Chapitre 19

290 44 0
                                    

   
     Oh la la ! Quelle nuit d’enfer ! Je n’ai fait que des cauchemars toute la nuit. Et tous avec… je vous le donne dans le mille : Adam ! Je ne vais pas entrer dans les détails, sinon cela risque de me hanter toute la journée, mais cela impliquait lui, moi, sa voiture, un lit, une porte, un mur… Bref, le grand n’importe quoi !
J’ai la tête dans les chaussettes, il faut que je me reprenne, le samedi est la plus grosse journée de la semaine. 
      Avant de choisir ma tenue, je jette un coup d’œil par la fenêtre. Le ciel est dégagé ! Enfin une bonne nouvelle ! Je file sous la douche, fraîche la douche, histoire de réanimer mes neurones, puis fonce lancer ma machine à café avant de faire cesser les ”pouics” de mes deux petites cochonnes, qui n’ont plus rien à manger. C’est dingue ce qu’elles sont voraces ces petites bestioles.
     J’enfile un slim par-dessus mes bas, une petite blouse à paillettes vert sapin et retourne dans la salle de bains pour un petit ravalement de façade, histoire d’effacer les traces de cette nuit blanche.
      Une fois prête dans l’entrée  j’hésite à sortir. Manquerait plus que je croise celui-dont-on-ne-doit-plus-prononcer-le-nom. Si jamais il me voit avec mon casque à la main, il ne lui faudra pas deux heures pour comprendre que l’auteur de toutes ses mésaventures c’est moi. En même temps ça ne bosse pas le samedi les mecs du bâtiment,  si ?!
     Je consulte l’heure sur mon portable ( que je n’oublie pas cette fois) et me rends compte que je n’ai plus le choix, il faut y aller. Dernière vérification : casque, check, sac à dos, check, clefs, check, gants… Bordel, ils sont où ?! Je me tape le front en les voyant dépasser de mon casque, je précise, à leur place habituelle  quoi !
    Hop, hop, hop, comme dirait Nono. J’ouvre ma porte avec précaution et passe la tête par l’entrebâillement. La voix est libre ! Je verrouille ma porte et dévale les escaliers à toute blinde.
Arrivée dehors je souffle de soulagement. Je ne l’ai pas croisé, ouf ! Je trottine joyeusement jusqu’à l’antre de ma bête, ça va vraiment être une chouette journée, je le sens !
      Lorsque ma moto est prête pour le départ, j’enfile casque et gants et l’enfourche. J’adore cette sensation de ne faire qu’un avec mon bolide. Je fais vrombir le moteur plusieurs fois et je passe la première en démarrant sur les chapeaux de roues. Au moment où j’arrive à la sortie du parking, je manque de peu de percuter un piéton suicidaire. Punaise, c’est pas comme si j’avais un véhicule électrique ! Merde, ça fait du bruit une moto, il est bouché ce con, c’est pas possible ! Adam !

- Putain c’est pas vrai ! Hurle-t-il en secouant ses mains devant lui, dont l’une d’elles tenait apparemment un gobelet de café. Encore vous ?!

     Oh la la, je dois me tirer illico presto. Je le contourne et mets les gaz afin de m’échapper avant qu’il ne me reconnaisse.

- Attendez ! S’égosille-t-il en tentant de me poursuivre en courant.

    Ouf j’ai eu chaud cette fois !

     À peine suis-je arrivée à la boutique que ma meilleure amie me saute dessus. Impossible de la faire patienter plus longtemps, alors je lui raconte tout, de Bertrand à Julien et aussi d’Adam, de ses excuses et de mes cauchemars. Rien n’est mis de côté car il me faut son avis. Alors que je termine par mon presque accident, en même temps que j’enfile ma jupe crayon, Noémie me dévisage.

- Alors ça ! Je reste sur le cul ! In-croy-able !
- Tu en penses quoi ? Demandé-je impatiente d’entendre son jugement.

    Elle m’attrape par les épaules en me secouant comme un prunier en lâchant un ”enfin”  strident puis elle me serre contre elle comme une forcenée.

- Ar-rê-t-t-t-e No-no. Je peux plus res-pi-rer !
- Pardon , s’excuse-t-elle en relâchant son étreinte. Mais je suis si fière de toi !
- Tu penses que j’ai eu raison de lui pardonner ? Demandé-je sceptique de sa réaction.
- De quoi ? Oh, mais non ! D’avoir embrassé Julien ! Et d’avoir pris l’initiative pour une fois.
- Ah…

    Je n’ose pas relancer le sujet qui me préoccupe le plus et retourne dans la boutique pour aller ouvrir la porte d’entrée. Lorsque je me retourne, je me retrouve face à  une Noémie au visage grave.

- Comment ça, ”ah” ? Mime-t-elle les guillemets. Tu déconnes ? ! Tout ce que tu retiens de la soirée c’est ton entrevue avec l’autre abruti, alors qu’un mec super canon te fait la cour ?

    Elle me jauge, les bras croisés, en tapant du pied. J’ai l’impression de me retrouver devant mon paternel quand j’avais douze ans et un bulletin pas terrible.

- Je sais pas, réponds-je d’une voix de petite fille coupable.
- Bordel Christine ! M’hurle-t-elle dessus en recommençant à me secouer par les épaules. Faut te réveiller là ! C’est pas un putain de roman à l’eau de rose où le badboy tombe amoureux de la jeune fille naïve, mais la putain de vraie vie où les connards restent des connards ! Même s’il s’est excusé, même s’il a des remords, même si son explication quant à son jeu pourri de notation de gonzesses passe, bon sang ! Ouvre les yeux, c’est un don Juan qui n’en a rien à  foutre de la nana, du moment que ça le mette en valeur devant ses collègues. C’est bien ce qu’il t’a dit en plus ! Il a besoin d’attirer l’attention. Quoi de mieux que de se faire la copine du patron du Cube, surtout lorsque cette dernière l’a jeté devant toute l’assistance.

     Un silence pesant prend place à la fin de son remontage de bretelles. Je me sens honteuse, j’ai la tête baissée et je n’ose plus la regarder. Je joue avec mes doigts en méditant sur ses paroles. J’ai du mal à l’admettre, mais malheureusement il faut se rendre à l’évidence, Adam n’est pas fait pour moi. En me l’avouant je me rends compte que, oui, quelque part, tout au fond de mon petit cerveau détraqué, j’ai eu comme un espoir que, peut-être , il pouvait réellement s’intéresser à moi.

- Je suis désolée, disons-nous simultanément.
- Non c’est moi, commence Nono. Je ne veux pas qu’on se fâche, mais… Christine je t’adore et j’aimerai tellement te voir heureuse.
- Je sais j’ai… Je ne sais même pas ce qu’il me passe par la tête des fois.
- Tu crois que tu as encore des sentiments pour lui ? Me demande-t-elle sur un ton plus doux.
- Je ne crois pas. Ça doit être mon esprit revanchard je pense.
- OK, et Julien dans tout ça ? Tu l’as quand même embrassé !

     Je rougis en repensant à mon initiative si éloignée de mon comportement habituel.

- C’était comment ? Continue-t-elle. Allez raconte !
- C’était… bizarre.

    En voyant ses sourcils se hausser je poursuis avant qu’elle ne me coupe la parole.
- C’était la deuxième fois que j’embrassais un garçon, euh, un homme. C’est peut-être à cause de ça, je n’en sais rien, mais ça m’a comme électrocuté, et c’était vraiment bien. Rien à voir avec la première fois où j’étais bourrée. J’avais envie de recommencer encore et encore, terminé-je en passant la pulpe de mes doigts sur mes lèvres.

    Noémie a un sourire jusqu’aux oreilles et moi… aussi ! Je dois avouer que rien  qu’en y repensant, je me sens à nouveau bizarre. Ça me donne comme des frissons et je ressens une sorte de flottement.

- Et vous vous revoyez quand ?

     Le carillon de l’entrée me sauve car n’ayant pas de réponse à sa  question, je la vois bien me harceler pour que je fasse le premier pas, et ça, hors de question ! J’ai déjà  fait beaucoup d’efforts, maintenant c’est à son tour.

Shaky LoveWhere stories live. Discover now