Soirée pizza et mea culpa

5.5K 288 9
                                    

Je rentrais chez moi, enlevais mes converses blanches et les balançais dans l'entrée suivie de près par mon sac de cours et me dirigeais vers le salon.
Je sentis mon ventre gargouillais en sentant l'odeur des pizzas. Je souris, mes frères n'avaient pas oublié notre rituel.
Soudain ma bonne humeur fut effacé par l'image d'Aaron affalé sur le canapé.
- Heu ... on m'explique ce que tu fais là ?
- J'ai été invité, il haussa les épaules.
- Ah parce que maintenant tu as une langue ? Tu me parles à nouveau ?
Il réhaussa les épaules. Il semblait s'en foutre éperdument.
Son comportement avait le don de m'énerver.
Soudain il s'empara d'une part de pizza et l'avança vers sa bouche.
- Hé ! Ma pizza !!
Alors là si il y'avait un truc que j'avais en horreur c'est qu'on me vole de la nourriture.
Il me montra sa part de pizza reine à moitié croquée.
- Oh c'était à toi, vraiment désolé, dit-il en me la tendant.
Je la repoussais vivement en faisant la grimace.
- Garde la il y a tes miasmes dessus, je veux pas attraper le sida.
- Chérie sans vouloir te vexer le sida ne s'attrape pas exactement comme ça, sourit-il de manière perverse.
- Écœurant. Bon, où sont mes frères ?
- Dans la cuisine.
J'hochais la tête et allais rejoindre ma fratrie.
- Pourquoi vous l'avez invité ? m'écriais-je à peine entrée dans la pièce. Cette soirée est une soirée réservée à la famille ! Et à ce que je sache il ne fait pas partie de la famille !
- Écoutes Angie, c'est notre ami, il fait certainement plus partie de la famille que papa ou encore sa copine. On lui a proposé et il a accepté et puis on s'est dit que c'était une bonne idée, vous aurez le temps comme ça de vous rabibocher comme ça. C'est insupportable de vous voir jouer au chat et à la souris comme ça. Un coup tu l'évite, il te cours après, l'autre il t'ignore tu lui cours après. Vous êtes vraiment des gamins. Réglez cette histoire ce soir, dis mon jumeau sans s'arrêter une seule fois pour reprendre son souffle.
Mon pied tapait la mesure contre le carrelage de la cuisine signe de mon agacement mais je gardais le silence pesant le pour et le contre.
Ce qu'il avait dit n'était pas complètement faux ...
Après tout j'attendais cette occasion depuis un certain temps et maintenant qu'elle se présentait je n'allais pas me dégonfler. Aaron m'avait parlé, les quelques phrases échangées étaient déjà plus que tout ce que nous avions pu échanger cette dernière semaine et ok, notre conversation sur la pizza et le sida n'était pas un drapeau blanc ni l'armistice mais c'était un début.
Je soupirais et me donnais mentalement du courage avant de retourner au salon accompagnée de mes frères.
- Heum ... Aaron ?
Il releva la tête vers moi.
- On peut parler ?
Il hocha la tête m'encourageant à me lancer.
- Non, je veux dire seul à seul, j'ai beau adorer mes frangins ça ne les regarde pas.
Ils ne parurent cependant pas se vexer et quittèrent le salon de manière à nous laisser un peu d'intimité même si dans cette maison ce mot n'a pas beaucoup de sens.
- Ok maintenant c'est bon, dis ce que tu as à dire, m'enjoigna Aaron en tapotant une place à côté de lui sur le canapé.
Je m'installais à côté de lui tout en laissant un espace convenable entre nous, un peu gênée.
- Par où commencer ... murmurais-je.
- Par le début ? me sourit-il. Il essayait de me mettre en confiance je lui en fut reconnaissante.
J'avais horreur d'avouer mes fautes et de faire mon mea culpa alors j'apprécias ses efforts.
- Je ... j'ai déjà du te le dire un million de fois mais je suis désolé, je n'étais pas vraiment sincère les autres fois où je te l'ai dit parce que j'avais juste peur de perdre notre récente amitié et je ne comprenais pas vraiment ce que j'avais fait de mal. Je te le répétais sans cesse en me disant que ça arrangerait tout. Je pensais ... je pensais avoir acquis le droit de savoir ce qui est arrivé à ton frère parce que je t'avais confié des choses personnelles mais je me rends compte que c'est totalement débile. Je te l'ai dit parce que j'étais prête à me confier à toi. Et c'était ton droit de ne pas en faire de même. Je pense que j'étais juste déçue que tu ne me fasses pas suffisamment confiance pour me confier ce secret. Je me suis sentie affreusement mal et stupide, tout le monde était au courant, certains ont même du assister à l'enterrement et moi j'étais dans le flou total, je t'ai accaparé avec mes problèmes qui me paraissent futile maintenant et je n'ai même pas pensé à prendre de ses nouvelles. Quelle terrible amie je fais ...
Il ne dit pas un mot, me laissant m'exprimer. Mais je voyais tout de même différentes émotions passaient à travers ses yeux, au fur et à mesure de mon discours.
- J'ai discuté avec mes frères et oui parfois ils peuvent être de bons conseils, ils m'ont permis de comprendre mieux ton point de vue et crois moi je le respecte bien que je trouve cela bête que tu aies peur de montrer tes émotions en pensant que ça te rends faible. Mais ... Aaron, au contraire ça te rends d'autant plus fort, tu as traversé beaucoup d'épreuves et tu est toujours là, souriant, généreux et réconfortant envers les autres. Tu es un survivant. Tu as le droit d'être triste et tu as encore plus le droit au bonheur, ton frère ne t'en voudrait pas d'avancer et de faire ton deuil. Quoi qu'il en soit, prend tout le temps qu'il te faudra. J'ai beau ne pas être la fille la plus patiente du monde j'attendrais que tu sois prêt à te livrer à moi. Et cette fois-ci je serais celle qui sera là pour toi comme tu l'as fait avec moi. J'arrive tard je sais mais ... je suis là, je serais toujours là, dis-je en repensant à ce qu'il m'avait dit ce soir là.
Il parut ému par mes paroles et une larme coula sur sa joue.
Il me prit dans ses bras et je calais ma tête contre son épaule.
Nous restâmes dans cette position, serré l'un contre l'autre, mais ça ne me gênait pas, non j'étais heureuse et calme, pour rien au monde je n'aurais voulu que ce moment cesse.
Mais tout bon moment à un fin. Il rompit notre étreinte et releva ses yeux humide vers moi.
- Je suis désolé à propose de ce que je t'ai dit. Je n'en pensais pas un mot. J'étais tellement aveuglé par la colère que je ne pensais qu'à te faire souffrir comme moi je souffrais. C'était stupide.
J'essuyais mes yeux, je ne m'étais même pas rendu compte que je pleurais.
- On est tous les deux des idiots alors. C'est rassurant.

***

Votez et commentez si vous avez aimé ça fais toujours plaisir 😉

Mon meilleur ennemiWhere stories live. Discover now