Destination Californie

13: La promesse

Allongé sur le dos, les yeux fermés pour que personne ne le dérange, Jane repensait à la conversation qu'il avait eue avec Cho. Conversation, accusation, dissuasion... il ne savait pas comment appeler cela. Peu importait. Ce qui l'agaçait le plus, c'est qu'il n'arrivait pas à s'en remettre.

Cho... Il s'était placé en protecteur de Lisbon. Il voulait lui éviter de souffrir. Même si Jane voyait toujours sa relation avec Lisbon comme celle de frère et sœur se taquinant et se chamaillant sans arrêt, c'était Cho le véritable grand frère. Il était son bras droit mais aussi la personne qui la protègerait férocement contre tous ceux qui essaieraient de lui faire du mal, intentionnellement ou pas. Il n'y avait pas d'amour dans cette volonté. Seulement une profonde amitié.

Dans ce cas, que devenait sa relation avec Lisbon ? Quel lien les unissait ? Etait-elle sa meilleure amie ? La personne qui lui permettait de ne pas sombrer dans une folie totale ? Il était incapable de se décider sur la question. Cela ne relevait même pas d'une décision. Il s'agissait de faits. Et il n'arrivait pas à les qualifier.

Un élan de colère traversa Jane. Comme s'il avait prévu de rencontrer des personnes qui prendraient autant d'importance dans sa vie ! Comme s'il avait prévu qu'elle s'attacherait autant à lui ! Il n'avait pas voulu cela. Mais tu as tout fait pour, rétorqua une petite voix dans sa tête. Tous ces flirt innocents, tous ces sourires qui la font fondre, toutes ces confidences que tu n'as faites qu'à elle... Oui, il n'avait rien fait pour la tenir à distance, elle plus que toute autre personne. Et maintenant, il en arrivait au point où il ne savait plus ce qu'il ressentait. Tout s'embrouillait dans sa tête.

La seule chose qu'il voyait clairement, c'était son égoïsme. Il voulait John le rouge. Et il voulait Lisbon. Mais ils ne collaient pas dans la même équation. Courir après John le rouge, le détruire, c'était prendre le risque de blesser Lisbon, de la détruire elle. Le laisser pour ne pas la perdre, c'était faillir à sa promesse et passer le reste de ses jours à en être malade. Il leur devait cette vengeance ! Mais il ne pouvait pas les avoir en même temps. S'il avait toujours été sûr qu'il voulait à tout prix tuer John le rouge, aujourd'hui, il ne savait pas ce qu'il désirait le plus. Et c'était terrifiant. Pourquoi avait-il fallu que Cho vienne lui parler ? Il avait mal à en pleurer, sans savoir vraiment pourquoi il avait mal. Pourquoi ou à cause de qui.

Il ne pouvait pas abandonner sa quête. Il ne pouvait pas abandonner ce but qui l'avait maintenu en vie toutes ces années. Il ne pouvait pas faillir à leur mémoire. Et pourtant, il ne pouvait pas renoncer à Lisbon. Ne plus entendre son sarcasme et ses menaces, ne plus voir ses magnifiques yeux verts, ne plus la voir rougir d'embarras, ne plus voir son sourire... Il avait besoin d'elle comme on a besoin d'oxygène. Elle était sa bonne conscience, son amie, sa confidente... Comment y renoncer ? Il était égoïste, il avait besoin d'elle. Il ne voulait pas la laisser. Il n'était pas amoureux d'elle. Du moins, il ne pensait pas l'être. Non, il n'était pas amoureux. Il ne pouvait pas. En fait, il ne savait pas ce qu'il ressentait. Son esprit était un fatras d'émotions s'entrechoquant. Mais il avait besoin d'elle.

« Jane ! » cria une voix féminine. Il se redressa brusquement, manquant de se cogner la tête contre celle de Lisbon, qui eut le réflexe de se reculer quand il sursauta. Il cligna plusieurs fois des yeux, hagard en se rendant compte qu'il s'était endormi. Lisbon avait les joues roses et une expression totalement paniquée sur le visage. Elle le regarda encore quelques instants comme s'il était revenu d'entre les morts, puis s'échappa de la salle en courant presque.

Alors là, il ne comprenait vraiment pas ce qu'il se passait. Une fois son esprit un peu plus éveillé, Jane s'assura qu'il était bien au CBI, des fois que... Mais personne ne l'avait déplacé dans son sommeil, il était toujours sur son canapé.