Huit

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Mon cœur cogne dans ma poitrine. J'ai du mal à respirer.
Inspire. Expire.
Je me concentre sur ma respiration qui finit par ralentir.
- Anna? Tu peux tout me dire, répète le docteur.
- D'accord.
Il ne me croira jamais. De toute façon, c'est impossible de disparaître!
Alors pourquoi tu as disparu?
C'etait une hallucination.
Arrête de nier, s'il te plaît.
Bon d'accord.
- Anna?, s'impatiente le Dr Veillon. J'attends!
Allez, dis-lui.
Je prends mon courage à deux mains.
- Alors, euh... Tout à commencé mardi dans les toilettes du lycée, où j'ai... comment dire? Disparu.
Le docteur écrit quelque chose dans don calepin. J'arrête de parler.
- Continue!, m'encourage-t-il. Que veux-tu dire par "disparu"?
Je lui raconte toute l'histoire. Au fur et à mesure de mon récit, il fronce de plus en plus les sourcils.
Lorsque j'ai terminé, le silence s'installe.
- Alors?
- Je... vais en discuter avec la psychiatre de l'hôpital, d'accord?
Aïe. Mauvais signe.
Je hoche la tête. Je pose alors la question qui me brûle les lèvres:
- Mais... est-ce que tout va bien pour moi?
Le docteur ne répond pas. Il se contente de se lever et de dire:
- Je reviens dans une petite heure. Tu peux te reposer et manger.
Il sort, me laissant seule, livrée à toutes mes interrogations.

Une heure plus tard, comme promis, le docteur est de retour. Suivi de ma mère.
Mon cœur s'arrête de battre.
- Bien, commence le Dr Veillon, nous avons beaucoup discuté avec ta mère et la psychiatre... Ta maman va t'expliquer. Je vous laisse entre vous.
Sur ce, il sort de la pièce.
Ma mère s'assoit en face de mon lit.
- Euh... Coucou maman.
Elle se contente de hocher la tête.
- Il semble que... ton accident t'ait assez bouleversée. Assez pour que tu racontes au Dr Veillon que tu pouvais devenir invisible.
- Mais c'est vrai!
Ma mère secoue la tête.
- Arrête de raconter des bêtises, c'est bien clair?, me demande-t-elle d'un ton froid.
- Mamaan! Je te jure que c'est vrai!
- Non!
- Comment peux-tu le savoir?
Je me rends compte que j'ai hurlé.
- Le docteur dit que l'accident t'a causé quelques troubles psychologiques, lâche-t-elle d'un ton cinglant. Mais ta scène ridicule au café me laisse croire que ce n'est pas dû à l'accident.
Je ne l'ai jamais vue comme ça. Ma mère n'a jamais été très douce avec moi. Elle ne me faisait jamais de câlin, ne me racontait pas d'histoire avant de dormir et ne jouait jamais avec moi à la poupée. Mais aujourd'hui, son comportement est inhabituel.
- Enfin, maman! D'accord, j'ai séché les cours. C'est arrivé une fois et ça n'arrivera plus!
- En effet, ça n'arrivera plus, déclare-t-elle d'un ton tranchant.
- Oui, promis! Quand est-ce que je retourne au lycée? Lundi?
- Tu n'y retourneras pas.
- P-Pardon?
Je ne peux m'empêcher de bégayer.
- Suite à ces événements, il serait préférable pour toi d'aller dans un internat spécifique... aux jeunes... comme toi.
- Comme moi?
- Oui, les jeunes troublés psychologiquement.
Ma mère veut m'envoyer chez les fous. Les tarés. Les cinglés. Les dingues.
- Mais Maman, je n'ai absolument rien fait!
- Tu recommences avec tes bêtises.
Elle secoue la tête et se lève.
- Ma décision est sans appel.
Et elle quitte la pièce.
Je n'y comprend rien. Mais pourquoi m'envoyer là-bas?
Je la déteste. Elle ne m'a même pas demandé si ça allait!
La rage me fait bouillir intérieurement.
Je n'ai rien voulu de tout cela. Je n'ai jamais voulu disparaître! D'accord, j'ai toujours été transparente. Les autres ne m'ont jamais remarquée. Mais dans le fond, ma situation était largement préférable à celle-ci!
Les larmes me piquent les yeux.
Ne pleure pas Anna. Sois forte.
D'accord. Rester forte. Ne pas pleurer.
Je m'efforce de respirer calmement, malgré ma tête et mon bras qui me lancent. J'ai d'ailleurs un plâtre qui me mange toute la moitié du bras gauche.
Je soupire. Que faire maintenant?
Tu ne vas quand même pas les laisser t'emmener chez les fous!
Je dois trouver un moyen de m'échapper. Pas de fenêtre. La porte est fermée à clef. Comme s'ils avaient prédit mes pensées.
Et... si je disparaissais?

Je me concentre, ferme les yeux. Rien ne se produit. Je m'imagine en train de disparaître...
Je n'y parviens pas. Je m'énerve:
- Pourquoi je n'arrive pas à disparaître?!!
La porte s'ouvre à ce moment précis sur le Dr Veillon, Claire et ma mère.
- Qu'est-ce que je disais..., soupire cette dernière. Puis elle ajoute: Il est temps de partir Anna.
Je hurle:
- Non! Il n'en est pas question.
Claire s'approche de moi et me prend doucement le bras.
- Ne t'inquiète pas...
Je secoue la tête et me dégage. La porte est encore ouverte. Je peux peut-être le faire...
Cours!
Je fonce vers la sortie. Le docteur m'attrape par le bras droit.
- Calme-toi...
Je tente de le faire lâcher prise. Il me tient trop fort.
- Lâchez-moi!
Claire essaye de m'immobiliser. Je me débats tant que je peux.
- Donnez-lui un tranquilisant bon sang!, s'impatiente ma mère.
- Non!
La jeune infirmière me lâche. J'envoie des coups de pied féroces à mon adversaire.
- Je ne suis pas folle!
Les larmes me piquent les yeux. Le docteur finit par m'immobiliser.
Soudain, je sens une aiguille s'enfoncer dans mon bras...
- Vous n'avez pas le droit de me faire ça!
Claire retire la seringue vide.
- Bien, dit ma mère d'un ton sec. Emmenez la.
Ce sont les dernières paroles que j'entends.
Avant de sombrer dans le noir complet.
Encore.

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