20. "Alors essaie un autre genre"

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-Ysalis.

Pas de réponse. Ça fait presque deux heures qu'ils sont plongés dans le noir, allongés sur le lit de celle-ci. Elle s'est endormie pendant presque une heure, mais Mick sait qu'elle est réveillée à présent.

-On se lève, annonce-t-il en s'exécutant. Il appuie sur l'interrupteur qui entrouvre les stores, simplement pour laisser passer un filet de lumière.

-Non, répond Ysalis, mais Mick secoue la tête.

-C'est pas une question. On se lève.

Elle se tourne vers lui et plonge ses yeux dans les siens. Mick voit bien qu'elle essaie de le convaincre de rester ici, mais c'est peine perdue.

-Je te forcerai jamais à manger mais par contre, je vais actuellement te forcer à sortir, sourit-il, et Ysalis secoue la tête.

Alors Mick s'en va. Il se lève du lit, puis de la chambre. Il enfile ses chaussures et caresse Olive noire en lui annonçant que ça y est, ils vont sortir. Et comme il s'y attendait, Ysalis le rejoint.

-Me laisse pas toute seule, demande-t-elle, et sans même qu'il ne lui demande, elle attrape ses chaussures et les enfile. Je peux sortir en pyjama ?

-Oui. Mais prends un manteau.

Cinq minutes plus tard, ils marchent en direction du parc. Mick ne sait pas si Ysalis est en colère de s'être fait tirer du lit, mais lui, il est persuadé que c'était la chose à faire. Il ne peut pas regretter.

Elle s'installe sur un banc, et quand Mick attrape une de ses mains pour la serrer trois fois dans la sienne, elle dit :

-J'ai terminé le premier jet.

Mick hoche la tête. Il avait songé à l'éventualité que ce soit le problème.

-Qu'est-ce que je vais faire, maintenant ?

-Le deuxième jet, répond-il. Et laisser place à ton imagination pour inventer une autre histoire.

-J'ai pas d'idées, Mick. J'ai l'impression que tout a déjà été fait.

Il hausse les épaules.

-Alors essaie un autre genre.

Elle sourit.

-C'est pas aussi simple que ça.

-Pourquoi ? Parce que tu as commencé à écrire de la science-fiction, alors tu dois t'y cantonner ?

-Parce que j'ai pas les codes des autres genres. Écrivains, c'est vague, c'est comme sportifs. Tu n'es pas juste sportif, tu as une spécialité. C'est pareil pour moi.

-Et qui t'empêche de te spécialiser dans autre chose ?

-Personne, mais...

Elle secoue la tête.

-Mon père n'a toujours écrit que des policiers. Encore aujourd'hui. Il n'a jamais eu besoin d'aller voir si l'herbe est plus verte dans un autre genre.

Mick fronce les sourcils.

-Peut-être que c'est plus facile d'avoir des idées pour écrire un policier qu'un roman de science-fiction.

Ysalis le regarde, comme surprise par cette phrase.

-Je ne me suis jamais posé cette question.

Un silence s'installe, et Mick voit bien qu'elle est plongée dans ses pensées, occupée à tout remettre en question.

-Ça fait combien de jours que ça ne va pas ?

Ysalis baisse les yeux.

-Plusieurs.

-Pourquoi me l'avoir dit ?

Elle fronce les sourcils, et Mick sourit. Elle ne s'attendait pas à cette question, il le sait. Pourtant, c'est celle qu'il se pose.

-Parce que je savais que tu ferais ça.

-Quoi ?

-Me sortir de mon état. De mon lit, de ma chambre. De mes pensées.

-Viens avec moi aux essais.

-Mick... t'as pas besoin de faire la nounou.

-Je ne fais pas la nounou. Je t'emmène en vacances. Enfin, toi, tu seras en vacances, pas moi.

-Je vais t'embêter.

-Oh, super embêtant d'avoir ma copine à proximité quand je suis au travail, vais-je m'en remettre ? ironise-t-il, et elle sourit.

-Tu es sûr ?

-Certain. On part aux essais et toi, pendant ce temps-là, tu ne penses pas à ton premier jet. Pas une seule fois. Si jamais la pensée arrive, hop, pensons plutôt à Mick, ah, qu'est-ce qu'il est beau, celui-là.

-C'est bon, c'est bon, arrête-toi là, soupire Ysalis d'un air désespéré. Je viens avec toi.

Mick sourit. C'est une grande victoire.

En rentrant, il voit bien qu'Ysalis n'a qu'une envie : retourner dans son lit.

-Je peux me préparer un petit truc pour ce soir ? demande-t-il, et Ysalis fronce les sourcils. Pour manger, précise-t-il.

-Ah... oui, bien sûr. Il y a des pâtes dans le tiroir là-bas... tu peux prendre celles que tu veux.

Il hoche la tête et la regarde. Il est bloqué. Il a abordé le sujet qu'il voulait, mais maintenant, il ne sait pas comment l'amener à elle sans franchir de limite.

-Vas-y, Mick, pose-moi la question, dit-elle en haussant les épaules, et il secoue la tête.

-Je peux faire des coquillettes ?

Ysalis éclate de rire, et Mick sourit.

-Je te parle pas de cette question, tu fais les pâtes que tu veux. Demande-moi depuis combien de temps je n'ai pas mangé, ça te brûle les lèvres.

-C'est pas pour t'embêter que je demande, se justifie-t-il, et elle acquiesce.

-Je sais. C'est pour savoir si je vais mourir ou pas.

-T'es un peu dans l'extrême, là... je sais que tu te laisseras pas mourir de faim. T'aimes pas manger mais c'est un peu comme sortir les poubelles, tu le fais quand même.

-Tu viens de comparer manger et sortir les poubelles, là ? hausse-t-elle un sourcil, et Mick rit, sortant le paquet de pâtes du tiroir. Est-ce que tu en voudras ? C'est pour savoir, pour la quantité ?

Ysalis fait la moue.

-Je sais pas encore. Ça dépend de comment tu vas me les présenter.

-Comment tu voudrais que je te les présente ?

-Je sais pas encore.

Mick est un peu décontenancé par la situation, mais il décide simplement d'en faire assez pour qu'Ysalis puisse en manger. Il n'a pas la prétention de penser qu'il va réussir à la faire avaler quoi que ce soit, mais il peut encore espérer.

-Alors ? Tu veux pas savoir c'était quand la dernière fois que j'ai mangé ? insiste-t-elle, et Mick secoue la tête.

-Qu'est-ce que ça va changer ? Peu importe, je ne vais pas te forcer à manger de toute manière.

Quand les pâtes sont prêtes, Mick ne lui demande pas d'assiette. Il les laisse dans le plat, prend deux fourchettes et propose à Ysalis de s'installer devant la télé.

-On peut commencer une série Netflix ensemble, propose-t-il, et après plusieurs minutes de discussion, il lance le premier épisode.

Et il est heureux de constater qu'Ysalis mange. Picore, pour être plus exact. Il ne compte pas combien de fois elle se sert, mais il sait que ce n'est pas assez pour constituer un vrai repas. Ce n'est pas l'important. Il est soulagé de la voir remplir son estomac, même si ce n'est qu'avec deux coquillettes qui s'y battront en duel.

nom de famille » MICK SCHUMACHER ✓Where stories live. Discover now