Chapitre 15 : Le cavalier de l'apocalypse

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Repères chronologiques : cette scène s'insère comme une scène coupée de The Umbrella Academy, saison 1, épisode 5, autour de 33:53 (un peu avant que Luther monte parler avec Cinq, qui fait travaille à ses équations).

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28 mars 2019, 12:28

Cette matinée n'a servi à rien. Absolument à rien. Je ne sais même pas comment j'ai pu imaginer une seule seconde que je parviendrais à bosser. J'ai essayé de faire bonne figure, j'ai essayé d'avancer sur le réétiquetage de la visserie, mais Rodrigo a vu que je mélangeais toutes les références, avec ces yeux rouges qui ne veulent pas s'en aller. Il en a marre de moi, cette semaine. Il m'a gueulée dessus. Il a menacé de me virer, et il a dit que c'était ma dernière chance. Je peux le comprendre, franchement. Moi-même je ne vois plus l'intérêt d'être là, si l'apocalypse doit de toute façon tout emporter.

J'ai avec moi un sandwich fait en hâte avec le beurre de cacahuète de Cinq, mais je n'y toucherai même pas. Je regarde ma montre : 12:28. Tout mon être me crie de retourner à Hargreeves Mansion sur le temps de midi. Au cas où. Je ne partirai pas avant l'heure, mais je ne donnerai pas à cette foutue quincaillerie une seconde de plus. 12:29. Je suis vraiment une imbécile d'avoir été incapable de dire à Klaus que je repasserai. Si ça se trouve, il ne sera même pas là. 12:30.

*Crac !*

Dans un déchirement de l'espace-temps, je disparais de la réserve en laissant en plan vis, boulons, étiquettes et regrets.

Un trottoir, un bus. Je me rends invisible pour ne même pas avoir à me soucier de payer. Son foutu moteur traine, et mon impatience résonne avec ses rouages, tandis qu'il accélère enfin.

*Crac !*

Un passage clouté, le feu piéton au rouge. Long, trop long, et je le fixe comme pour l'obliger à virer. Le vert, pour seulement tomber sur le croisement suivant. Cette fois, je traverse quand même. Parfois, ça a du bon, l'intangibilité.

Je longe cette façade aujourd'hui quotidienne, et les vitraux de verre ornés du parapluie. Quelques marches, d'anciennes vitrines recouvertes d'affiches hors d'âge. A travers la porte des sous-bassements, sans même besoin des clés.

*Crac !*

Avec un essoufflement que je n'avais pas ressenti depuis longtemps, j'apparais dans le 'Salon des enfants', où Luther est attablé devant une pile impressionnante de toasts. Je ne dis rien, et lui non plus, il se contente de mâcher. Je scanne la pièce de mes yeux fatigués, et il ne s'en étonne même plus.

*Crac !*

J'apparais dans la chambre de Klaus, où les murs couverts d'écritures sont de nouveaux les seuls à parler dans le vide. Il n'est pas dans la salle de bain, pas non plus dans les wc dont l'ampoule pâle s'allume quand j'ouvre la porte. Le couloir des chambres est silencieux, à l'exception de quelques pas entendu à l'étage... Je commence à arriver au bout de ce que je peux donner, en termes de sauts d'affilée à travers l'espace, et ce d'autant que certains ont été d'assez grande distance. Mais une dernière fois...

*Crac !*

Dans une énième déchirure de lumière bleue, j'apparais au dernier pallier, en haut de 'l'escalier vert'.

Les pas étaient ceux de Cinq, dont j'entrevois tout de suite l'uniforme, dans sa chambre près du grenier. J'essaye de reprendre mon souffle et de tenir à l'écart l'épuisement, mes mains posées sur mes genoux. Je déglutis. Bon sang. La dernière fois que j'ai fait ça se perd dans un lointain passé. Et il me vient une formidable envie de café.

"Il n'est pas là".
Je relève la tête en plissant les yeux, ma respiration se stabilisant peu à peu.
"Hein ?"
Cinq continue ce qu'il est en train de faire sur son mur, sans même me regarder.
"Si tu cherches Klaus, il est parti faire un tour avec Diego".

Une courbure de l'espace-temps (Saison 1) - The Umbrella AcademyWhere stories live. Discover now