8 # Le jour où je me suis fait « une Gourcuff »

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Je ne fais pas de sport, mais je suis un sportif. Tous les jours, j'effectue des mouvements qui sont parfois difficiles à cause de mon manque de puissance musculaire. Faire des transferts de mon fauteuil au lit, me lever devant le lavabo pour avoir le visage en face du miroir et retirer cette vilaine crotte de nez collée dans ma barbe, porter des choses... les gestes du quotidien sont possibles mais durs. Le fait de forcer provoque parfois des douleurs, ou même des blessures bénignes. Par exemple, il m'arrive fréquemment de m'écorcher les mains lorsque j'utilise mon fauteuil manuel. Mais bon, ce n'est rien. 

Cependant, le jour où l'on se rate sur un mouvement anodin, on peut le payer cash. C'est ce qui m'est arrivé la semaine dernière. J'allais me coucher, et au moment de me lever de mon fauteuil et de prendre appui sur mon bureau, mes deux mains glissent et je pars en avant. Je m'effondre sur mon meuble mais, surpris par la glissade et ne m'appelant pas Candeloro, je poursuis ma chute et atterris finalement sur le sol de ma chambre, la cheville coincée dans les barres du siège de mon véhicule.

La douleur est très forte et très vive, à tel point que je gueule comme un putois. Pour celles et ceux qui se demandent si j'ai des sensations au niveau des jambes, vous avez votre réponse ! J'aurais préféré qu'on me masse les pieds comme le fait si bien Georges Tron, mais que voulez-vous... En tout cas, je souffre terriblement, tant que je n'arrive pas à me relever. Je reste prostré sur ma moquette pendant de longues minutes, et je songe même à tirer la couette pour dormir ainsi, enroulé dedans comme une saucisse dans un hot dog.

Sur le coup, et même après le temps passé en PLS, la douleur est réelle mais diffuse : j'ai mal au dos, aux côtes, à la tête, aux jambes, bref à tous les endroits où j'ai eu un contact avec mon bureau ou avec le sol. Je finis quand même, en m'inspirant de Leonardo diCaprio dans « The Revenant » (Oscar ! Oscar !), par me hisser sur mon lit et jusque sous mes draps, et je m'endors assez rapidement malgré tout.

Je me réveille plusieurs fois dans la nuit. Totalement dans le coltard, je ne percute pas tout de suite la raison de ces réveils, étant donné que ça m'arrive fréquemment à cause de ma nature insomniaque. Mais au bout d'un moment, vers midi, je localise la cause : j'ai la cheville éclatée. Suite aux séquelles d'une opération que j'ai eu il y a longtemps, je ne peux pas actionner ma cheville moi-même. Si vous voulez, ce qui illustre le mieux cela est l'expression « une main morte ». Mais quand je bouge ma jambe sous ma couette, le poids de celle-ci (tout est lourd pour l'être aussi faible que je suis, aussi lourd que l'humour de  Nicolas Canteloup) fait que ma cheville prend des positions qui me font extrêmement mal. À tel point que je ne parviens pas à sortir de mon lit.

Pendant un moment, je préfère simplement attendre. Puis, après une heure à moitié dans les vapes tellement je douille, je me dis qu'il faudrait quand même que j'aille aux urgences. Mais comment faire ? Si j'appelle les pompiers ou le SAMU, ils vont se retrouver devant l'entrée de mon bâtiment sans pouvoir rien faire d'autre que sonner. En admettant que n'importe quel habitant des autres logements leur ouvre, ils seraient confrontés ensuite au problème de ma porte fermée à clé. Je ne suis pas à l'article de la mort, et je n'ai pas spécialement envie que l'on défonce l'entrée de mon appartement à coup de bélier. Je réfléchis donc à qui je pourrais appeler pour venir chez moi.

Je fais vite le tri selon les critères suivants : les personnes qui ont le double de mes clés. Parmi elles, mon meilleur ami qui vit à Londres, mes parents actuellement en vacances en Bretagne, et mon frère, finissant habituellement son boulot aux alentours de 16h. Je n'ai guère le choix : il va falloir que j'attende le bro.

Je lui téléphone. Mais bien sûr, il travaille alors je laisse un message vocal ainsi qu'un texto, au cas où il n'écoute pas son répondeur. Je patiente, ma cheville pulsant comme un cœur qui bat, irradiant de la souffrance en veux-tu en voilà. Bordel, ma maladie est censée touchée mes nerfs, elle pourrait quand même avoir le bon effet de m'épargner ça !

Confessions InfirmesWhere stories live. Discover now