Chapitre V

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Le cortège s'avance vers le jardin funèbre où Odin doit être enterré. Tous vêtus de violet foncé, comme le veut la coutume, la foule s'agglutine autour du caveau royal où Frigga repose déjà. Thor prononce les dernières paroles que le souverain se doit de dire lors de funérailles. Quelques gardes font glisser le cercueil d'or aux côtés de la reine. Thor me lance un regard, je m'avance vers le caveau et ferme les yeux. En tant que déesse de l'Amour, je dois sceller l'union des deux époux dans le pantheon des dieux. Je me recueille donc quelques instants, le voyant se lever vers la plus haute position où Frigga le regarde s'élever. Je sais désormais qu'ils vivront l'éternité ensemble. Grâce au Brisingamen, je fais apparaître un bouquet de fleurs blanches que je lance sur le cercueil. Les gardes rabattent le couvercle, un grand silence règne et Thor s'agenouille pour se recueillir alors que la foule se disperse. Je reste derrière lui, les mains croisées, les yeux posés sur la Pierre tombale où est écrit: « Ici repose les époux royaux », et leurs noms à côté. Le soleil a disparu à l'horizon et le ciel a revêtu un bleu profond particulier aux soirées tristes. Un léger vent passe dans la chevelure blonde du dieu du tonnerre, sa cape noir se soulève et les fleurs tremblent. Plusieurs nuages s'accumulent dans le ciel, je comprend vite que Thor se sent mal. J'approche lentement, frissonnante de la tristesse du dieu. Je pose une main sur son épaule et lui envoie toute la tendresse et le réconfort que je ressens à ce moment. Les nuages s'apaisent, ses doigts se décontractent, il lève le visage vers moi et m'adresse un sourire reconnaissant.
« J'aimerais avoir votre pouvoir dans ces moments de tristesse. (Il sert ma main).
— Je vous rassure, mon pouvoir n'est pas de tout repos.
— J'ai ressenti votre amour, votre tendresse, votre réconfort au plus profond de moi Freyja. Votre pouvoir est sans doute le plus beau de tous.
— Mais le moins paisible. »
   Il me sourit gentiment et m'entraîne vers le palais. Nous entrons dans la salle où une collation est servie. Les discussions sont plutôt légères dans cette atmosphère morose. Les trois guerriers s'avancent vers le futur roi, leurs sourires compatissant me réconforte, je sais qu'ils sont là pour Thor. Je m'éclipse vers le balcon où je regarde les étoiles illuminer le ciel. Un homme se place à côté de moi, je ne détourne pas mon regard du paysage.
« Belle soirée pour une triste circonstance.
— Odin n'aurait pas voulu nous voir si triste Balder.
— Comment accepter la mort d'un si bon souverain. (Il cherche au loin une image pouvant le réconforter).
— Il faut simplement faire face et épauler notre futur roi.
   Le guerrier se tourne vers moi, toujours droit dans son habit officiel. Je lui lance un sourire, il ne quitte pas mon visage:
— Comment faites-vous pour rallumer la flamme dans le coeur de pauvres hommes en détresse.
— Je ne veux pas que d'autres subissent ce que j'ai subit...
   Je baisse les yeux en pensant à Njord et à Loki.
— Comment puis-je vous redonner le sourire?
    Je lève les yeux sur lui et penche légèrement la tête en posant mes doigts sur son avant bras.
— La question n'est pas de savoir comment me rendre le sourire Balder, mais comment le rendre au peuple. »
   Je m'éclipse voulant échapper à un tete à tête prolongé qui pourrait nous être fatal. Par obligation envers Thor, je reste jusqu'à ce que les derniers invités aient quitté le palais. Je l'accompagne à sa chambre essayant de parler de tout et de rien. Thor est plongé dans une profonde réflexion. Il me souhaite une bonne nuit en me serrant dans ses bras. Je me rend à mes appartements suivie par Balder qui me rattrape une fois devant la porte.
« Freyja! Attendez, je... je voulais vous dire quelque chose.
— Je vous écoute.
— Je ne peux oublier notre baiser. J'ai beau essayé, rien n'y fait.
— Balder... je vous apprécie beaucoup mais je ne suis pas...
Sans que je ne puisse finir ma phrase il attrape ma taille et m'attire à lui me forçant à l'embrasser. Surprise, je ne réagis pas. Il recule et pénètre dans la chambre où il avance rapidement vers le lit. Ses doigts glissent sur mon corps alors que sa bouche ne se décolle pas de la mienne. Je ne comprend pas vraiment ce qu'il se passe... mes pensées sont troublées par la fatigue et la tristesse. Je reprend mes esprits lorsque je sens ma robe glisser vers le sol. Instinctivement je lève mon bras pour le repousser mais sa force est supérieure à la mienne. La colère se fait sentir en moi alors qu'il devient de plus en plus pressant. La force du Brisingamen fait apparaître un poignard dans ma main. Je brandis l'arme vers son cou. Il recule immédiatement, levant les mains en signe d'innocence.
« Je peux savoir ce qui vous prend? (Mon sang bouille dans mes veines alors que je m'avance d'un pas vers lui).
— Je pensais que vous vouliez...
— Pensez-vous que je m'abaisserais à cela?
Mes yeux lancent des éclairs. Ma nudité est cachée par une robe blanche venant recouvrir ma peau. Le poing fermé et l'autre main enroulée autour du manche de ma dague je ne m'arrête pas d'avancer vers lui jusqu'à ce qu'il se trouve plaqué contre le mur.
— Vous baissez dans mon estime Balder.
Celui-ci recouvre une expression machiavélique en croisant les bras sur son torse. Surprise par ce changement de comportement je hausse les sourcils:
— Que signifie ce regard?
— Vous succomberez.
— Détrompez vous. J'ai plus de volonté que vous ne croyiez. (J'avance la lame près de son cou).
Un sourire au coin apparaît sur ses lèvres. Je ne comprend pas comment ce visage si doux puisse se transformer en un air si méchant. D'un coup je me retrouve avec le couteau sous la gorge, dos à lui et les mains bloqués dans la sienne.
— Je vous conseille de ne pas bouger. (Son souffle glisse sur mon oreille alors qu'il resserre sa prise et lève l'autre main vers mon cou).
— Que voulez-vous Balder?
Ses doigts se baladent sur mon ventre, progresse vers ma poitrine et viennent s'enrouler autour de mon médaillon. Mon sang ne fait qu'un tour. Avec mon bras libre, je lui met un coup de coude dans le ventre, il se courbe en desserrant sa prise. J'attrape le poignard, le colle contre le mur, place la lame sous son cou en appuyant sur son torse.
— Ne vous avisez plus jamais de me manipuler.
— Vous admettez donc que j'ai réussi? (Son expression insolente s'accentue plus encore).
J'envoie mon genoux dans son ventre et le jette à l'extérieure de ma chambre. Il se redresse et tourne son visage vers moi:
— J'aurais ce collier Freyja, que vous le vouliez ou non.
— Essayez toujours.
Il hoche la tête avant d'ajouter.
— Et j'aurais le droit à une nuit d'amour.
— Vous ne savez rien de l'amour. »
Je ferme la porte violemment, et lance mon poignard au travers de la chambre. Il vient se planter dans le mur à droite de mon lit. J'avance furieuse, le front dans les mains, le cœur battant, et le corps en feu. Pourquoi vouloir ce collier? Je passe de l'eau sur mon visage et m'installe sur le balcon pour apaiser mon esprit. Mais Balder à placer le doute et la peur dans mon esprit. Je n'ai plus l'impression d'être en sécurité.

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