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Les clés m'échappent des mains au moins quatre fois avant que je ne parvienne à les insérer dans la serrure.

Je glousse toute seule en me rendant soudainement compte que le mécanisme d'une porte fonctionne un peu comme la reproduction humaine.

Je rentre dans l'appartement tout en énumérant dans ma tête d'autres exemples du genre. Une clé USB dans son port. Un téléphone et l'embout de son chargeur. La tête de ce même chargeur dans la prise.

Putain, est-ce que c'est fait exprès ou est-ce que je suis vraiment trop bourrée ?

Mon afro était splendide quand nous avons quitté chez Diego. Dorénavant, je préfère ne pas imaginer son état.

Je referme la porte comme je peux puis m'engouffre dans le couloir. Bien sûr, la porte de la chambre de Monsieur De Los Santos est fermée. Je refrène au dernier moment la pulsion qui m'ordonnait de frapper comme une folle sur cette dernière, histoire d'obtenir une réaction.

Depuis hier soir, je ne l'ai pas revu. Il doit préparer un plan sans faille pour dominer le monde. C'est la seule excuse que je trouve pour expliquer son silence. Mes pensées sont obligées de se focaliser à nouveau sur l'instant présent quand je manque de trébucher sur...

Sur rien, en fait. Je suis vraiment éclatée.

Je savais que sortir avec Diego était une mauvaise idée. Au moins, il ne s'est rien passé de plus entre nous là-bas. Il était trop occupé à envoûter une jolie petite asiatique pour me porter quelconque attention. Pour ma part, je suis restée au bar une bonne partie du début de soirée, essayant de gentiment repousser un mec d'au-moins quarante ans, complètement torché. Une fois que l'alcool l'a emporté sur ma raison -Diego a tenu sa promesse, il m'a payé tous mes shots-, j'ai dansé tout le reste de la nuit.

Jusqu'à me retrouver ici et maintenant. À trois heures du matin, ravagée par la boisson, au sol.

Attends, pourquoi est-ce que je suis au sol ? Je pensais que j'avais réussi à me rattraper ! Putain, Sativa, ça ne va vraiment pas.

Je rigole et secoue la tête. Après quoi, je tente de me relever. Mais une voix sortie des ténèbres me fige dans mon geste.

— La prochaine fois, je t'en prie, fais encore plus de bruit. Je crois que tu n'as pas réveillé les voisins du sixième.

J'hésite longuement entre simuler un coma éthylique, rester dans cette position semi-debout ou me relever entièrement. Au final, j'opte pour la dernière option. Je me rattrape sur le canapé lorsque mes jambes se mettent à tanguer.

— Cet immeuble paraît minuscule de l'extérieur, il y a vraiment six étages ? c'est l'unique question qui arrive à se frayer un chemin dans ma gorge.

Le Docteur Valdez m'a dit que ma vue a encore baissé et que je dois changer mes lunettes pour avoir une correction un peu plus forte. Je préfère me dire que c'est pour cette raison que je ne distingue pas très bien la silhouette de la personne qui me parle. Elle semble appuyée dans l'encadrement de la porte du salon, mais je n'en suis pas sûre.

— Sept étages, répond toutefois mon interlocuteur des ténèbres. Il y a sept étages dans le bâtiment. Il suffit de regarder les boutons de l'ascenseur.

— Ah oui putain, l'ascenseur ! m'écrié-je. J'ai peur des ascenseurs, je ne sais pas comment j'ai réussi à le prendre toute seule pour venir jusqu'au.., je fronce les sourcils, on est à quel étage déjà ?

Je perçois un long soupir. En voyant la silhouette se redresser, je m'attends à la voir regagner son antre, pourtant, elle s'avance vers moi. Je ne saurais dire pourquoi, mais je me mets à paniquer.

Sativa: Feel in a HeartbeatWhere stories live. Discover now