1/

85 7 11
                                    






— Excusez-moi ? s'enquiert à nouveau le jeune homme assis derrière le petit secrétaire.

Je fais un effort surhumain pour ne pas m'emporter. Après tout, ce n'est pas de sa faute. Tout le monde réagit de la même manière la première fois.

— Sativa Henson, répété-je calmement. S-A-T-I-V-A. Comme la plante de cannabis. J'ai pris rendez-vous par téléphone la semaine dernière. Le Docteur Valdez est un ami de ma famille.

L'employé finit enfin par rentrer correctement mon prénom dans sa base de données. Toutefois, vu la tête qu'il fait, il n'est pas au bout de ses peines. Et moi non plus.

— Je suis désolé Mademoiselle Henson mais il semblerait que le Docteur Valdez ait reporté votre rendez-vous. La clinique vous a normalement envoyé un mail pour vous prévenir.

Merde.

Il a dû se perdre parmi les deux mille autres que je n'ai pas ouvert et que je n'ouvrirai probablement jamais.

À la place, je lui adresse un sourire poli, le remercie à nouveau puis me dirige vers la porte de sortie. Au passage, je jette un coup d'œil à la mamie qui était assise à côté de moi dans la salle d'attente.

Elle est toujours concentrée sur ses mots fléchés. Il ne reste que quelques cases vides. Les mêmes que quand je me suis levée afin d'aller parler au secrétaire.

« Grosseur d'un projectile », lis-je. La réponse est en sept lettres.., je fais mine réfléchir tandis qu'elle lève la tête vers moi. « Calibre ». Essayez le mot « Calibre ».

La petite vieille prend un court instant avant de réagir mais finit par m'écouter. Lorsque son visage s'illumine, je reçois la confirmation que j'ai raison.

Elle me remercie vivement tandis que je quitte enfin les lieux.

Des mots fléchés de Force 2, cette mémé est une petite joueuse. Ma grand-mère m'obligeait à l'aider avec ses Force 4 lorsqu'elle bloquait trop longtemps. Elle disait que j'avais un don avec les mots.

C'était une sacrée dictatrice du haut de ses un mètre cinquante-deux. Que son âme repose en paix.

Arrivée près de ma voiture, je fouille un instant mes poches à la recherche de mes clés de voiture. Mon père me tuerait si je les perdais une seconde fois.

Au moment où je les retrouve enfin, je me remets à pester sur ma stupide habitude à ne pas vider ma boîte mail. Je crois que je me suis trop longtemps perdue dans mes pensées car quand je réalise mon acte, il est déjà trop tard.

La portière de ma Clio 4 vient de s'écraser sur la carrosserie de la voiture voisine. Et ce n'est pas n'importe quelle voiture.

Porsche 718 Boxster.

Quelle personne sensée gare une Porsche 718 Boxster dans un parking minable coincé entre un cabinet de médecin et un Walmart ?

Je retiens mon souffle en refermant doucement ma portière. Je prie Dieu, tous les saints, pour que cette voiture n'ait rien.

Cependant, il ne semble pas m'entendre.

Une belle rayure verticale, d'au-moins vingt centimètres, s'est dessinée sur la carrosserie grise, jusque là immaculée. Si bien, que j'aperçois même le reflet de mon visage horrifié dedans.

Putain, qu'est-ce que je suis censée faire ?

Mon assurance va s'arracher les cheveux -et les miens, par la même occasion-. Mais après tout, je ne peux pas simplement m'enfuir comme ça.

Sativa: Feel in a HeartbeatOù les histoires vivent. Découvrez maintenant