Chapitre 22 - Au ralenti

36 3 0
                                    

          L'eau recouvrait peu à peu le sol de la salle de bain mais Haru ne trouvait pas la force de se relever. Les ombres qui s'étaient esquissées derrière son reflet l'avaient terrifié. Il s'agissait de l'une de ses plus anciennes peurs : les silhouettes dessinées dans l'ombre. Quand elle était plus jeune, Haru se souvenait qu'avec son amie Abril, elle jouait souvent au jeu qu'aime tant Philys : Le cache-cache. Cependant il arrivait régulièrement que l'activité soit interrompue à cause de la peur d'Haru. À chaque fois qu'elle décidait de se cacher dans un endroit quelque peu sombre, elle finissait par se tétaniser de peur à la vue d'une silhouette s'apparentant à un homme. Abril lui répétait que ce n'était que les objets dans le noir qui formaient ces ombres terrifiantes mais depuis, la jeune femme a gardé cette peur au plus profond de son être.

          L'eau qui se répandait sur le sol finit par passer sous la porte de la pièce...

          Haru restait assise, sa tête posée entre ses bras. Les silhouettes qui étaient apparues dans le miroir lui étaient familières. Elle pensait les avoir reconnus mais cela n'empêchait pas sa peur de se manifester...

          Quelques minutes s'écoulèrent avant que la jeune femme ne redresse enfin sa tête. L'eau de la baignoire recouvrait l'intégralité du sol de la salle de bain et allait même au de-là. Haru réagit et se leva pour stopper la catastrophe mais dès lors où son regard croisa son reflet dans l'eau... Les deux silhouettes refirent leur apparition et la pétrifièrent. Elles étaient là, fixes et livides, presque dénuées de vie. On pouvait distinguer leurs yeux par des zones lumineuses. Haru respirait bruyamment et approcha lentement sa main du robinet pour couper l'écoulement. Son regard ne lâchait pas les deux personnes qui semblaient se trouver derrière elle. Son souffle devint plus lent, plus silencieux. Puis, c'est tout en gardant ses yeux ouverts qu'elle fit d'un geste rapide apparaître sa faux avant de se retourner dans le même élan pour faucher les deux intrus. Le vide fut la seule victime de son arme...

          Haru souffla d'incompréhension et éleva sa voix : « Montrez-vous ! ». Son regard parcouru timidement la pièce. Elle s'avança lentement près du miroir, ses pieds créant des ondes dans l'eau à chaque fois qu'ils se posaient doucement sur le sol. L'une de ses mains se plaça sur le rebord du lavabo tandis que l'autre gardait bien fermement sa faux. Lentement, Haru redressa sa tête et affronta le regard des deux silhouettes qui la guettaient, juste derrière elle... Un soupir s'échappa de sa bouche puis elle fit disparaître sa faux lorsqu'elle comprit qu'il s'agissait bel et bien des deux âmes qui l'habitaient. Visiblement ici, elles ne pouvaient se manifester que de cette manière.

          La jeune femme les dévisageait, maintenant qu'elle ne les craignait plus. Elle tenta de comprendre ce que leur présence voulait signifier mais en vain. Celles-ci restaient immobiles telles des statues.

Elle fut soudainement déconcentrée lorsqu'elle entendit toquer à la porte :

— Haru ?! Tout va bien ??? La moquette est trempée ! paniqua la mère.

— Oui oui tout va bien ne t'en fait pas ! Je nettoierais ! répondit-elle, gênée.

La mère repartie en soufflant tandis qu'Haru baissa son regard vers le sol et y bougea légèrement ses pieds. Il y avait presque deux centimètres d'eau qui recouvraient le sol.

          La jeune femme soupira tristement avant de sortir de la salle de bain pour voir les dégâts dans sa chambre. La moquette était imbibée d'eau... Haru rejoignit le couloir pour aller chercher un balais serpillère dans le placard et une fois de retour dans sa chambre, elle essaya de retirer l'eau du sol. Elle y parvint partiellement.

          C'est bon ! Elle pouvait enfin profiter de son bain. Elle posa le balai dans un seau et entra dans la salle de bain. Calmement, Haru verrouilla la porte et retira ses vêtements sales et abîmés qu'elle posa par la suite sur l'un des petits meubles en bois de la pièce. Elle sortit une serviette puis après avoir retiré un peu d'eau de la baignoire, elle s'y installa confortablement. Au contact de l'eau tiède avec sa blessure, la jeune femme avait senti de légers picotements mais quelques minutes avaient suffi pour qu'elle ne sente plus cette petite douleur. Elle ferma alors ses yeux et pensais fortement à sa petite sœur, toujours endormie. Le temps passait lentement, l'eau de la baignoire s'était troublée et certaines bougies s'éteignaient. La jeune femme avait gardé ses yeux fermés, appréciant ce moment. Cependant, le sourire qui s'était dessiné sur son visage disparu soudainement lorsque la jeune femme ouvrit grand ses yeux : Mais pourquoi n'y avais-je pas pensé plus tôt ! se dit-elle. Haru se leva et retira l'eau de la baignoire avant de rapidement se laver cheveux et corps à l'aide du pommeau de douche.

Les mysteres du Bois WillowWhere stories live. Discover now