lui sert de lit, un bras sur la tête cachant son visage. Je l'observe.

-"Arrête de me regarder."

Prise en flagrant délit, je me sens rougir... Heureusement que la pénombre de la pièce ne permet pas de le voir. Je m'avance doucement, détaillant chaque partie de cette cellule horrible. Je décide de rebondir sur la phrase qu'il m'a dite juste avant.

-" Bonjour Noam... Alors, tu as déjà tenté quoi ?"

-" Rien, laisse tomber."

Il ne bouge pas d'un iota, il reste allongé sur son lit, impassible. Il se fiche totalement de ma présence ici, et bon sang je ne peux pas lui en vouloir. J'ai pas mal réfléchi depuis hier, et une bonne partie de la nuit également, en me demandant si c'était une bonne chose, que je tombe sur lui, ou plutôt que lui tombe sur moi, celle qui lui a gâché la vie. Ma foi, en y réfléchissant bien, et en se remémorant les choses, si je n'avais pas été là bas ce jour là, Noam ne serait pas ici aujourd'hui... Tout est de ma faute.

En me levant ce matin, et après mûre réflexion qui m'a fait cogiter toute la nuit, j'étais décidée à aller voir De Balzac et à tout laisser tomber. Et puis, en arrivant devant les portes du pénitencier, je n'ai simplement pas pu. Abandonner aurait mis en péril mes cinq longues années d'étude. Je n'aurais pas validé mon cursus et j'aurais dû me justifier, ce qui en soit me parait impossible. Je ne peux pas dire la vérité, pas maintenant, pas avant d'en avoir parlé à Noam et Anna, qui sont également impliqués. J'aurais donc été déclarée comme «démissionnaire», ce qui me ramenait à la case départ, ce qui n'est pas mon souhait étant donné que j'arrive bientôt à la fin.

Et puis plus que tout au monde, je ne peux pas abandonner Noam. Tout simplement pas. Si je pars, qui me remplacera ? Est-ce que la personne sera motivée, et arrivera t-elle à l'innocenter ? Je ne doute pas de la compétence de mes confrères stagiaires, non, mais après tout, qui, à part Noam, aurait autant envie de faire rétablir la vérité et de faire enfermer le vrai coupable ? Qui ? A part moi ?

Je suis la personne la mieux placée pour le sortir de cette merde, j'ai la hargne, je veux que le vrai salopard paie pour ce qu'il a fait, à moi, et indirectement à Noam. Je veux lui pourrir la vie, QU'ON lui pourrisse la vie, autant qu'il a pourri la nôtre, et plus que tout, je me dois de sauver Noam de tout ce merdier. Il mérite de vivre sa vie en dehors de ses barreaux. Et je ferais tout ce qui est en mon pouvoir pour y parvenir.

Temptation Où les histoires vivent. Découvrez maintenant