Chapitre 43

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" Alors c'est ce soir le débat ? "

Je levai la tête, Mathilde venait de faire son apparition dans l'office, ce vendredi après midi.
Je soufflai:

" Il semblerait ... "

Je redoutais ce débat ou j'allais revoir Louise, à la vue de notre dernière rencontre, j'imaginais que cela allait être électrique.

" Je te jure Emma, je ne sais pas pourquoi tu t'es mis sans cette galère ! C'est un animal politique cette nana, elle va te dégommée ! "

" Ce n'est pas moi sa cible, c'est Philippe ! "

Mathilde haussa les épaules.

" Oui mais avec cette histoire de vraie / fausse divulgation, elle va pas te louper... "
" Ça va, elle a eu le temps de se calmer ! "

Une semaine plus tard, je trouvais toujours sa réaction disproportionnée. Peut être avais je aiguillé Philippe, mais c'était mon rôle de colistière, et surtout, je n'avais aucun compte à rendre à Louise.

" Bon, je serais là dans tous les cas ! Prête à te récupérer en petit morceau ! "

Ce soir là, nous étions en réunion avec l'ensemble de l'équipe pour peaufiner les derniers détails du débat.
Tel était le déroulement de ce débat publique: une première partie avec les deux candidats maires,puis des questions publiques face aux journalistes et aux électeurs présents.
Chacun dans l'équipe, nous avions des sujets de prédilections : le mien était l'aménagement urbain et du territoire. J'avais abordé cela au début de mes études et j'adorais me pencher sur ces questions qui me passionnaient.

" Incisif, percutant, convaincant ! " furent les derniers mots de Philippe avant l'entrée en scène.
La salle était bondé, l'ambiance surchauffé. C'était un journaliste qui organisait la première partie, donnant la parole à l'un, puis à l'autre sur des sujets diverses. Ce fut électrique entre les deux candidats.
Louise était très incisive, charismatique, ne lâchant pas Philippe. Elle était là, sur cette tribune, un costume bleu marine avec un chemisier blanc, invectivant, déroulant son speech, sans notes, défendant son bilan, et déroulant son programme.
Philippe était également très bon, et arrivait à se mettre à la hauteur de Louise, ce qui n'était pas une chose aisée. Il essayait de contrer chacune de ses prises de positions.
Les piques fusaient de par et d'autres, subtilement.

Je n'arrivais pas à ne pas poser mon regard sur Louise, comme un aimant. J'observais son allure : elle transpirait à présent sous la chaleur des néons, ses mains s'agitaient, son regard se baladait sur l'ensemble de la salle. Ses yeux bleus.

Dans un second temps, ce fut le tour des questions de la part du public. Une question était posé à une des listes, et l'équipe devait y répondre. Cela se dirigeait plus vers les colistiers, selon le thème du sujet.
En effet, après une longue première partie sur les candidats maires, ils étaient intéressant de se pencher sur l'équipe toute entière. Ensuite, le candidat maire pouvant répondre.
Les premières questions fusèrent : l'école, la voirie, la circulation, la culture ...
C'était comme un combat, surchauffé entre les deux équipes, chacun défendant ses propositions.
Puis, ce fut le tour d'une question sur le thème aménagement du territoire : une zone en banlieue difficile que nous voulions réaménager dans les prochaines années.
Philippe me laissa la parole. Je pris ma respiration, quelque peu tendue. Je cherchais du courage dans les yeux de Mathilde, assise dans la salle.
Je déroulais alors notre projet avec conviction, avançant nos arguments, mettant en avant que cette zoné avait été laissé de côté durant plusieurs années et attaquant de ce fait frontalement Louise.
J'essayai d'être incisive et convaincante. A la fin de mon speech, je me rassis. Philippe se tourna vers moi, me faisant un clin d'oeil discret et un grand sourire, ravi de ma prestation. Il semblait que j'avais réussi ce passage dans l'arène.

Soudain, une voix retentit :

" Si je puis me permettre ... "

C'était Louise. Ma gorge se serra. Elle continua:

" J'espère que ce projet sera plus efficace que votre travail, mademoiselle Paris ! "
Elle me fixa, puis Elle se tourna vers le public:

" J'invite cette personne à un congrès pour faire connaître son entreprise il y a peu de temps, elle déserte au beau milieu du week end ! Quel professionnalisme ! Ça promet ! " dit elle dans un sourire ironique.

Elle enchaîna :

'' Je ne parle pas de la durée des travaux chez moi, dont elle était l'architecte, qui a presque doublé pour un résultat ... bref je ne m'étalerais pas dessus ! "

Je restai bouche bais. Elle avait raison: ils avaient doublé par ses changements d'humeur et il y avait également eu des problèmes de livraisons indépendantes de notre volonté. Philippe me fixa, me demandant d'intervenir, de me défendre sur ces attaques personnelles.
Mais je n'arrivais pas à sortir un son.
A la place, c'est Louise qui conclut :

" Tout ça pour dire que ce petit projet mené avec autant de professionnalisme, au secours ! "

Une partie de la salle se mit à rire.
Je n'avais pas dit un mot, scotchée sur place.

La fin du débat arriva peu après, mais il apparut pour moi comme une éternité.
Philippe me rassura, me rappelant que j'avais été très bien dans mon intervention.

Mathilde s'approcha de moi, un regard compatissant

" Bon, on n'a pas eu une bonne pub ce soir ! Ça va toi ? "

" Oui, ça va, ça va, c'est le jeu ! ''

Au fond de moi, j'avais été profondément blessée, meurtrie de son intervention qui n'avait pour but que de me descendre, publiquement, moi, mon entreprise, et de ce fait Mathilde.

J'étais en rage contre Louise.
Dans une semaine, il était prévu le deuxième et dernier débat avant les élections.
Je voulais à ce moment là, la descendre très bas.

Madame la Maire Where stories live. Discover now