𝐉𝐄 𝐍'𝐀𝐈𝐌𝐄𝐑𝐀𝐈 𝐏𝐋𝐔𝐒 𝐉𝐀𝐌𝐀𝐈𝐒

44 : Maman(s)

Quand je suis rentrée à la maison, le dimanche matin, j'ai découvert ma mère assise à la table de la cuisine, un verre de vin dans une main, une feuille de papier dans l'autre.

- Maman ? Tout va bien ?

Mais je connaissais déjà la réponse à cette question. Quand ma mère sortait la bouteille de vin, c'est qu'elle allait vraiment mal. La dernière fois que ça avait été le cas, c'était suite au départ de mon père, plusieurs semaines plus tôt. Depuis tout ce temps, il ne nous avait d'ailleurs donné aucun signe de vie, nous laissant dans la merde, Maman et moi. Connard. Voyant que ma mère restait muette et ne relevait pas les yeux de la feuille de papier, je me suis approchée et j'ai posé une main sur son épaule.

- Qu'est-ce qu'il se passe ?

Elle m'a tendu le papier qui s'avérait être une facture. En apercevant le montant inscrit au bas de la page, j'ai vite réalisé quel était le problème. J'ai reposé la feuille sur la table avant de prendre une chaise pour m'asseoir à ses côtés.

- Tu as des nouvelles de Papa ?

Elle a secoué la tête, l'air dépité.

- Tu sais, Justine, vu l'état actuel des choses, je doute que ton père revienne un jour.

- Ne dis pas ça, c'est juste une mauvaise passe... ai-je tenté de la convaincre alors que je n'y croyais plus moi-même.

Ma mère eut un petit rire sarcastique.

- Des « mauvaises passes », il n'y a que ça depuis qu'il a intégré cette fichue entreprise. Ça faisait bien longtemps que rien n'allait plus entre nous, a-t-elle poursuivi en levant les yeux vers moi. Finalement, je crois que, malgré tous les problèmes qu'il nous a laissés, partir était la meilleure chose qu'il avait à faire. La peur des représailles concernant l'histoire avec Youssef n'était qu'un prétexte pour s'éloigner de nous.

L'entendre prononcer ce nom me rappelle qu'elle non plus n'est pas au courant de ma relation avec Adam.

- Alors je vais te dire, ma chérie : non, ton père ne reviendra pas. Tout d'abord parce qu'il est lâche, et puis parce que s'il nous aimait vraiment, il ne nous aurait pas abandonnées de la sorte.

A présent, elle n'était plus triste mais plutôt en colère. Et il m'a semblé déceler dans son regard une once de désir de vengeance.

- On va lui montrer, Justine, qu'on n'a pas besoin de lui pour aller bien. On va rebondir et s'en sortir. Je vais travailler autant qu'il le faut pour réussir à payer ces factures et on s'en sortira. Toutes les deux, sans lui.

Elle a pris mon visage en coupe dans ses mains et a plongé ses yeux dans les miens. J'ai hoché la tête avec un sourire timide. J'avais envie de la croire.

Après l'avoir enlacée une dernière fois, je suis sortie de la maison et j'ai rejoint Adam qui m'attendait sur le trottoir.

- Hey, a-t-il dit en m'embrassant tendrement.

Je l'ai repoussé doucement. Je n'avais pas envie que ma mère découvre mon couple avec Adam dans ces conditions. Je l'ai alors pris par la main pour l'entraîner à l'écart du champ de vision de ma mère. Sans s'en rendre compte, on s'est machinalement dirigés vers le parc près de chez moi. Une fois arrivés, on s'est assis sur un banc en pierre, près du kiosque. J'ai posé ma main sur la pierre froide, entre nous deux, et Adam l'a recouverte de la sienne. On est restés silencieux durant de longues minutes, écoutant les doux bruits de la nature. Et puis, au bout d'un moment, j'ai décidé de briser le silence en abordant un sujet qui me trottait dans l'esprit depuis qu'on avait commencé à se fréquenter.

- Parle-moi de ta mère.

Adam a levé précipitamment les yeux vers moi, avant de froncer les sourcils.

- Qu'est-ce que tu veux savoir ? Il n'y a rien à dire.

- Arrête, tu sais très bien que ce n'est pas le cas. Il y a tellement de choses à dire à son sujet. Où est-elle ? Est-ce que tu la vois souvent ? Elle te manque ?

- La seule chose que tu as besoin de savoir c'est qu'elle est partie, a-t-il craché en retirant sa main de la mienne. Depuis un moment maintenant. Qu'elle nous a abandonnés, mon père et moi. Je n'ai rien à ajouter, a-t-il conclu en se levant.

- Attends ! ai-je crié en le rattrapant par le bras. J'ai rien fait moi, j'y suis pour rien dans cette histoire. J'estime simplement que j'ai le droit de savoir pourquoi tu as tellement de haine envers elle...

- Parce qu'elle s'est barrée à l'autre bout de la planète du jour au lendemain pour se taper des surfeurs australiens ! a-t-il hurlé.

Il a passé une main dans ses cheveux bouclés, le souffle haletant.

- Voilà pourquoi je la déteste, a-t-il poursuivi sur un ton plus calme. Elle nous a laissés dans la merde, alors que je n'avais que cinq ans. Elle avait une famille parfaite, un boulot stable, on ne roulait pas sur l'or mais elle nous permettait d'avoir une vie décente. Et puis un jour, elle s'est barrée. Comme ça.

A cet instant, je n'ai pas pu m'empêcher de penser à mon père. Son départ précipité, sans aucune explication ou presque. Lui aussi nous a abandonnées, à maman et moi.

- Je n'ai presque aucun souvenir d'elle, a-t-il poursuivi en fixant le sol. Elle m'a envoyé des cartes d'anniversaire jusqu'à mes dix ans environ. Et puis, les années suivantes, elle les envoyait en retard, de plus en plus. Jusqu'au jour où je n'en ai pas reçu. Du tout. (Il a relevé la tête vers moi, ses yeux étaient rougis par les larmes.) Ça doit sûrement te paraître con, mais ces cartes étaient le dernier lien qui m'unissait à elle. Alors quand je n'en ai pas trouvé dans la boîte aux lettres, ni le jour J, ni les jours suivants, j'ai réalisé. J'ai réalisé qu'elle m'avait définitivement oublié.

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hey!

huit. cents. vues.

wow, merci, je...

merci du fond du cœur à tous ceux qui sont là depuis le début (à manonolaizola tout particulièrement), à ceux qui se sont ajoutés avec le temps et à ceux qui n'ont pas encore lu mon histoire mais qui l'ont dans leurs projets.

merci, merci, merci.

xoxo,

mel