Chapitre 2

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     Je respire un grand coup. Je souffle. Faut que je me reprenne. Je me dirige vers mon garage à l’arrière de mon immeuble avec les jambes flageolantes. Mes mains tremblent tellement que je n’arrive pas à mettre la clé dans la serrure.

- Calme-toi ! T’as plus 15 ans !

     J’ai beau me sermonner, rien n’y fait. Mon cœur bat à cent à l’heure et la boule qui s’est formée dans ma gorge ne veut pas s’en aller.
     Je secoue mes bras pour évacuer la tension et enfin j’arrive à ouvrir cette fichue porte. En voyant ma bécane je reprends pieds. Je sors ma Ducati, ferme le garage et une fois assise dessus et le moteur qui ronronne je recommence à respirer.

- Allez ma chérie, on va aller évacuer ce coup de stress ensemble, lui dis-je en enfilant mes gants et mon casque intégral.
    Et oui je parle à ma moto. C’est mon trésor, ma confidente et surtout mon exutoire.
     Je remonte l’allée et en repassant devant l’entrée du bâtiment, je le vois en train d’ouvrir la portière d’une Porsche. Je passe en trombe à côté de ce monstre en lui taillant un short. Ce que ça fait du bien de se défouler ! Je l’aperçois dans le rétro en train de lever les bras en l’air. Il a dû se pisser dessus ce connard. Bien fait !
   Quand j’arrive à la boutique , Nono fait les cent pas devant la vitrine. Elle est en train de s’exciter sur son téléphone comme une hystérique. À peine garée elle me saute dessus.

- Punaise ça fait une demi-heure que je poireaute devant ! J’ai cru qu’il t’était arrivé quelque chose ! T’aurais pu me prévenir, s’énerve-t-elle.
- Du calme Nono, lui dis-je une fois mon casque retiré. Alors de une, quand je suis à moto j’aurai  du mal à te téléphoner en même temps que je roule, et de deux, il m’est effectivement arrivé quelque chose de grave !

    Elle me scrute de la tête aux pieds, fait une grimace et me répond :
- Sept ans de malheur ? Me demande-t-elle.
- Hein ?! M’étonné-je en me demandant si je n’étais pas la seule à  être tombée du lit.
- Ben, vu ta tête et ta dégaine je me dis que t’as cassé ton miroir ce matin ! Se moque-t-elle.
- T’es con… non ça, dis-je en me pointant du doigts, c’est à cause de Wattpad. Et le retard un peu aussi, mais surtout parce que j’ai dû faire un petit détour pour me défouler.

     J’ouvre le verrou de la porte d’entrée et invite Noémie à entrer. Et oui Nono c’est ma super copine du collège. On s’était perdues de vue à partir du lycée, moi ayant intégré une filière en économie, elle une filière générale. Lorsqu’il y a un an j’ai ouvert ma boutique de lingerie sexy, je pensais m’en sortir toute seule. Mais au bout de deux mois seulement, entre l’afflux de clients, la compta, les commandes, je ne m’en sortais plus. Alors j’ai mis une annonce à Pôle emploi pour trouver quelqu’un pour m’épauler trois jours par semaine. Quelle n'a pas été ma surprise quand j’ai reçu le CV de Nono. Direct je l’appelai en me présentant comme la responsable de la boutique sans donner mon nom et lui donnai rendez-vous à la fermeture. Vous auriez vu sa tête quand elle m’a  découverte derrière le comptoir, on aurait dit que ses yeux allaient sortir de sa tête .

- Chrissy ?
- Coucou Nono ! Lui répondis-je toute heureuse de la revoir.
- Tu bosses ici ? Continua-t-elle en souriant.
- Oui… enfin… c’est ma boutique ! Dis-je toute fière.
- Oh ben ça alors !
- Allez viens , je te fais visiter et après on se boit un café dans l’arrière-boutique.

     Notre complicité était intacte malgré la presque dizaine d’années qui s’était écoulée. Elle avait perdu son job de vendeuse dans une boutique de vêtements qui venait de faire faillite et elle cherchait justement un mi-temps . Ça coulait de source que je n’allais pas prendre quelqu’un d’autre qu’elle.

- Bon, tu m’expliques à la fin ce qui t’a fait stresser au point d’arriver avec une demi-heure de retard ? S’impatiente-t-elle.
- …
Comment lui dire… elle était présente… elle sait… comment va-t-elle réagir ?
- Alors !! Commence-t-elle à s’énerver en tapant du pied.
- Adam… lâché-je d’une toute petite voix en baissant la tête.
Là, ses yeux s’écarquillent, elle bafouille quelque chose, se prend la tête entre les mains
- Adam… Adam… Ton « Adam » ? Le connard ? Vocifère-t-elle.

    Je hoche la tête pour acquiescer. Mais rien que d’entendre son prénom, ça me met dans tous mes états.

- Putain ! Et ? Accouche ! Quoi « Adam » ? S’impatiente-t-elle.
- Il était dans le hall de mon immeuble ce matin.
- Mais…hein ? Il y foutait quoi ? Me demande-t-elle en haussant les sourcils.
- Y avait des ouvriers avec mon nouveau voisin, ainsi que des costards-cravates, dont Adam. Je pense que ça doit être des architectes ou un truc du genre. Sûrement pour la rénovation du logement.
- Bordel ! T’es vraiment  maudite ma pauvre, dit-elle dépitée.
- Faut croire… dis-je résignée.
- Et alors… il a changé ?
- Malheureusement,  non. Toujours aussi mignon, si ce n’est plus, me lamenté-je.
- Dommage, y a vraiment pas de justice sur cette terre ! Attends ! Y a qu’à la faire ! S’écrie-t-elle.
- Comment ça ?
- Ok… ça fait quinze ans, mais je sais que ça t’a foutu en l’air cette histoire à l’époque et aujourd’hui… ben…(elle me regarde de haut en bas), tu es très très loin de la petite Christine du collège ! C’est l’heure de la vengeance ! Dit-elle avec un air démoniaque en se frottant les mains.
- Et c’est quoi ton idée de « vengeance » ?
- Chrissy, Chrissy, laisse faire la pro ! D’abord va falloir faire une petite enquête. Où il habite, son métier, est-il célibataire, des gosses, quelle bagnole…
- Ça je sais ! Une Porsche Cayenne, dis-je fière de savoir quelque chose de peut-être utile.
- Ok ! Déjà la Porsche sera le plan B !
- Le plan B ?
- Oui, enfin, je vais trouver quelque chose de bien horrible à lui faire, j’espère.  Mais si jamais ça ne marche pas , on pourra toujours lui pourrir sa caisse. Ça fait merdeuse, mais quoi de plus important pour un homme que sa voiture… et une Porsche de surcroît !
- OK !
- Et bien dis donc ! T’es jamais d’accord avec mes plans d’habitude ! Il va falloir que je me surpasse cette fois ! Dit-elle enjouée.
- Franchement, rien que de penser que je risque de le croiser en rentrant chez moi, j’ai envie de gerber. Je sais pas si le voir souffrir me fera oublier le passé, mais ça ne pourra pas me faire de mal, alors t’as carte blanche !
- You hou ! S’égosille-t-elle en applaudissant. Il va en chier le Adam !

Shaky Loveحيث تعيش القصص. اكتشف الآن