𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝐈

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𝙱𝚒𝚛𝚖𝚒𝚗𝚐𝚑𝚊𝚖, 𝟷𝟿𝟷𝟿

C'est quand je sentais la lumière du soleil chauffer sur ma peau, que je devinais que la domestique était passé discrètement dans ma chambre. Il n'y avait que sous l'ordre de mon père qu'elle se serait permise de venir me réveiller. J'ouvrais difficilement les yeux, beaucoup trop éblouie par les rayons du soleil. Le printemps avait bien commencé en ce mois de mai. La fenêtre grande ouverte laissait le chant des oiseaux pénétrer dans ma chambre. C'est un son que j'avais toujours trouvé plus agréable que tous les sons de la nature réunis. Il n'y avait rien de mieux pour se réveiller. Notre demeure, un vaste manoir, se cachait au cœur d'une forêt. Depuis la disparition précoce de ma mère, je vivais surtout en ville, mais je conservais peu de souvenirs d'elle, seulement ceux figés dans les rares photographies préservées..

Après avoir repoussé les draps, je m'étirai en observant par la fenêtre. Une brise légère caressa mon visage. Normalement, j'aurais pris un bon livre, m'installant sous un arbre pour me laisser emporter par mes lectures. Cependant, notre départ récent, pour une raison toujours obscure, avait chamboulé mes habitudes. Enfilant ma robe de chambre en voile, je me rendis devant ma coiffeuse pour arranger mes cheveux bruns, légèrement ébouriffés. Le salon m'attirait, mais le silence ambiant contrastait avec l'effervescence habituelle. Aucun cri, aucune voix ne troublait le calme. En pénétrant dans le salon, je fus accueillie par des domestiques affairés à préparer la table. Tout en cherchant mon père ou l'un de ses hommes, je surpris deux domestiques chuchotant en cuisine. Un raclement de gorge les figea. Les interrompant, je leur demandai si elles avaient vu mon père.

- Est-ce que  l'une de vous aurait vu mon père ce matin ?

Tout en attendant une réponse, j'observais les deux femmes. Elles devaient être à la limite de la retraite. Est-ce qu'elles en auraient une ? Cela ne m'étonnait pas que mon père ait employé des personnes aussi matures. Il savait très bien ce qu'il faisait et avait bien montré qu'il n'hésitait pas à se débarrasser d'une personne qu'il jugeait inutile à la vie. La première empoignait son tablier et jetait des coups d'œil furtifs à sa voisine. Cette dernière ouvrait à plusieurs reprises la bouche, n'étant visiblement pas sûre de vouloir me répondre. Mais mon regard insistant la contraignait à me répondre.

- Ce matin nous avons vu Monsieur Tozzi et ses hommes se rendre dans le sous-sol de la maison. Il nous a demandé de faire comme si nous n'entendions rien.

Leur révélation m'intrigua, mais un cri strident retentit, coupant court à toute explication. Les domestiques quittèrent précipitamment la cuisine. J'avais oublié que mon père retenait un homme en sous-sol. Un lieu que je m'étais interdit de visiter depuis que je les avais vu y emmener cet homme Une nouvelle domestique, apparemment ignorante des événements, ou alors qui avait le don de ne rien laisser paraître, m'invita à m'installer dans le salon, où le petit-déjeuner était prêt. Sans poser une seule question à voix haute, je m'y rendais alors que dans ma tête des dizaines de questions apparaissaient et me brûlaient la langue, n'attendant qu'une chose : être posée. La table offrait un assortiment typiquement anglais : œufs, jus d'orange, thé, lait, fruits, mais pas de café.

- Vous n'avez pas préparé de café ?

Un employé de cuisine, apparu de nulle part, se tint à mes côtés.

- Non mademoiselle, nous ignorions que vous preniez du café. Cela ne faisait pas partit des éléments que votre père nous a fait parvenir en ce qui vous concerne.

- Achetez en s'il vous plaît, je ne prendrais que cela pour le petit-déjeuner à présent.

Après que le cuisinier ce soit éclipser, je pris quand même le temps savourer chaque plats disposés sur la table. La tête tournée vers l'une des grandes fenêtres, je pensais à me rendre en ville pour m'occuper, le temps de trouver une activité. Des voix provenant de la cuisine, où se trouvait l'entrée du sous-sol, interrompirent mes pensées. Je me levai et vis mon père, accompagné de ses hommes, les mains maculées de sang. Un sourire se dessina sur mon visage, bien que je ne comprenne pas entièrement ce que je venais de voir.

- Padre !

Mon père ne cachait aucunement les preuves de ce qu'il venait de faire. Il n'avait sûrement plus l'intention de le faire. Même s'il continuait de me cacher certaines choses, dont j'avais envie de lui parler. Mais il n'avait pas l'air d'être disposé à le faire maintenant.

- Giuliana. Je suis désolé de ne pas avoir été là ce matin, mais je dois partir en ville. Donc tu ne sors pas d'ici, disait-il en attrapant un chiffon mouillé apporté par une domestique.

Je le regardais ensuite quitter le salon pour entendre quelques secondes plus tard la porte d'entrée claquer. Une entrevue très rapide. Je constatais alors que plus personne excepté les domestiques, le prisonnier et moi ne se trouvait dans la maison. Ce qui ne me rassurait guère. Sans réfléchir, j'attrapai une assiette et me rendait dans la cuisine. Mon regard se posait directement sur la porte qui devait mener au sous-sol. Les personnes présentes dans la pièce était beaucoup trop occupées à effectuer leur tâches pour faire attention à ce que je faisais. En ouvrant la porte, je fus rassurée de voir que la lumière naturelle était projeter dans l'ensemble du sous-sol. Il n'y avait pas beaucoup d'escaliers et la température devait être agréable, pas trop froide, ni trop chaude. Refermant la porte derrière moi, je me souvenais que je m'étais promis de ne jamais franchir cette porte. Mais la curiosité prenait le dessus à chaque fois. Le danger ne m'avait jamais effrayée et c'est sûrement une qualité que je tenais de mon père.

Quand j'avais terminé de descendre, mon regard parcourait automatiquement chaque recoin du sous-sol, pour finalement découvrir une cage, qui avait dû être installée avant notre arrivée. Cet enlèvement devait être prévu depuis longtemps. Je m'approchai lentement de la cage où se trouvait le jeune homme. Depuis qu'il était ici, je ne l'avais vu que deux fois et je l'ai toujours vu avec son visage ensanglanté. Discrètement, je m'accroupis et glissai l'assiette dans le petit passage qui avait été fait pour ça. Sauf que je constatais qu'il n'avait pas été nourrit une seule fois. Est-ce que c'était volontaire ? Le laisser mourir de faim afin de le faire parler ? Le bruit de la porcelaine semblait réveiller le prisonnier. Un sursaut me trahissait. Je reculai rapidement, sans le quitter des yeux. Son regard allait de l'assiette jusqu'à moi. À en juger ma tenue inadéquate, il devinait sûrement que je n'étais pas une domestique. Il amenait deux de ses doigts jusqu'à son front, faisant ce qui ressemblait à un signe de salutations.

- Enchanté Giuliana Tozzi.

Le jeune homme prononça ces mots avec une étrangeté qui fit naître en moi un mélange d'inquiétude et de curiosité. Le mystère planait dans l'air, et tandis que mes yeux cherchaient des réponses dans les siens, une connexion fugace s'établit, laissant entrevoir un monde de secrets entrelacés à notre insu. Mon esprit s'embrouillait de questions sans réponse, mais une chose était sûre : ma vie tranquille venait de basculer dans une réalité inattendue, où l'ombre de l'inconnu se dessinait dans chaque regard et chaque geste.

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Dans les yeux d'un Shelby || Tome I (en réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant