XXIV - Captive

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Je suis réveillée par de l'eau froide qui heurte mon visage. J'inspire profondément et ouvre grands les yeux. Je me redresse avec quelques douleurs éparpillées sur tout mon corps. Je souhaite m'essuyer le visage  d'un revers de la main mais je remarque être attachée à une chaise en fer forgée. Je relève la tête en tirant sur mes liens pour finalement faire face au Gouverneur de Dysteria, Tadëus.  

— L'eau n'est-elle pas meilleure chez nous ?

Il jette la bassine à côté de lui. Je suis dans une grande pièce, il semblerait qu'il n'y ait que lui et moi. Je comprends rapidement que je ne pourrai pas sortir de cette pièce facilement. 

— Qui est l'homme qui a récupéré ma broche ?

— Votre broche ? Répété-je. Êtes-vous certain que c'est votre broche ?

Il s'avance vers moi, se penche en avant et pose ses mains sur le dossier de la chaise. Son visage à quelques centimètres du mien, il plonge ses yeux ténébreux dans les miens. 

— Ne jouez pas à cela avec moi, pas en étant attachée dans une salle de torture. 

Je regarde autour de moi. Effectivement, il n'y a pas un seul meuble, le sol a été lavé il y a peu pourtant une marque rougeâtre tâche encore les dalles, il n'y a que ma chaise et la bassine d'eau vide. Où est donc toute son artillerie ? Tous ses objets de torture ? Est-ce de la manipulation ? 

Je replonge mes yeux dans les siens, les lèvres retroussées puis je lui crache au visage. Il a un mouvement de recul automatique et essuie son visage avec sa main tout en grimaçant. 

— Je ne suis pas comme votre peuple soumis, vociféré-je. 

Il regarde sa main puis moi, toujours cet air renfrogné sur le visage, avec cette étincelle d'amusement dans le regard. 

— J'adore les femmes insoumises.

Il me tourne le dos puis ouvre chaque fenêtre, il doit y en avoir au moins six dans cette grande pièce. L'air chaud entre dans celle-ci. Sa demeure est bien la seule qui comporte des fenêtres. On y voit là sa richesse. 

— Bonne nuit, étrangère. 

Il quitte les lieux et verrouille la grande porte derrière lui. Je crois l'entendre ordonner à l'un de ses gardes de surveiller les lieux. Je pourrais m'enfuir, je pourrais utiliser mes pouvoirs pour me libérer. Mais si je les utilise, j'appelle Lucius. Si je les utilise, les Ténèbres continueront de se frayer un passage dans mes veines, pour poursuivre leur ascension vers mon coeur et le noircir de leur impureté. 

Je penche la tête en arrière et fixe le plafond voûté au dessus de moi. C'est un dilemme déchirant. Je suis plus forte que ce Gouverneur, mais à la fois si faible face à l'immensité de ce qui m'habite... Qu'a-t-il fait lorsque je n'étais qu'un bébé ? Pourquoi me demandait-il d'arrêter de pleurer ? M'a-t-il maudite ? 

J'ai tant de questions à poser, cependant je n'en ai pas la possibilité et je suppose que Lucius ne me répondrait pas sincèrement. Alors je dois vivre avec, avec toutes ces questions qui malmènent mon esprit depuis que j'ai découvert qui j'étais réellement. Laora ? Ce prénom résonne encore dans ma tête, est-ce mon vrai prénom ? Est-ce quelqu'un d'autre ? 

Je ferme doucement les paupières, je suis mal assise, j'ai mal au ventre car je meurs de faim, et mon corps est terriblement douloureux. Tant de personnes m'ont piétinée, j'ai l'impression que mes os sont cassés. 

Reste humaine. 

Etuor ne sius ej...

Ne l'écoute pas. 

Invocatrice de l'Ombre T.2Where stories live. Discover now