Chapitre 30

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Savana s'était assoupie livre à la main avant d'être réveillée par des voix assez fortes pour les entendre. Elle dégagea son étoffe qui lui avait apporté un peu de chaleur et s'approcha des battants.

- Je me suis fait la promesse de la protéger et voilà qu'elle fait office de couverture sur des torchons ! Rugit une voix qu'elle connaissait que trop bien.

Savana se recula sous l'effet violent qu'avait le timbre de sa voix. Aujourd'hui, Arik s'ouvrait à elle d'une manière qui la dépassait. Enveloppée de frisson, elle se colla au mur.

- Je vais faire un communiqué, décida Hamid.

- Ce n'est pas aussi simple et tu le sais ! Nous n'avons plus qu'à laisser cette rumeur mourir petit à petit, suggéra Arik ; Si je m'empresse de démentir alors ils penseront que ce vrai.

Savana se pinça les lèvres. Le photographe ne l'avait visiblement pas épargnée. Elle imaginait sans grand mal le titre évoquant une liaison avec lui. Bientôt, ils chercherons à savoir qui elle était.

- Savana n'est pas venue ici pour faire l'objet de rumeurs Hamid.

- Je le sais votre altesse.

Des pas lourds lui indiquèrent que les deux hommes s'en allaient. Alors seulement là, Savana inspira profondément. Abasourdie elle secoua de la tête pour reprendre ses esprits mais fut envahie par une vive chaleur qui lui fit battre le cœur à tout allure. À ce rythme là, Savana restait convaincue qu'elle allait réellement s'évanouir. Car c'est seulement après s'être extirpée de son état second qu'elle s'aperçut avec des rougeurs sur le visage qu'elle portait le keffieh qu'il avait noué autour de son visage. Était-il venu lui remettre pendant qu'elle dormait ? Évidement ! Puisqu'il était là !

Troublée, elle se mit à faire les cents pas dans la pièce en tirant sur ses doigts. Elle songeait même à appeler le Dr West pout qu'il lui vienne en aide. Arik s'était emporté dans le restaurant. Il n'avait pas apprécié qu'elle ait menti sur son identité en prétextant être une écuyère. Il est vrai qu'en y réfléchissant mieux, Savana trouvait ça complètement ridicule.

- Mademoiselle !

Zafina lâcha ses livres pour venir lui retirer sa main de son bras.

- Que faites-vous ? Souffla-t-elle sous le choc.

Le visage en peine, Savana perdit ses mots en voyant ce qu'elle s'était fait au bras.

- Mon enfant, et si vous alliez retrouver les autres étudiantes, intervint Azima en pénétrant dans la pièce.

La jeune fille lâcha son bras avec une expression peinée pour elle.

- Mais...

- Zafina, s'il te plaît.

Azima marqua sa demande avec un sourire rassurant. Zafina récupéra ses livres tristement. Savana se retourna pour échapper à leur pitié, parvenant avec difficulté de refouler les larmes qui lui brûlaient les yeux.

- Elle est très triste, chuchota Azima en arabe tout en caressant la joue de l'étudiante.

Celle-ci n'eut pas le cœur à lui rendre son sourire et quitta la pièce. Azima s'approcha prudemment.

- Vous n'avez rien à craindre de moi, prévint-elle en lui prenant son bras égratigné à sang.

Savana eut mal à respirer, saisit par de terrible sanglots.

- Je ne sais pas ce qui m'a pris, murmura-t-elle d'une voix tremblante.

- Ce n'est rien, venez avec moi, dit Azima en posant un tissu improvisé sur sa blessure.

Savana la suivit sans discuter dans les cuisines. La honte la submergeait peu à peu. Le personnel s'interrogeait sur le tissu posé sur son bras. Le plus terrifiant c'est qu'elle ne s'était pas rendu compte de ce qu'elle s'infligeait.

- On va soigner ceci avec un peu de désinfectant, prévint-elle en posant une compresse sur son bras.

- Ce n'est pas arrivé depuis des mois, confia-t-elle en se passant une main sur le visage.

- Les mots que je pourrais employer pour vous décrire ce que je ressens ne seraient pas assez fort, murmura Azima en lui mettant une bande ; Ne laissez pas vos sombres pensées prendre le dessus sur vos joies.

Savana sourit faiblement.

Pendant qu'elle songeait au mécontentement du cheikh, sans le vouloir, Savana avait laissé les images de Max dominer ses pensées.

Terriblement anxieuse à l'idée qu'Arik s'en aperçoive Savana sentit son cœur battre contre ses tempes violemment.

- Ne lui dites rien Azima, implora Savana avant d'entendre des pas rapides se précipitaient vers les cuisines.

- On vient de m'informer que...

Trop tard. Le cheikh se stoppa dans sa lancer pour regarder son bras. Sa paire d'yeux sombre remonta sur elle. Une vive inquiétude éclata dans ses prunelles assombries.

- Merci Azima, dit-il alors sur un ton qui le trahissait.

Savana refusait de perdre les dernières forces qui lui restaient. Alors quand il prit le relais pour refermer le bandage, le regard impassible, Savana retint son souffle. Il dénoua le travail d'Azima pour étudier sa blessure. Son regard se changea aussitôt, pliant ses traits, ses cicatrices.

- C'est à cause de moi, déduit-il d'une voix où perçait l'amertume.

- Non ! Contrat-elle, refusant catégoriquement de le laisser penser de pareilles choses.

Loin d'être convaincu, il se remit à faire le bandage.

- J'aimerais qu'il disparaisse de ma tête, murmura-t-elle d'une voix éraillée.

- Comptez sur moi pour le faire disparaître, lui promit-il d'une voix si sombre qu'elle frissonna.

Elle décelait dans ses yeux une farouche détermination et le crut sur parole. Sa gorge devint subitement douloureuse.

- Cela vous arrive souvent ? Questionna-t-il sur le même ton.

- Quelques fois, s'entendit-elle admettre en fermant les yeux comme lessivée ; D'habitude j'ai un élastique à faire claquer contre mon poignet mais je l'ai perdu.

- Doucement, intima l'homme en pressant sa main sur son épaule comme elle cherchait son élastique partout dans l'espoir de le retrouver ; Je vais remédier à ce détail plus tard.

Il pressa ses paumes sur son poignet et semblait réfléchir.

- Je ne veux plus que vous vous fassiez du mal, est-ce clair, exigea-t-il inflexible.

Savana acquiesça. D'ailleurs, que pouvait-elle faire d'autre ?

La colère qui lisait dans son regard ne lui était pas destinée, mais capable de lui affirmer sans le moindre doute qu'il serait mécontent de la voir recommencer. Alors Savana venait de lui promettre sans avoir la garantie absolue qu'elle ne recommencerait pas. Elle se sentait lassée, épuisée et en échec. Son mentale semblait toujours emprisonné dans l'enfer qu'elle avait subi comme suinté par un sang souillé.

Éprouvant une soif épouvantable, Savana se redressa sur le lit sans faire de bruit et but une grande gorgée d'eau. Elle resta quelques secondes assise puis se tourna vers lui. Il était allongé sur le côté, bras plié, biceps gonflés. Savana se glissa plus près de lui car c'est à son contact que ses tourments se calmaient. La chaleur qui s'irradiait de lui suffit à la réchauffer. Elle remarqua ses sourcils légèrement froncés, comme s'il souffrait dans son sommeil. Un pincement au cœur la poussa un peu plus vers lui. Et même si elle tremblait de tout son corps par peur de commettre une faute grave, Savana déposa un furtif baiser sur le coin de sa lèvre. Sa bouche reçut des décharges électriques.

Son cœur se mit à palpiter. Une chaleur se répandit sur sa bouche comme si elle garderait l'empreinte de sa bouche dure à jamais. Mortifiée d'avoir profité qu'il dorme pour déposer un baiser sur sa bouche...Savana enfonça son visage dans l'oreiller, poings liés contre sa bouche sans savoir que le cheikh aux yeux perçants ne la quittait plus du regard...

Dans les bras du cheikhOù les histoires vivent. Découvrez maintenant