Chapitre 51 : Je suis fatiguée

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Je n'aurais jamais autant couru de toute ma vie que dans ces dernières vingt-quatre heures. Savoir qu'Amaël peut être en danger me fait sortir de ma zone de confort. Pour une fille qui ne fait jamais de sport et qui n'aime pas cela par ailleurs, mon corps est plutôt endurant. Contrairement à l'allée, Borac traîne des pas derrière moi. Il souffle épuisé de notre marathon dans les bois. Je peux le comprendre. C'est comme si on avait fait que ça, aujourd'hui.

— Amaël ne va pas s'envoler donc tu peux ralentir la cadence. Il nous attendra sagement dans la maison de ses parents et tout va bien se passer, déclare Borac en haletant.

— On ne sait jamais. Alors, s'il te plaît, rassemble toutes les forces qu'il te reste et avance.

Je fais quelques foulées quand tout d'un coup je m'arrête, plus très sûre de moi.

— Quelle direction dois-je prendre ?

— Va à gauche et on y est presque donc ralentis le rythme, car, avec tes pas de baleines, tu vas nous faire repérer !

Je le fusille du regard. Comment ça, mes pas de baleines ? Je sais très bien que je n'ai pas la démarche d'une danseuse, mais quand même il exagère ! Il y a des façons plus polies de dire que je fais trop de bruit en courant.

Nous nous approchons à grands pas de la maison d'Amaël, car je reconnais les dalles rassemblées en forme d'étoiles qui sont la caractéristique de sa route. Je me souviens que nous avons emprunté ce même chemin pour aller dans la direction du domicile de mes parents.

En levant les yeux, je découvre que cette dernière est entièrement éclairée. Très étrange sachant qu'Amaël devrait faire profil bas plutôt que d'attirer tous les gardes en transformant sa demeure en boule à facette.

Soen ou Amaël n'aurait jamais laissé la lumière allumée, sauf si la guerre est déjà finie.

C'est pleine d'espoir que j'entre en essayant de me faire la plus discrète possible. Borac est sur mes talons et regarde instinctivement à droite et à gauche si jamais des personnes nous observent.

— Amaël, tu es là ? murmuré-je en pénétrant à l'intérieur du salon.

— On devrait faire demi-tour, chuchote à son tour Borac à mon intention. Je ne le sens pas du tout.

— Non, dis-je en haussant un peu le son de ma voix. Amaël nous a demandé de le rejoindre, alors je ne bougerais pas tant que je ne l'aurais pas trouvé.

Face à ma détermination, Borac s'avoue très vite vaincu. Il faut admettre que, quoi qu'il dise, je ne serais jamais sorti d'ici tant que je n'aurais pas vu celui qui nous a convoqués. C'est en avançant vers la cuisine que je constate qu'une bagarre a eu lieu. De nombreuses tasses et autres assiettes sont cassées en mille morceaux sur le sol. Les chaises et la table ont été violemment poussées vers la buanderie. Toute la pièce a été saccagée. Paniquée, je ne peux m'empêcher de hurler.

— Amaël !

Quelques instants après, Borac crie mon nom et me demande de venir en direction des chambres. J'arrive en courant vers l'endroit indiqué et je le découvre assis par terre à côté d'un corps que je reconnaîtrais entre mille.

Mes larmes et mes rugissements font sursauter Borac, qui appuie ses doigts contre le cou d'Amaël afin de surveiller son pouls, enfin s'il en a toujours un.

Je m'agenouille à ses côtés et regarde le sang se déverser petit à petit sur le sol. Il a une profonde entaille au niveau du ventre et l'odeur qui s'en échappe me donne le haut-le-cœur.

— Il est vivant, déclare Borac pour soulager ma peine, mais il est sacrément mal en point. Je vais faire quelque chose pour son abdomen, ne bouge....

Dans les songes de Kaelia [Terminé]Opowieści tętniące życiem. Odkryj je teraz