XIV

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~The Script - Nothing~

Il s'est assis sur le plan de travail en bois de la cuisine, observant la vieille balançoire. Il n'y a plus un bruit. C'est comme s'il n'y en avait jamais eu. Je reste planté devant lui sans avoir la force de bouger alors que son "va-t'en" résonne dans ma tête. J'ai froid maintenant. En fait, je ne sais plus, je n'ai peut-être jamais eu chaud. Il ne me regarde même pas.

Ses yeux sont rivés sur la balançoire.

Je crois que mes mains se resserrent sur la table derrière moi, je sais pas, je suis peut-être énervé. Je suis peut-être triste. Je ne pense pas être heureux mais de toute façon je ne sais rien des sentiments que j'éprouve là maintenant. J'ai un peu envie de crier. Je voudrais crier sur Harry, ouais, le traiter d'enfoiré. Sans motif. Je voudrai tout envoyer valser, briser sa vaisselle, déchirer ses rideaux.

Je crois que j'ai besoin d'attention. Il me rejette. Je crois que je perd la tête à vouloir que le Corbeau ne me fuit pas, moi qui le détestait plus que n'importe qui. Peu importe. Il ne m'offre que du vide. Un peu plus énervé qu'il y a quelques instants, je sors de la cuisine sans cacher mon mécontentement et rejoins le salon.

Il ne me suit pas.

-Viens maman, je dis en tentant de ne pas paraître énervé puisque ma mère n'a rien avoir dans cette histoire. On y va.

Pas de réponse. Je me retourne vers le canapé et découvre ma mère complètement endormie. Je pourrai sourire de cette tendresse qui s'offre à moi et me sentir apaisé de l'avoir retrouvé mais je n'y arrive pas. Je n'arrive pas à me dire que tout va bien mais je n'arrive pas non plus à me dire que je suis complètement désespéré. Je n'ai pas l'impression d'être dans ce monde mais je ne suis pas ailleurs non plus. Comme enchaîné dans un entre-deux qui serait décidément ma seule prison. Il n'y a que du vide. Rien d'autre. Du vide et moi. Et tout ce qu'il s'y passe autour est absolument inaccessible bien que je puisse tout voir de là où je me trouve. Dans ce milieu, entre la réalité et les rêves, je suis presque inaccessible. J'ai l'impression d'être vide moi aussi.

-Laisse-la dormir.

Je sursaute et me retourne vers la voix d'Harry. Il est appuyé contre la chambranle de la porte et fixe ma mère.

Il ne me regarde pas.

-Laisse-la dormir, il répète. Elle est épuisée alors ne la réveille pas.

Le vert de ses yeux me foudroie à nouveau, comme la première fois où je l'ai croisé. Il avait les cheveux plus courts et un peu plus bouclés. Mais ses yeux, ses yeux verts émeraude m'ont frappé durement, et je me souviens l'avoir trouvé mignon. Jusqu'à ce que du jour au lendemain il devienne cet être méprisable et arrogant. L'enfoiré au nom de Styles. Celui qui désormais ne se retire pas de mes pensées. Celui que j'ai embrassé après avoir perdu la raison.

-Hors de question que je la laisse ici, je ne pars pas sans elle.

Mon ton est dur, j'essaie de paraître énervé face à lui mais je sens que les tremblements dans ma voix sont encore présents. Étrangement, j'ai l'impression qu'il ne le remarque pas. Comme s'il avait fermé les yeux pour m'échapper. Et je déteste cette sensation de me sentir presque invisible face à lui. Je redeviens moi-même, je redeviens le Louis que tout le monde connaît, celui qui fait ce qu'on lui demande et qui d'ailleurs n'en demande jamais trop. Je redeviens le Louis "normal", celui qui n'a pas le courage de se mesurer au Corbeau.

Harry marche lentement jusqu'à une commode en bois de l'autre côté de la pièce et en sors un grand plaid gris qu'il vient poser sur le corps endormi de ma mère. Je crois que j'ai clairement saisi le message : elle reste ici.

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