Chapitre 1 (6) : Le peintre assis devant sa toile

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J'ouvre les yeux.

Et me redresse aussitôt, le coeur battant.

Je suis allongée dans le lit qu'on m'a attribué, seule dans la chambre. A peine éveillée, je reprends lentement le contrôle de mon souffle.

Concentre-toi sur quelque chose de calme. La texture des draps. La musique, diffuse, faible, qui se fait entendre, provenant d'un vieux poste de radio crachotant quelques notes comme son chant du cygne. Je ferme les yeux. Inspiration lente.

Je suis en vie.

Mais je ne m'y trompe pas, le fait que je sois entièrement habillée est une preuve que ce n'était pas un cauchemar.

Quelqu'un a essayé de me tuer, et ce malgré les interdictions de Monokuma. Quelqu'un, parmi nous, n'a même pas assez de race pour respecter les ordres de notre tortionnaire, et comble de l'ironie je n'ai rien sur lui. Dissimulé dans les ombres, il, ou elle, a bien fait en sorte de ne surtout pas se faire voir. Taille ? Entre Sabbatius et Jaako. Poids ? Entre Evelyn et Jaako. Force ? Ouais, okay, probablement pas Evelyn, quoique...

Je l'ai repoussé plutôt aisément.

Un frisson secoue mon dos. Je hais ça. Je quitte le lit sans me presser, et fait craquer ma nuque.

Voulait-il me tuer, ou bien n'était-ce qu'un macabre avertissement, une sorte de moquerie pour me préparer à la Tuerie ? Qui sait, c'est peut-être le jeu de Monokuma, faire croire que je suis intouchable pour mieux m'éliminer en face de tous.

Mmmmmh, vous la sentez la grosse douille ?

Je quitte la chambre sans regret après avoir chargé mon violon sur mon dos. Mes doigts glissent sur quelques un des pins. Pourquoi des pins de couleur, si ce n'est pour apporter quelque fantaisie dans un monde fait de noir et de blanc ?

Une fois dans le couloir, je tombe directement sur Edel. Il m'adresse un air grognon et froid, habituel de sa part. Ce à quoi il ne s'attendait probablement pas, c'est que je recule d'un pas. Tant que je n'aurai pas déterminé qui est dangereux et qui ne l'est pas, je compte garder mes distances. Au moins Shailey semble de mon côté, si c'est elle qui m'a ramenée dans mon lit du moins. C'est la seule dont je peux être sûre qu'elle n'y est pour rien.

- Y a un souci, Ichiko ?

Je hausse un sourcil. Tiens, il fait une drôle de tête. Il est vexé ? Tant mieux pour lui, je ne jouerai pas à calmer les sensibilités de chacun. Pas aujourd'hui, en tout cas.

- Rien. Toi d'abord, mec.

- Meuf.

Je hausse les sourcils, et lui...enfin, elle, je suppose, retrousse sa manche, dévoilant un bracelet rose enveloppant son poignet.

- Elle.

- Pas de souci. Toi d'abord quand même.

Elle sourit joyeusement, et se dirige vers les escaliers. J'ai déjà vu ces bracelets, jadis. Utilisés par les personnes genderfluid, c'est à dire qui changent de genre comme de chemise, pour que les autres puissent identifier leur genre du moment. Donc c'est elle aujourd'hui, pas de souci, ça ne change rien pour moi.

Une fois descendues d'un niveau, nous rejoignons le réfectoire, et entrons. Tout le monde est là, comme attendu. Tout le monde...

L'agresseur est parmi eux.

Derrière un de ces visages amicaux, hostiles, cruels ou bienveillants, il y a quelqu'un qui a tenté de me tuer avec des couteaux. Superbe. Comme si j'avais besoin d'une once de paranoïa supplémentaire. Mon regard se pose sur Evelyn, qui m'adresse un pâle sourire. Puis-je lui faire confiance, même à lui ?

Danganronpa : Sacrement SépulcralOnde histórias criam vida. Descubra agora