ENOLA

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Cinq ans plus tôt. Paris.

Je viens de finir mes études de traduction mais ce n'est pas ce que je veux faire de ma vie. Mes amies et ma famille me poussent à continuer dans cette voie parce qu'apparemment j'ai du potentiel et que si traduire des livres ne m'intéresse pas, je peux traduire des discours, je peux travailler peut-être un jour dans la haute société. Ils me disent que je peux voyager. Mais non. Non je ne veux pas. Et c'est pour cette raison que je me suis écartée de Toronto pour réfléchir. En visitant les incontournables de la ville de l'amour je suis tombée sur ce petit café sur la butte de Montmartre. Ce n'était pas le même type de café que ce que l'on trouve dans le reste de la ville. Il était plein, les clients souriaient. Une femme surfait entre les tables comme si elle était née pour ça. Je décide de m'y arrêter et sans encore le savoir il s'agit de l'élément déclencheur.
Cette femme s'approche de moi et m'informe que je suis sa centième première cliente. Je lui dis que pour l'occasion je lui commendrais un café ainsi que des pancakes. Ils étaient délicieux, meilleur que les pancakes nationaux canadiens. Le café s'appelle À Nos Bonheurs et je comprend tout de suite pourquoi l'ambiance est si légère, pourquoi tout le monde rit et a le sourire aux lèvres. Alors je profite de ce moment pour penser à mon bonheur. Je me dis que créer la même chose à Toronto peut être une bonne idée. Mais je n'ai pas l'âme d'une gérante. Je ne connais rien à la restauration. Mais après tout, recommencer à zéro est sûrement la solution à mon problème. Je reste plusieurs heures à réfléchir à mon avenir. Cette dame s'approche parfois pour me demander si tout va bien, je lui offre un sourire en lui disant que oui ça va et que cet endroit est apaisant.
Je rentre à Toronto le lendemain avec cette idée dans la tête même si je ne suis toujours pas convaincue. Après tout qui a dit que je devais commencer l'aventure en créant le miens ? Je pourrais très bien commencer par juste essayer de comprendre ce monde en travaillant en tant que simple serveuse.
Voilà maintenant cinq ans que je suis serveuse dans le même café. J'ai adoré l'ambiance ici mais finalement je n'ai jamais eu encore le courage de créer le miens. Mais un jour qui sait ? En attendant, le patron m'a confié la mission de donner un nouveau souffle à son vieux café. Je l'ai alors aménagé comme j'aurais aménagé le miens, je l'ai décoré comme si c'était le miens. J'ai créé un café à l'image du café parisien qui a donné un nouveau souffle à ma vie sans le savoir.
Cette femme... Jessica ne sait pas qu'elle a changé ma vie. Enfin... c'est ce que je croyais jusqu'à ce que je la vois devant All Of Us hier. Comme si nos deux histoires s'inversaient. J'avais vu sur les réseaux sociaux du café l'annonce de sa fermeture définitive et ça m'avait fendu le cœur. Mais je me m'attendais pas à voir la patronne ici. Chez moi.
Me voilà assise avec elle sur mon lieu de travail, le fruit de son histoire à lui raconter comment elle a sauvé ma vie sans une seconde se souvenir de mon existence.
Je raconte toute cette histoire à Jessica et au fil de mon récit je la vois blêmir mais sourire en même temps.
J'arrive à la fin de mes explications.
-Alors voilà je te connaissais sans que tu ne le saches pendant toutes ces années. Je suis revenue plusieurs fois à Paris ces cinq dernières années, et à chaque fois je suis venue me reposer quelques heures à ton café. Je voyais l'évolution, ton évolution aussi. Je me doute que toute cette histoire est déstabilisante.
-Je.... Je ne sais pas quoi dire. Je suis en meme temps très surprise et très heureuse. Très heureuse parce que c'était mon objectif avec cet établissement. Offrir un havre de paix à ceux qui passaient était ce que je voulais alors tu n'imagines même pas à quel point ton témoignage me fait plaisir.
-Je crois que tu as aidé bien plus de gens que tu ne le penses.
-C'est possible oui.
-C'est drôle quand même dis-je en ricanant.
-De ?
-Que les rôles s'inversent. Que l'on se rencontre ici après tout ça. Que tu loges dans le quartier. Comme si toutes les étoiles étaient alignées pour que l'on se rencontre.
-Ca doit être grace au hasard dit-elle d'un ton détaché.
-Encore faut-il croire au hasard répondis-je avec un petit sourire en coin. Mais je suis désolée il va falloir que j'y aille mon copain m'attend. Tient prend mon numéro de téléphone ça me ferait plaisir de continuer à avoir de tes nouvelles et puis si tu veux une guide pour la suite de ton séjour ici je suis là.
-Bien sûr, je ne te retiens pas. Et merci, promis je t'appellerais bientôt.

A Nos BonheursWhere stories live. Discover now