Je te crois

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Mes frères, malgré leur impatience d'aller voir leur ami, m'avait laissé y aller la première.
C'est donc la peur au ventre que j'entrais dans cette pièce immaculé, à l'odeur écœurante de désinfectant.
- Tu as vraiment une sale tête, rit-il
faiblement.
Il était vrai que mes énormes cernes et mes yeux rouges ne trompaient personne.
Mais je m'en fichais, tous ce qui m'importait à cet instant c'était lui, en vie, faisant des blagues. Il avait comme à son habitude un sourire narquois accroché à son visage.
Sa peau quoique encore un peu albâtre ne lui enlevait pas son charme. Il avait les traits tirés et les cheveux en pagaille, mais je ne l'avais jamais trouvé aussi beau.
- Toi par contre pour quelqu'un qui vient de frôler la mort tu es plutôt beau gosse, soupirais-je en me moquant.
- Que veux tu, j'ai de bons gènes, ne sois pas jalouse.
Je laissais planer mes yeux sur tous ces câbles rattachés à lui, le maintenant en vie.
Je laissais s'échapper les larmes que je retenais depuis hier, le stress, la peur, la joie de le voir en vie, je m'écroulais contre lui.
- T'es ... t' t'es vraiment un connard p.. putain, hoquetais-je.
Il rit douloureusement.
- Ah bon ?
- Oui, tu ... merde ... me refais plus jamais un truc comme ça, le suppliais-je.
Il ouvrit ses bras dans lesquels je me glissais rapidement.
- Je suis désolé, chuchota t-il.
- Nan tu n'as pas besoin de t'excuser c'est moi qui ... c'était juste ... on ne savait même pas si tu étais vivant ou pas. C'était horrible. Et quand je t'ai vu ... tu avais l'air tellement mort ...
Je lu dans ses yeux qu'il culpabilisait.
- Dé ...
- N'y pense même pas, le coupais-je en plaçant mon doigt sur sa bouche.
Ses lèvres s'étirèrent sous mon contact.
- Je suis content de te voir, mes autres visites n'étaient pas aussi bien. Et je ne pouvais pas leur faire ... ça, fit-il en se penchant vers mes lèvres, m'embrassant tendrement.
Je répondis à son baiser.
- Tu sais on a croisé ta mère hier soir. Enfin ce matin, avouais-je.
Il perdit son sourire rapidement à la mention de sa mère.
- Tu te rends compte qu'il a tout de même fallu que je sois dans un lit d'hôpital pour qu'elle me présente son mec officiellement. Tu imagines : « Oh tiens mon fils, contentes que tu aies survécu, je te présente Pierre, mon copain. Nous sommes fiancé, tu veux venir au mariage ? »
Je baissais la tête.
- Tu dois exagérer ... Elle avait l'air vraiment mal. Je ne dis pas ça pour prendre sa défense. Ce qu'elle a fait est inacceptable, mais ... je crois qu'elle veut sincèrement se racheter.
Il hocha la tête.
- Je verrais, fit-il en triturant nerveusement le rebord de sa couverture bleu ciel.
- Et ... heum ... ton père est venu ?
- Non. Mais j'ai eu un message de lui, où il me souhait un bon rétablissement et qu'il était désolé de ne pas avoir pu venir.
Je serrais les poings.
- Quel connard.
- Je te le fais pas dire, ricana t-il.
- Avant ... avant de ... j'aimerais qu'on parle, dis-je sérieusement.
- La fameuse discussion hein ? Je l'ai déjà eu avec ma mère.
Je soupirais.
- Peu importe ce que tu me diras je te croirais d'accord ? Mais j'ai besoin de savoir ce qui s'est passé. On affrontera ça ensemble.
Il prit une grande inspiration.
- Je buvais tranquillement ma bière et d'un coup je ne saurais pas t'expliquer j'entendais la musique comme si elle venait de très loin, ça bourdonnait dans mes oreilles. J'avais l'impression d'être dans un état second, comme détaché de mon corps puis la douleur est venu. Je voulais inspirer mais l'air n'entrait pas dans mes poumons, je n'arrivais plus à respirer c'était ... horrible. Tout ce dont je me souviens après c'est des tonnes de médecins et d'infirmières puis ma mère et son guignol de copain. Ils m'ont dit que j'avais fait « une overdose d'opioïdes », le pire n'était pas le diagnostic en soit, ni de me dire que je serais mort de la même manière que mon frère mais que ma mère ne me croit pas. La voir me regarder, dévastée et déçue. Alors je crois que je ne le supporterais pas si toi aussi n'avais pas foi en moi. Je n'ai rien pris, je te le jure, je me suis fais la promesse de ne jamais consommer ne serait-ce qu'un joint le jour de la mort de Nate.
- Je te crois. Et on va chopper le connard qui t'as fais ça, dis-je avec conviction.
- Merci, souffla t-il presque imperceptiblement mais assez pour que je l'entende.
- Je ... mes frères attendent dans le couloir, je crois qu'ils vont me tuer si je retiens ne serait-ce qu'une seconde de plus alors je vais les appeler. Tu n'es pas trop fatigué pour une autre visite ? m'inquiétais-je
- Je pète la forme, rigola t-il. Envoie les.

Mon meilleur ennemiWhere stories live. Discover now