Chapitre 45

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J'étais là, devant elle, devant ses yeux bleus. Ses yeux bleus qui m'avaient tour à tour refroidis, déstabilisés, envoûtés, excités ...
J'avais entre mes mains cette révélation, prête à dégainer.
Tout se bouscula dans mon esprit, tout ce qu'elle et moi avions vécu, en quelques secondes.

J'avais la gorge sèche, je me sentais mal à présent.
Quelle personne étais je devenu ? Prête à prendre le prétexte d'un message pour éventuellement la faire couler ?
Comment avais je pu atteindre ce niveau de vengeance ? Je ne me reconnaissais pas, à cet instant. J'avais honte, ce n'était pas moi.

Il y a avais un silence de plomb dans la salle, chacun attendant ma réponse qui n'arrivait pas.

" Je ... euh ... "

Je croisai le regard de Mathilde, inquiète.
Louise me regardait. Ses yeux étaient mort d'inquiétude.

" Je ... euh ... voudrais prendre 5 minutes de pause, je me sens mal ... "

Je balbutiais. Tout le monde était interdit.
Une pause de 15 minutes devait être prise 5 minutes plus tard, le journaliste décida de l'avancer.

Je me réfugiai dans les toilettes, dans un état second.
Philippe me rejoignit, inquiet, me demandant ce qu'il n'allait pas.

" Je ne peux pas faire ça Philippe, qu'est ce que je suis devenue ? Balancer des messages privés ? "

J'étais en sanglots, incontrôlables.
Il me prit dans ses bras : je pense qu'il avait compris à ce moment là ce qui pouvait m'unir à Louise, sans en connaître les détails. Mais il ne dit rien, comprenant juste ma souffrance.

" Si tu es si mal Emma, on peut encore intervertir ta place ... "

Je répliquai:

" Tu ne m'en voudras pas ? "

" Tu es géniale comme colistière, je voudrais que tu restes, de tout mon coeur. Mais tu n'es pas heureuse là, au fond. Alors reste en soutien, et on fera monter Julie à ta place ! Quand tu reviens dans le débat, dis juste que tu as une opportunité inouïe à l'étranger, qui va te tenir loin de la ville pour quelques mois... "

C'était ce qu'il fallait que je fasse, me tenir loin de cette élection qui me bouffait la vie. J'aimais cet investissement mais un seul nom buttait dans ma tête, irrémédiablement : Louise.
Je n'avais pas voulu me l'avouer, aujourd'hui, j'avais perdu mes nerfs. Tout cela allait trop loin.

Lorsque le débat repris, je pris la parole, très émue, les yeux rougis.

" Excusez moi pour tout à l'heure, j'étais très émue. Car j'aime cette équipe avec qui j'ai travaillé pendants plusieurs semaines, avec acharnement. Mais j'ai eu une opportunité à l'étranger pour quelques mois, difficilement refusable. Et il était hors de question de me faire élire si je ne peux assumer totalement mes responsabilités. Je vous annonce mon retrait, même si je reste en soutien, pas le choix avec cette équipe de choc ! ''

La salle se mit à rire.

" Ce fut une expérience incroyable au sein d'une équipe formidable... Je tiens à souhaiter bonne chance à Julie Decours qui va prendre ma place et à Philippe Arous, pour être notre futur maire ! "

La salle applaudit. Ça y est c'était fait, j'avais quitté partiellement le navire. Je ne pouvais plus faire autrement.
C'est Mathilde qui me prit la première dans ses bras, sans mots, et sans aucun doutes soulagée.
Puis je vis son regard se figer, noir. Je tournai la tête.
Louise était derrière moi.

" N'y va pas ! " me lança t'elle.

" Il faut fermer ce chapitre ... "

Je m'approchai d'elle. Elle me conduisit dans un recoin de la salle, à l'abris des regards.

" Pourquoi tu as fait ça Emma ? "

Elle me regardait, interdite.

" Je suis lassée de ce petit jeu de guerre entre nous. C'est fini. J'arrête. "

Elle me fixait à présent, dans la pénombre.

" Je ne veux pas que ça soit la guerre ... "

Elle s'approcha de mes lèvres, voulant m'embrasser, posant sa main derrière mon dos.
Je la repoussai alors.

" Louise, c'est fini, j'arrête. "

Madame la Maire Wo Geschichten leben. Entdecke jetzt