The Lords of the Silver Fountains - bagginshield

II - Les grandes retrouvailles

Quand Thorin se réveilla, il était couché dans un lit moelleux, dans une pièce sûrement nouvellement emménagée, dans la montagne solitaire. Il paniqua sur le coup, se croyant perdu, que tout n'était qu'un rêve. Il tenta de se redresser d'un coup, mais une main sur son torse nu l'en empêcha doucement.

- Vous avez encore besoin de récupérer.

Thorin reconnût immédiatement la voix calme de Balin, son fidèle ami et conseiller. Le roi lui adressa un sourire chaleureux.

- Vous êtes passé à deux doigts de mourir, vous savez. Mais par dieu-sait-quel miracle, vous...

Il n'en fallût pas plus pour qu'il éclate en sanglots.

- Allons donc, Balin, ressaisissez-vous!

Thorin éclata d'un rire inespéré. presque aussitôt, la porte de la chambre s'ouvrit en trombe laissant passer Bilbo, la mine inquiète comme pas possible. Balin s'éclipsa pour aller annoncer la bonne nouvelle aux autres. Aussitôt que Balin ferma la porte, le roi s'assit dans son lit en grimaçant, ce qui exposa son torse musclé entravé d'une cicatrice refermée, qui fit rougir violemment le brave hobbit.

- Heureux de voir que vous êtes réveillé., bredouilla-t-il de peine et de misère.
- Comment de temps ai-je donc dormi?
- Eh bien, plusieurs jours, il faut croire...
- Plusieurs jours? Mais que s'est-il donc passé durant mon sommeil?

Bilbo lui relata alors les événements survenus suite à la perte de conscience du nain; l'arrivée des secours, Thorin divaguant dans une civière, la découverte de la blessure déjà guérie, ses longues heures de délire...
Puis son air devint grave.
Le cœur de Thorin s'emballa d'inquiétude.

- Des pertes?, demanda-t-il soudain.

Bilbo baissa les yeux, ne sachant pas trop comment, avec diplomatie, lui annoncer.

- Bilbo...

Il se saisit des mains du hobbit, qui sursauta avant de plonger ses yeux sombres dans ceux du nain, bleus et étincelants.

- Je- je suis tellement désolé, Thorin.

Les larmes se remirent à couler, ces maudites larmes, qui ne semblaient plus vouloir le quitter depuis la Bataille des Cinq Armées. Il reprit son souffle avant de poursuivre.

- Comme vous le saviez déjà, Fíli est tombé...

Le cœur de Thorin Oakenshield manqua un battement. Il appréhendait les prochaines paroles.

- Kíli est mort... Oh Thorin, je suis si désolé...

Ce fut l'effondrement du monde. autour de lui, tout basculait. Les couleurs lui brûlaient les yeux, son champ de vision se floutait. Sauf lui. Bilbo. La seule chose qu'il voyait clairement. La seule personne qu'il savait vivant. La seule personne à laquelle s'accrocher.

S'accrocher.

Il posa doucement sa main sur la joue de l'ancien cambrioleur, tentant d'attraper une larme fugitive au passage. Celui-ci resta interdit puis la porte s'ouvrit laissant entrer dix nains à la fois enjoués, à la fois endeuillés. Balin, Dwalin, Bofur, Bombur, Bifur, Oín, Gloín, Ori, Nori et Dori s'engouffrèrent dans la petite pièce, là où Thorin avait -à contrecœur- lâché la main et la joue de Bilbo.
Ce dernier quitta la chambre sans bruit, un sourire fugitif au bord des lèvres. Il avait, bien sûr, omis de tout, absolument tout raconter au roi.
Il ne lui avait pas dit qu'il avait passé ses nuits et ses jours au chevet du nain, le quittant seulement brièvement pendant les heures de repas, où des gentilles naines infirmières s'occupaient de lui changer ses bandages.
Qu'il avait exigé être prévenu aussi tôt que possible s'il se réveillait lors d'une de ses rares absences.
Qu'il fallût à Balin beaucoup trop de courage et de ténacité afin de convaincre le semi-homme de se reposer.
Qu'il avait insisté à le veiller la nuit, pour l'observer tantôt absorbé à un sommeil paisible, tantôt en proie à un sommeil agité.
Que pendant son délire, il l'entendait murmurer son nom, qu'il aggripait sa main.
Qu'une fois, il était si épuisé qu'il se laissa tomber aux côtés de lui lorsqu'il dormait, pour se réveiller entouré de son bras rassurant et son nez enfoui délicieusement dans ses boucles ambrées.
À quel point il était heureux de le retrouver, sain et sauf.