15 # Pot-pourri d'infirmes anecdotes

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Bonjour à tous !

Jusqu'ici, je vous ai raconté des anecdotes sur mon quotidien en tant qu'handicapé, mais il y en a beaucoup qui ne peuvent pas être étendues au format d'une nouvelle. Cependant, elles restent intéressantes, parfois dans le sens humoristique du terme, parfois non. C'est l'heure de partager avec vous tout ça un peu pêle-mêle !

Une question très saugrenue m'a été posée une fois par une fille au détour d'une conversation sur le sexe : « comment tu peux avoir une érection si tu as une maladie musculaire ? ». Apparemment, elle ne savait pas trop comment ça marche... non ma chère, le corps caverneux n'est pas un muscle, vois plutôt ça comme une éponge !

À l'époque où je marchais à l'aide d'une canne, j'ai oublié celle-ci chez moi avant d'aller à une soirée. Je boitais sévèrement, et en ce temps-là, je souffrais d'un strabisme convergent (« tu t'adresses à moi ou à l'autre ? »). Le cumul des deux a fait qu'en arrivant, la plupart des gens qui ne me connaissaient pas (ouais je me suis tapé l'incruste dans la teuf de l'ami d'un ami d'un ami (amiception (parenthèseception (tropdinception)))) ont cru qu'à 21 heures, j'étais déjà complètement décalqué. Ça peut paraître drôle, mais les regards auxquels j'ai eu droit étaient limite pires que ceux auxquels je suis habitué. Et toi, tu choisis quoi entre être alcoolique et être handicapé ?

À mon anniversaire, au moment où ma mère m'a demandé de souffler mes bougies et de faire un vœu, une petite voix rigolarde a susurré « des jambes ». Fou rire général. J'aime ma famille !

Un jour, chez un pote, nous débattions chez lui de l'attractivité de sa sœur. Plus pour le trashtalk que pour autre chose, je lui martelais que j'allais la serrer. Puis un autre ami nous a rejoint, et au moment où j'ai remis le couvert, il m'a stoppé net dans mon élan : « il y a une seule chose qui t'empêchera toujours d'y arriver : l'escalier ». Explosion de rires. Je crois que jamais dans toute ma vie on ne m'a aussi bien vanné !

Bien évidemment, il m'est déjà arrivé d'utiliser mon handicap pour apitoyer. Notamment à l'université, quand je voulais obtenir un passe-droit et que je demandais à la secrétaire de m'aider. Monique était vraiment adorable, on s'entendait vraiment très bien, mais elle était un peu trop crédule (heureusement pour moi). Lorsqu'elle voyait ma tête le vendredi matin, les traits tirés et les yeux cernés après une nuit sur le PC, je lui expliquais à quel point mon quotidien était difficile, mais qu'il fallait bien vivre avec. Et je concluais souvent sur une phrase un peu sentencieuse, un poil défaitiste, du style « tu sais, on ne naît pas tous avec les mêmes cartes... », une phrase soufflée innocemment tout en sortant du bureau, sans regard en arrière et la tête basse. Effet garanti !

Parfois, quand je me baladais avec ma mère, il m'arrivait de perdre l'équilibre et de me viander. Ma mater a quelques fois un humour bien primaire : que je sois son fils ou pas, une chute, ça la fera toujours marrer, même devant des gens effarés par la situation, eux-mêmes remplis d'inquiétude réflexe. À en pleurer !

Dans le même ordre d'idées, il y a trois ans, je suis parti en vacances à Rhodes avec trois amis. Le sable de la plage était brûlant, même si moi j'avais les petons sur les cale-pieds et que je n'en souffrais pas. Jusqu'à ce qu'un de mes amis ne stabilise pas très bien mon fauteuil manuel sur la plage, à tel point que je suis parti à la renverse pendant qu'il est allé chercher une serviette. Les vacanciers aux alentours se sont jetés sur moi pour m'aider, à grand renfort de « are you fine ?? ». Ce petit incident a été un outil de culpabilisation monstrueux sur mon pote qui s'en ait voulu pendant longtemps (oui je suis machiavélique)...

Quand j'étais au lycée, j'avais le droit de ne pas faire la queue au self service. Je pouvais passer devant avec un accompagnateur pour m'aider. Mais parfois, nous étions plus que deux. Comment justifier ça ? C'est simple : une personne pour porter mon sac, une pour mon plateau, et une pour m'aider à marcher. C.Q.F.D. En même temps, je passais en VIP : Very Invalide Person.

Avant d'avoir mon fauteuil électrique, il m'arrivait de me balader avec un(e) ami(e) au parc municipal. Je me faisais pousser dans mon fauteuil manuel, et quand nous passions devant des gens, il m'arrivait quelquefois de pousser un petit cri digne des reportages sur les troubles obsessionnels compulsifs. Évidemment, les personnes qui nous croisaient fixaient leurs yeux sur nous, au grand dam de mon ami(e) qui ne savait plus où se mettre.

Durant ma terminale, j'avais beaucoup de trous dans mon emploi du temps, si bien qu'avec ma copine nous allions parfois manger en ville. Mais avec ma lenteur, le piège du retard se refermait souvent très vite. J'ai eu de la chance un jour (et certainement beaucoup de culot) : quand nous sommes passés devant une voiture de flics à l'arrêt, j'ai toqué au carreau et leur ai demandé s'ils pouvaient nous déposer au lycée, en décrivant avec moultes exagérations la situation. Taxi Schmidt, c'est parti !

Pendant mes années de collégien, je pouvais participer aux activités d'EPS sans bien sûr pour autant être noté. C'était tout de même très agréable car cela m'a permis non seulement d'être intégré comme n'importe quel élève, mais aussi, mine de rien, de faire du sport à mon propre degré !

La naissance de l'autodérision chez moi a eu lieu un peu avant d'avoir mon brevet des collèges. J'étais avec mon meilleur ami de l'époque (avec qui on jouait à Diablo II en LAN et dont le père était pour moi une idole car il jouait à Command and Conquers (ce fut la naissance de mon côté geek également)), et un après-midi, alors que nous cherchions des pseudonymes pour jouer sur Internet, un sobriquet s'est imposé quand la chanson « capitaine abandonné » est passée à la radio. Ohé, ohé, capitaine handicapéééééé !

Pour rester dans le thème des surnoms, des copines de terminale en ont trouvé un génial pour mes attelles, pendant une soirée où nous étions complètement défoncés : lorsque l'une d'elles a commencé à jouer avec mes chaussures, elle a mimé une fusée dans l'espace tout en criant « faites place aux rollers du futur ! ». C'est resté très longtemps. Folle jeunesse...

Je reviens sur mon voyage à Rhodes le temps de vous parler d'un vacancier français qui s'est illustré par une colossale punchline à mon égard : « alors l'ami, ça roule ? ». Bah oui ducon, un mec en fauteuil ne risque pas de marcher... Il y en a des fois, je vous jure...

Je ne sais pas s'il y a des joueurs de poker parmi vous, mais cette dernière anecdote va sûrement plus vous parler. Je suis en séjour à Londres chez un ami, et j'en profite pour aller au casino Empire. Après un parcours labyrinthique dans les sous-sols pour atteindre la room, me voilà installé à une table de Texas Hold'em. Je ne fais pas le malin, car c'est la première fois que je joue en live. J'ai les mains qui tremblent, et déjà qu'à la base j'ai du mal à attraper les choses, vous imaginez la galère pour choper les jetons. Tout ça a consolidé une image de brave gentil handicapé qui vient se faire un petit kif et qui va lâcher quelques livres. Étrangement, il y avait quatre Français à la table. J'ai senti des soupçons de trash talk, et quelques heures plus tard, je suis sorti en ayant quadruplé mon pécule.

J'espère que cette petite sélection d'anecdotes vous aura bien plus ! Je vous fais des gros bisous et vous dis à la semaine prochaine !

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