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— Il n'y a qu'à toi que ce genre de connerie arrive ! ricane le garçon en écrasant son mégot dans le cendrier.

Ce matin, j'arpentais les sites à la recherche d'un nouvel appartement à louer. Lorsque j'ai entendu ma mère commencer à chanter dans le salon, j'ai su qu'il était temps pour moi de fuir.

Par ailleurs, je ne sais pas si ce petit con est réellement de meilleure compagnie.

Diego Valdez, le Roi du lycée, l'idéal de ses dames, le frimeur de service.

Son père -le fameux docteur qui m'a abandonnée à mon triste sort de jeune femme à moitié aveugle- a rencontré le mien à la fac de médecine. Depuis, ils sont inséparables. Ils espéraient peut-être que le courant passerait aussi bien entre leurs enfants, mais nous nous détestions.

Ou plutôt, il m'a forcée à le détester le jour où il a cassé la baguette magique de mon costume de fée lors de mon quatrième anniversaire. Après quoi, je me mettais constamment à pleurer quand il tentait de m'approcher à moins de six mètres.

Il a fallu attendre que nous ayons quatorze ans pour que je daigne le regarder à nouveau. Et putain, qu'est-ce que j'avais regretté de l'avoir fait.

En grandissant, cet idiot était devenu bien trop beau avec ses cheveux noirs, son sourire arrogant et ses maudîtes fossettes. Plus le temps passait, plus son charme se renforçait.

C'est pourquoi, je l'ai évité encore davantage. Je pense que ma mère avait fini par comprendre que j'avais un crush sur lui. Je me suis grillée toute seule aux yeux de tous lorsque je me suis évanouie durant un « Action ou vérité ». J'imagine que ma couverture a volé en éclat à l'instant où les autres avaient mis Diego au défi de m'embrasser et qu'il l'avait fait.

J'ai dû perdre connaissance quelques secondes à peine, mais je pense que ça a été l'un des moments les plus humiliant de toute ma vie -même si la liste est longue-.

J'ai réussi à éviter la confrontation avec lui jusqu'à l'été de nos dix-sept ans. Nos parents avaient décidé que nous allions tous passer une semaine et demie en Grèce. J'ai résisté à l'horrible tentation de parler à Diego pendant deux jours.

Après quoi, ses yeux langoureux ont eu raison de moi. C'est aussi durant ce séjour qu'il a pris ma virginité. Ou plutôt, qu'il me l'a volée.

J'ai réfléchi plusieurs nuits afin de parvenir à mettre des mots sur ce qu'il m'avait fait. « Voler » est le terme approprié. Il était conscient de l'effet qu'il avait sur moi, il m'a ensorcelée -Oui, à ce point. Le temps m'a prouvé que ce type est un sorcier- puis lorsque je lui ai demandé ce qu'il souhaitait avec moi, il m'a assuré que cette petite aventure n'avait pas vraiment d'importance pour lui. Que c'était « pour s'amuser ».

Bref, j'ai mis des années à lui pardonner, mais aujourd'hui, les choses vont plus ou moins bien entre nous. Impossible de lui en vouloir trop longtemps, je le soupçonne parfois d'utiliser ses pouvoirs magiques sur moi.

Nos parents rêveraient de nous voir ensemble, en particulier mon père. Il considère Diego comme le gendre parfait car il est assez fort pour jouer ce rôle devant mes géniteurs. Son seul problème, c'est qu'il fume comme un pompier. Enfin, un problème pour ma mère, mon père -alias Snoop Dogg en personne- est ravi de pouvoir profiter de ses pauses clopes avec cet imbécile.

De mon côté, je le trouve beaucoup trop insupportable pour m'imaginer enchaînée à lui toute ma vie. À vrai dire, c'est plus une sorte de meilleur ami.

Je lui arrache des mains la cigarette qu'il s'apprêtait à allumer à nouveau.

— Tu viens d'en finir une, tu devrais ralentir, je le gronde.

Sativa: Feel in a HeartbeatWhere stories live. Discover now