Tabula rasa

6K 680 29
                                    

Ma mère ne me quitte presque plus, au début c'est grisant et passé deux ou trois jours, je me rends compte qu'au-delà de l'amour qu'elle me porte elle semble me voir comme quand j'étais adolescente. Comme si le temps n'avait pas passé.

Je trouve qu'elle me réprimande beaucoup et j'ai beau tenter de ne pas être sur la réserve, je me crispe à chacune de ses réflexions. Elle me reprend sur mon comportement trop masculin, le fait que je sois parfois un peu vulgaire ou brusque, mon métier dangereux... L'exemple typique de cette semaine qu'on passe ensemble c'est quand Calum, pour détendre l'atmosphère raconte l'anecdote du Starbuks où j'ai cogné avant de réfléchir. Il rit avec Keith, parce que c'est ainsi qu'ils me connaissent mais ma mère me jette un regard interdit.

— Ma Lili chérie, tu n'as pas fait ça quand même ?

— Lui casser la gueule ? Si.

— Mais enfin, tu t'énerves souvent comme ça sans raison ?

— Ouais enfin sans raison, il a été malpoli.

—  ...

Je vois bien qu'elle ne comprend pas qui je suis devenue, quelque chose passe dans son regard et elle balaie l'anecdote pour me sourire à nouveau, je sais exactement ce qu'elle a pensé et ça m'agace.
Elle s'est dit que j'étais comme ça car elle n'avait pas été là pour veiller sur moi et que j'avais du me forger une carapace. Mais ça me prend à la gorge, c'est comme si elle reniait ce que j'étais vraiment dans le fond.

Marie qui est revenue pour le week-end toussote, elle est gênée. D'ailleurs elle est tout le temps gênée de tout, c'est chiant à la fin.

Cette sœur en face de moi n'a rien de ce qu'elle était, j'ai rencontré son mec hier et déjà il m'insupporte, il lui parle mal, est grossier et machiste.
Son petit garçon est adorable mais je n'ai jamais le droit de l'approcher. Tout le monde a pu le prendre mais moi non. Je crois que Marie a un peu peur de moi.

Ma mère me tapote la main et me caresse la joue.

— Ma Lili, on ne va pas se disputer pour ça.

Mon père soupire et pousse son assiette.

— Ma chérie, fiche-lui la paix. Elle a du caractère et alors ?

— C'est juste que ... ça n'est pas très social comme comportement, mais on peut rattraper tout ça.

Là c'en est trop !

— Et tu vas « rattraper » le comportement des autres aussi ?

— Comment ça ?

— Ben je ne sais pas, le tien pour commencer, tu as l'air tellement déçue que je ne sois pas ce que tu imaginais.

— Oh non Lili, c'est juste que ça me surprend, tu es la seule ainsi et je ne crois pas que la violence devrait être un trait de caractère.

— Mais tu as l'air d'oublier que j'ai toujours été un peu comme ça...

Marie chuchote

— Je crois qu'il serait temps que tu arrêtes Lili. C'est gênant.

— Sinon quoi Marie ? Tu vas t'énerver ?

Elle se lève et me fait face, je vois sa mâchoire trembler. Son idiot de mec grommelle.

— Marie a raison, ça suffit. On ne se connait pas mais je pense que tu devrais être un peu plus reconnaissante envers les tiens.

— Toi ta gueule ! Que tu parles mal à ma sœur passe encore mais ne t'avise pas de m'adresser la parole, je peux te démolir en deux tours de main alors tiens ta place.

J'avais oublié ce que c'était que d'être aimée (TERMINÉ)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant