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22. "Sur mon corps que je déteste"

Mick ne demande aucun compte à Ysalis : il la laisse boire ce qu'elle veut du milkshake. Quand elle jette le gobelet en carton à la poubelle, il ne se demande même pas si elle l'a vidé ou non.

-Mais, Mick, t'as le droit d'avoir quelqu'un avec toi dans ta chambre ? demande soudainement Ysalis, et le pilote rit.

-Tu crois que la police va venir ? Ma mère ?

-Mais non, mais les gens de chez Haas.

Mick hausse les épaules.

-Non, je pense pas.

-Tu penses pas ? Mais tu m'as jamais dit que tu vivais dangereusement comme ça, Mick, se moque Ysalis.

-Je suis pilote de Formule 1, je pense que c'est un assez gros indice.

Ysalis rit.

-Oui, t'as pas tort. À quelle heure je dois venir dans le paddock, demain ?

-Quand tu veux. Je conduis l'après-midi. Tu peux venir vers midi ou treize heures.

-Je viendrais vers treize heures, alors, et Mick comprend qu'elle veut esquiver toute vision de nourriture.

Alors le lendemain, il est heureux de la voir de loin juste avant d'entrer en piste. Il décide de profiter des quelques minutes qu'il lui reste pour aller la voir, mais il n'a pas le temps : Esteban se glisse à côté d'elle pour lui.

-Salut, lance Esteban en français, et Mick ne veut pas espionner la conversation... mais c'est un bon entraînement d'écouter un peu de français. Alors il reste un peu derrière eux.

Ysalis semble surprise de voir quelqu'un à côté d'elle.

-Désolée, je regardais Théa.

Esteban rit.

-Bah, elle m'appartient pas, tu sais... tout le monde a le droit de la regarder.

-Je la connais pas mais c'est la copine de pilote à qui j'ai l'impression de ressembler le plus.

Esteban hoche la tête.

-Tu dis ça parce qu'elle traîne en tenue de travail 24h sur 24 sur le paddock ?

Mick ne le voit pas, mais il entend qu'il sourit dans sa voix.

-Oui, peut-être. Oui, tu as sûrement raison. Je ne sais pas. Je n'ai pas l'impression d'être à la hauteur pour être une WAG. Mais quand je vois Théa, je me dis que, peut-être que si.

-Et sur quoi tu te bases pour te définir à la hauteur ou non ?

-Sur mon corps que je déteste.

-Tu sais quoi ? Il faudrait que tu discutes avec Lando, un de ces jours. Lui aussi, il a mis du temps à comprendre que c'est pas parce que quelque chose nous dérange personnellement que ça dérange tout le monde. Toi, tu vois ton corps et tu n'aimes pas ce que tu vois. Mais ce n'est pas le cas de tout le monde.

Ysalis hausse les épaules.

-L'avis de Mick est infondé car il n'a jamais vu mon corps.

-Pas besoin des yeux. Les mains suffisent.

Mick, tapis dans son coin, attend la réponse d'Ysalis, mais celle-ci ne dit rien. Esteban finit par se retourner, et Mick fait semblant de venir d'arriver.

-Salut ! s'exclame-t-il. Qu'est-ce que vous faites ?

Esteban hausse les épaules.

-On discute. Tu sais, je pense que Lando et Ysalis pourraient très bien s'entendre. Ysalis a beaucoup à apprendre du petit.