40 | Au point de départ.

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Cela fait un moment que j'essaye d'émerger de la torpeur dans laquelle je suis – j'ai été – plongée. Mais je n'y arrive pas, et j'imagine qu'il y a plusieurs raisons à ça. Prenons le temps d'y réfléchir, vous voulez bien ? Arrêtez-moi si je me trompe, mais je suppose que la première est que je suis tellement sous le choc que je tente de rester dans le déni tant que je le peux. Comment faire face, sérieusement ? De quelle façon le feriez-vous ? Sauf qu'en même temps, l'endroit dans lequel je me trouve est effrayant. Vous souvenez-vous de ce monde étrange et sombre dans lequel je vivais lorsque j'étais dans le coma ? J'en ai parlé au début de l'histoire. Sachez que j'ai l'impression d'y être à nouveau. Je me sens détachée de mon corps, comme flottant dans ces ténèbres avant qu'elles ne me tirent vers le bas, loin de tout espoir de retrouver la lumière. Depuis les profondeurs de mon esprit, je crois que je peine à respirer tant l'angoisse me submerge. Comprenez mon effroi, s'il vous plaît. J'ignore ce qu'il s'est réellement passé, mais je ne veux pas revivre ainsi ! Je ne pourrais le supporter !

Alors réveille-toi, Taylor. Tu n'auras pas à le faire.

Je sais ! Mais il m'a fait ça !

Il te faudra affronter cette réalité tôt ou tard.

Ai-je une autre option ?

Non. D'autant plus que tu es consciente, à présent. Il ne te reste plus qu'à ouvrir les yeux.

Putain de bordel de dieu de merde !

Ouais. C'est le moment de vérité.

***

— Bon retour parmi nous mademoiselle Davis, m'accueille la voix professionnelle de l'agent Malone pendant que je cligne plusieurs fois des paupières avec hésitation.

Je suis vivante, donc. Mais forcément il faut que tu sois encore là, toi. Pardon de ne pas me réjouir, je suis sûre que tu comprendras.

La forte luminosité dans la pièce me fait immédiatement comprendre que nous ne sommes plus dans l'appartement d'Evan. En effet, malgré qu'il ne possède manifestement aucun talent de décorateur – chacun son métier – il n'y a quand même pas de néons au plafond, chez lui. Non, je suis...

Tu n'as pas fait ça ?!

Réalisant que je suis de retour au point de départ, je me redresse brutalement et suis saisie par un vertige qui dépasse tout ce que j'ai connu jusqu'à présent. Croyez-moi lorsque je vous dit que ce n'est pas peu dire puisque j'en ai expérimenté un paquet. Mon corps à peine soulevé s'en retourne violemment rejoindre le matelas tandis qu'un gémissement aussi douloureux qu'inquiet m'échappe.

Ça n'a aucun sens ! C'est pourquoi as-tu déployé autant d'efforts pour me sortir d'ici si c'était pour m'y ramener ?!

— Restez tranquille, reprend la jeune femme que je distingue à peine tant ma vue est brouillée.

Ne me dis pas ce que je dois faire !

Soyons clairs que mes pensées ne sont absolument pas en adéquations avec mes réactions corporelles, à cet instant. Sauf peut-être avec mon pouls, fidèle compagnon malmené depuis ma rencontre avec Evan. Peu importe la violence de mes pérégrinations intérieures, je reste immobile tout en ayant l'impression d'être verrouillée sur un manège à sensations fortes.

— Elle est réveillée, annonce la voix d'Ariana, probablement au téléphone.

Est-ce que c'est lui que tu appelles ?

Si tel est le cas, il est hors de question qu'il me voit dans cet état. Par dessus tout, je veux être en capacité de le confronter. Qu'importe ses raisons ou ce qu'il dira, je me comporterai en Davis. Indépendamment de la tournure des événements, je serais la digne fille de mon père. J'agirai ainsi que ma mère me l'a enseigné avec tant de soin. Je ne renverrais que dignité, pondération...

L'autre côté de la porteWhere stories live. Discover now