𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝐗𝐕𝐈𝐈𝐈

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     Au bout de quelques jours, avec Elizabeth, nous avions pris la décision de retirer la plupart des corps, afin de pouvoir circuler sans avoir l'envie de vomir à tout instant. De plus, l'odeur commençait à devenir insoutenable. Par conséquent, avec l'aide d'une charrette et deux des chevaux, ainsi qu'un peu de courage, nous réussîmes à sortir quelques corps et à les enterrer au fond du domaine. J'ignorais si j'avais l'intention de garder le domaine ou de le vendre, mais nous avions tout de même inscrit les noms de chaque personne sur des croix en bois, pour que leur tombe ne soit pas anonyme. C'était la moindre des choses que nous pouvions faire afin de d'honorer leur mémoire.

Mon esprit était sans cesse hanté de pensées répugnantes. Je revoyais en boucle tous les événements qui se sont déroulés ces derniers temps. Ceux qui me paraissaient être les plus heureux, jusqu'aux plus funestes. La cuisine étant nettoyée et "débarrassée", nous pûmes y manger, afin de ne pas constamment rester dans le salon. À force d'y passer nos journées, il y avait de fortes chances pour que nous finissions par la haïr. Depuis la visite de John, nous parlâmes très peu. Cela avait été mon choix, j'avais décidé de ne plus rien dire, jusqu'à ce que ma colère s'atténue un peu. J'ignorais quand elle allait s'atténuer. Après le départ de John, Elizabeth me répétait qu'il n'avait forcément rien à voir dans cette histoire. Cependant, je n'arrivais pas à raisonner de cette façon, quand bien même je le souhaitais de tout mon cœur.

"Mademoiselle, commença Elizabeth. Est-ce que je peux me permettre de vous dire ce que je pense ?"

     Pendant quelques secondes, je levai les yeux vers elle. En voyant l'expression de son visage lorsqu'elle me rendit mon regard, je devinais que le mien devait être éteint, comme si mon sang avait quitté mon corps, que malgré le fait que mon cœur continuait de battre, mes poumons de se remplir de l'air que j'expirais et mon cerveau de fonctionner, toute la vie que je possédais m'avait quitté. Sans piper mot, je baissais de nouveau le regard, lui laissant le choix d'interpréter mon silence à sa convenance.

"J'ai beaucoup réfléchis à ce que Monsieur Shelby vous a dit. En particulier, au mot qui a été envoyé aux Peaky Blinders, Mademoiselle."

     Entendre cette succession de noms, enfonçait toujours plus profondément le couteau dans la plaie, il ne s'agissait même plus de le remuer. Néanmoins, je la laissais m'expliquer ce qu'elle pensait, sans être sûre que j'allais prendre en considération ses paroles. Au final, savoir qui avait envoyé le mot à ce gang ne changerait rien pour moi. Le savoir n'allait rien ramener de tout ce que j'ai perdu.

"J'en suis arrivée à la conclusion que ça devait forcément être quelqu'un qui fréquentait ce manoir. Pensez-vous qu'un employé aurait pu être infiltré ici, afin de surveiller tout ce qui se passait ?"

     Je décidai quand même de la regarder pour écouter ce qu'elle avait à me dire. Au fond, elle ne m'avait rien fait, elle ne méritait pas que je passe mes nerfs sur elle, en ignorant toutes ses paroles. Même si je savais que je ne l'écouterais que d'une oreille, il était sûr que quelques minutes plus tard, j'aurais déjà oublié tout ce qui aurait été dit. Les traits d'Elizabeth avaient changé en l'espace de quelques secondes, au moment où elle évoquait la possibilité qu'un infiltré des Peaky Blinders se trouvait parmi nous pendant tout ce temps. Cela ne m'avait jamais traversé l'esprit. De son côté, je savais qu'elle attendait ma réponse, que je lui fasse part de ce que j'en pensais, si j'avais une quelconque opinion ou même une idée sur l'identité de potentiel infiltré, mais je n'avais pas la force pour quoi que ce soit en ce moment. Comme il arrivait souvent ces derniers temps, mon appétit était rapidement coupé. Je m'arrêtais surtout de manger, car si je me forçais, je vomissais tout à peine sortie de table. Par conséquent, même le petit-déjeuner, je l'évitais. Ainsi, je me levai de table, tandis qu'Elizabeth me regardait, les yeux écarquillés, mais également déçue que je ne prenne pas part à sa réflexion. Histoire de lui répondre malgré tout, je lui répondis simplement "Je n'en ai pas la moindre idée" et je quittai la pièce.

Dans les yeux d'un Shelby || Tome I (en réécriture)Where stories live. Discover now