VII

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~Kings of Leon - Use Somebody~

La nuit nous engloutit toujours un peu plus chaque seconde. J'ai l'impression de me noyer, mais d'être en sécurité sous l'eau. Mon corps entier tremble encore alors que j'essaie de suivre les pas d'Harry dans la pénombre de la rue. Sa main agrippée à ma manche me guide difficilement, je cours, à bout de souffle, en essayant de ne pas tomber. L'image de ma mère tourne en boucle dans ma tête, elle ronge mon esprit, elle occupe mes pensées. Que fait-elle ? Que fait mon père ? Est-ce qu'elle va retrouver la raison ? Est-ce qu'elle m'aime toujours ?

Ces questions m'oppressent, mais la main d'Harry qui  me tire m'empêche quelque peu d'y penser. Je ne sais pas où il m'emmène, je ne sais pas où nous allons, mais à cet instant je m'en contre fou. Je veux juste m'éloigner, oublier, me laisser aller. Le vent frappe mes joues et s'infiltre sous mon tee-shirt. Chaque pas qui cogne contre le béton est comme une décharge qui électrise mon corps et qui ravive des parcelles de souvenir avec ma mère. Je revois tout. Putain je revois tout, alors que tout ce que je veux c'est oublier toute cette souffrance. Repenser au bonheur d'avant ne sert qu'à me tirer un peu plus vers le fond.

Et brusquement, je réalise tout. Je réalise que ma mère ne va vraiment pas bien et que je peux la perdre, que ma famille se déchire petit à petit, je réalise qu'au lieu de les aider je les fuit. Je réalise qu'il est tard, que je cours dans les rues de Londres sans savoir où je vais. Je réalise que je suis avec la personne que je déteste le plus dans l'université. Je réalise que cet enfoiré s'est bien foutu de ma gueule alors que je le laisse m'emmener je ne sais où. Mon corps entier se fige sur place, et je manque de trébucher à cause de celui d'Harry qui continuait de l'avant.

-Stop, j'essaie d'articuler le plus fort possible dans ce silence qui nous enveloppe.

Il se retourne presque instantanément. Un frisson me parcours l'échine lorsque ses iris vertes me dévisagent. Sa main a lâché ma manche, et il se retrouve alors à quelques centimètres de moi. J'ai envie de le pousser, de le frapper, de le rouer de coups, je voudrait me défouler sur cet abruti de Styles, mais tout ce que j'arrive à faire, c'est geindre de douleur en me ridiculisant encore plus face à lui.

-Tu peux tenir encore quelques minutes ? me demande t-il sans détacher ses yeux des miens. Le terrain de basket n'est plus très loin.

-Le terrain de basket ? je répète. Q-Qu'est-ce qu'on va foutre au terrain de basket ?

-Une partie de pétanque.

Il se retourne et recommence à marcher alors que je lève les yeux au ciel. Mais je ne le suis pas. Parce que rien ne me dit qu'il n'a pas l'intention de m'humilier de nouveau, ou bien de me séquestrer quelque part dans le fond d'une cave pour apaiser son mental de psychopathe. Rien ne me dit que ses intentions sont bonnes. Parce que j'ai en face de moi le plus grand enfoiré de tout les temps, celui qu'on surnomme le Corbeau par sa noirceur et le mépris qu'il rejette.

-Louis putain.

Mes yeux se lèvent vers sa voix et nos regards se rencontrent de nouveau. Il me fixe, à quelques mètres de moi avec un air exaspéré collé sur la face. Je n'ose pas prononcer un seul mot, ce qui entraîne un long silence ou aucun de nous deux ne daigne détourner le regard de l'autre. Harry finit quand même par briser ce silence.

-On va faire un truc, commence t-il. J'ignore pourquoi tu t'es retrouvé dans la rue à cette heure du soir en semblant maudire le monde, et tu ignores pourquoi moi aussi je trainais dans cette même rue, à cette même heure. On a nos raisons. Malchance ou hasard, appelle ça comme tu veux, on se retrouve comme deux abrutis au bord de la dépression. On est dans le même sac, Louis. Alors soit tu me considère comme un inconnu pendant quelques heures, le temps de vider ton esprit, ou alors tu reste ici comme un con et tu attends que la nuit te ronge les couilles.

Follow you | Larry StylinsonWhere stories live. Discover now