Chapitre 32 - Plan d'action

22 4 18
                                    

Je m'arrête à la lisière des arbres, invisible, pour mieux observer. Lorsque c'est la voiture de Spyke qui entre dans mon champ de vision, un mélange de sentiments ambigus et contradictoires monte en moi. Une pointe de fierté narcissique, en tout premier. J'ai envoyé un message, et il est venu. Je suis capable de faire obéir mes hommes. Mais est-ce qu'au fond, une part de moi n'aurait pas préféré qu'il ne revienne pas ? N'ai-je pas secrètement souhaité le laisser en arrière pour réussir seul, sans son aide pour une fois ? Finalement, c'est mon soulagement qui prend le dessus : s'il participe à la mission ce soir, tout sera infiniment plus facile.

Je quitte le couvert des arbres pour aller à sa rencontre, mais je garde la main près de mon pistolet, pas tout à fait serein quant à ses intentions, et je reste à bonne distance, à portée de voix mais pas plus. Katia et Greg se placent automatiquement derrière moi, la première prête à me défendre, équipée de son fusil, le second plutôt dans l'optique de me retenir.

Spyke descend de sa voiture, mais nous voyant tous les trois face à lui, il n'avance pas non plus. Il ne peut que constater l'absence de Tony, en plus de celle de Vitaly. Il lève ses mains vides une demi-seconde pour me faire comprendre qu'il n'est pas venu pour se battre. Il me regarde fixement, mais aucun son ne sort de sa bouche. S'il espère que je vais lui faciliter la tâche en faisant le premier pas, il se trompe. S'il n'a rien à me dire, il peut toujours repartir d'où il vient. Je croise les bras sur ma poitrine, et j'attends. Finalement, ses yeux décrochent des miens et il prend la parole, d'une voix qu'il aurait sûrement voulue plus assurée :

— Je me suis dit que tu aurais besoin du pick-up.

Je tourne lentement la tête vers le van, qu'il a très bien vu, puis de nouveau vers lui.

— J'ai pas besoin du pick-up.

Spyke reste sur place, incertain. Il agite sa clé de voiture dans sa main gauche, son regard auréolé d'un œil au beurre noir fuyant sur le côté. Dans mon dos, Greg toussote. Qu'est-ce que j'attends, en réalité ? Des excuses qu'il n'est pas prêt à donner, et que je n'ai de toute manière pas envie d'entendre ? C'est moi qui lui ai envoyé un message, lui demandant implicitement de revenir vers moi, et il l'a fait. Tel que je le connais, ce choix n'a pas dû être facile pour lui. Si dans un excès d'amour-propre blessé, je le laisse repartir maintenant, c'est terminé.

S'il était à ma place, Andreï ne resterait pas ainsi sur la défensive. Il montrerait la grandeur et la magnanimité d'un Tsar en réintégrant la brebis égarée dans son troupeau, tout en laissant planer au-dessus d'elle un couperet invisible et une dette de repentir indélébile.

Je reprends d'une voix claire, que j'ai du mal à débarrasser de toute émotion :

— J'ai besoin que tu te battes à mes côtés.

Je lui tends une main pacifique. Pour la saisir, il lui faut avancer vers moi. Il le fait sans plus réfléchir, et il ne se contente pas de prendre ma main, il attrape mon poignet et me tire vers lui dans une accolade fraternelle.

Je fixe un instant ses yeux bleus. J'y vois de la détermination, mais nulle rancune. Notre amitié a toujours survécu à toutes nos guerres. Aucun écueil ne nous détournera ce de but commun, seule la nuit à venir mérite notre focalisation.

La main sur son épaule, je lui dis avec un regain de confiance :

— C'est jour de paye, mon frère.

***********

L'après-midi, Andreï me convoque pour expliquer les détails de l'opération. J'emmène Spyke avec moi, il n'arrivera plus à créer de dissension entre nous. Dans son bureau, nous retrouvons bien sûr Miguel, Angelo qui nous regarde entrer de son air supérieur, Ryan l'artificier, ainsi que Xander et son associé du garage — cache d'armes. Andreï nous présente à la seule personne que nous ne connaissons pas : Nino, un homme du Quartier Sud qui se tient à côté d'Angelo.

Pour un peu d'orHikayelerin yaşadığı yer. Şimdi keşfedin