Chapitre 20 - Vitaly

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Tony m'a scrupuleusement obéi, et ne sort que lorsque nous sommes tous dehors. Il a déjà empaqueté ses affaires. Il baragouine qu'il doit partir pour s'occuper de son magasin, plie sa tente en deux temps, trois mouvements, monte dans son quatre-quatre et quitte le campement, sous le regard ravi de Spyke.

En revanche, Vitaly n'en a fait qu'à sa tête : il a carrément disparu avec son sac à dos, à mon nez et à ma barbe. Hors de question que je lui coure après. S'il estime qu'il peut se passer de ma protection, grand bien lui fasse.

Puisque nous ne sommes plus que quatre, nous mettons à profit la matinée pour réfléchir à l'opération d'attaque de la villa, en croisant les données que nous avons collectées cette nuit et les différentes options qui s'offrent à nous.

Mais en début d'après-midi, mon téléphone sonne. C'est Vitaly qui appelle comme une fleur :

- Salut Jack, tu pourrais venir me chercher sur Teneria ?

Je reste un instant stupéfait. Il ne manque vraiment pas d'air. Après avoir tenté de me voler le carnet, menacé ouvertement Tony, désobéi délibérément à mon ordre, il me téléphone tout naturellement pour que je lui serve de chauffeur. Comme si j'étais sa mère. Je grogne dans le portable :

- Tu me prends pour un taxi ?

- Allez, insiste-t-il d'un ton racoleur, j'ai des infos intéressantes pour toi.

- Je me passerai de tes infos.

Je ne vois pas bien ce qu'il pourrait m'apprendre de si important. Il essaie encore de négocier :

- Et je te paye un paquet de clopes.

- Tu m'en dois au moins trois.

- Eh ben, trois paquets de clopes !

Je ne le reconnaîtrai ni devant lui, ni devant Spyke, mais en réalité, je suis soulagé qu'il m'ait rappelé avant qu'il ne lui arrive des problèmes. Va pour les trois paquets de clopes.

J'emprunte le pick-up de Spyke et je le retrouve au croisement de la rue qu'il m'a indiquée, sac sur le dos, cheveux bien peignés en arrière, et une cigarette aux lèvres. Il pose les trois paquets sur le tableau de bord avant même de s'asseoir, son sac à dos à ses pieds.

- Pourquoi tu t'es barré sans rien dire ? je lui demande en redémarrant.

Il hausse les épaules et me tend une cigarette du paquet qu'il a gardé pour lui. Je l'allume en silence, j'attends une explication de sa part. Il finit par bougonner :

- Parce que j'en ai marre d'être pris pour un gamin.

- Ils te prennent pour un gamin, parce que tu te comportes comme un gamin, je rétorque en soufflant une bouffée de fumée.

Je ne me suis pas inclus dans le lot de ses détracteurs. Je n'ai jamais traité Vitaly comme un enfant. Jamais je ne me risquerais à prendre à la légère quelqu'un qui a une arme entre les mains et qui serait capable d'en faire usage contre moi. Il est un homme, peut-être plus vite qu'il ne l'aurait souhaité, par la force des choses, mais il va devoir apprendre rapidement à se canaliser et à accepter les responsabilités qu'implique la liberté. C'est la raison principale pour laquelle je refuse de le protéger davantage. Et plus je prendrai sa défense, et plus cela fournira de motifs à Spyke pour rire de lui. Il doit se faire respecter, ou bien abandonner. Si c'est moi qui l'impose au groupe, il restera illégitime aux yeux des autres.

- C'est quoi, tes infos pour moi ?

Je me demande s'il a réellement du nouveau, ou si ce n'était qu'un coup de bluff pour que je vienne le chercher. Il commence par situer le contexte :

Pour un peu d'orWhere stories live. Discover now